Les Balkans filtrent les migrants… on réclame, en Europe, la révision de Schengen

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Des migrants, se reposent à Nickelsdorf, après avoir traversé la frontière entre la Hongrie et l’Autriche.

 
Alors que les Balkans commencent à filtrer les flux de réfugiés/migrants, dans le sillage de peur des attentats de Paris, les Français découvrent avec angoisse que leur présumé et bien connu organisateur se trouvait confortablement chez eux, à saint Denis, au nez des services français… « Il faut une révision de Schengen ! » hurlent Cazeneuve et Valls. Plus de contrôle mais surtout, en réalité, plus d’Europe… Pas question de frontières nationales.
 

On croyait Abdelhamid Abaaoud en Syrie

 
Le gouvernement l’a confirmé ce jeudi : le djihadiste Abdelhamid Abaaoud a bien été tué dans l’assaut mené à Saint Denis par le Raid, mercredi matin. Autrement dit, le présumé organisateur des attentats du 13 novembre se trouvait aux portes de Paris, sans que l’on n’en sache rien, alors qu’il était sous le coup de mandats d’arrêt internationaux et que son visage était largement répandu sur les réseaux sociaux. Il a surtout effectué plusieurs allers-retours entre la Belgique et la Syrie, sans jamais avoir été inquiété…
 
Devant cette facilité de circulation, toute la presse s’interroge, ce vendredi – on s’étonne qu’elle s’étonne. Elle vise les failles du renseignement français et l’échec sécuritaire de l’espace Schengen. Un ancien responsable de la DGSE a déclaré, anonymement : « Il faut l’admettre, Schengen est une passoire (…) Ce gars, avec un CV et des antécédents pareils, où qu’il soit entré dans Schengen, cela aurait dû provoquer un drapeau rouge ».
 
Manuel Valls a reconnu lui-même que les services de renseignements « ne [savaient] pas » comment il était entré en France… S’ils sont arrivés jusqu’à cet appartement du 9.3, ce fut uniquement, à la base, grâce à une information des Renseignements marocains.
 

On n’en veut plus ! Les Balkans filtrent les migrants

 
A l’Est, les seuls attentats de Paris avaient déjà fait comprendre cette incurie. Depuis mercredi, les pays des Balkans se sont mis à filtrer par nationalité, les flux de migrants débarquant sur leurs terres, autrement dit à tenter de distinguer les réfugiés de guerre – qui n’en sont même pas toujours – des migrants économiques.
 
La Slovénie a donné le ton, en essayant de renvoyer en Croatie 162 migrants qui ne venaient pas de pays en conflit (selon un porte-parole de la police slovène, le nombre de migrants économiques est en augmentation constante). Sur la route migratoire, la Croatie, puis la Serbie, enfin la Macédoine se sont mises de concert à « trier », aucun des pays ne souhaitant conserver « les refusés ».
 
En moins d’une journée, les migrants se sont retrouvés près de 2.000 à patienter en Grèce le long de la frontière macédonienne – c’est dire la densité du passage, qui ne faiblit pas.
 

La révision de Schengen : une réponse européenne renforcée

 
En France, on fait mine de prendre le taureau par les cornes. Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve a appelé jeudi à une réaction européenne face à la menace terroriste, avec en particulier une révision rapide des règles de l’espace Schengen. La réalité de l’afflux migratoire et les risques inhérents – que personne n’acceptait de voir auparavant – semblent aujourd’hui perturber le bien-fondé de la libre circulation réservée aux ressortissants des pays signataires.
 
Va-t-on enfin s’occuper de nos frontières à nous ?! Que nenni… Un Schengen II, c’est encore plus d’Europe, et toujours moins de France. Plutôt que « trier », on préfère « contrôler ».
 
Les ministres de l’Intérieur des États membres se réunissent aujourd’hui à Bruxelles, dans un Conseil extraordinaire de l’UE, pour débattre, entre autres, de ce sujet. Les pays européens font front commun pour réclamer deux nouvelles mesures : la révision ciblée de l’article 7 du Code Schengen qui réserve les contrôles systématiques et approfondis (système d’information Schengen, SIS) aux frontières extérieures, aux ressortissants d’États tiers. Ils souhaitent les étendre, « immédiatement », à tous les citoyens y compris européens.
 
Ils poussent également pour une adoption plus rapide du registre européen des données des passagers (PNR), « avant la fin de 2015 », qui « devrait inclure les vols internes dans son champ ». Ceci, afin de pouvoir « assurer la traçabilité du retour des djihadistes », mais qui permettra en même temps de tracer quiconque ; toutes les compagnies y seront contraintes.
 

La survie de l’Europe bruxelloise, avant tout

 
L’Europe fait officiellement la fine bouche, estimant fournir déjà « tous les outils pour des contrôles efficaces aux frontières extérieures » selon un Commissaire européen – elle voudrait ne pas toucher à l’espace intra-européen. Mais accédera très probablement à la demande.
 
Somme toute, les pays européens ne demandent qu’un renforcement de la sécurité de cet espace Schengen, sous l’égide de Bruxelles… dont la survie est plus importante que tout. Alors que ce serait à lui de protéger ses propres citoyens à travers une surveillance individuelle de ses propres frontières nationales, l’État français réclame à l’Europe de bien vouloir réfléchir à ne plus laisser passer de terroristes…
 
Cet État n’en est plus un. Il suffit de voir comment Valls a refusé, selon les révélations de l’ancien directeur du renseignement intérieur, Bernard Squarcini, la liste des Français combattants en Syrie, que lui proposaient les renseignements syriens, parce que Bachar El Assad lui réclamait en retour la reprise des relations diplomatiques… Il y avait au moins trois Français parmi les kamikazes à Paris. Une ambassade valait bien plusieurs dizaines de vies.
 

Clémentine Jallais