La Banque Centrale européenne a déjà racheté pour 1.000 milliards de dettes aux Etats-membres. Pour rien ?

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Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne.

 
La planche à billets fonctionne à toute vitesse au sein de l’institution monétaire européenne. Dix-huit mois après le lancement de son programme d’achat d’emprunts d’Etat au sein de la zone euro, la Banque Centrale européenne vient de franchir le cap des 1.000 milliards d’euros investis dans cette politique d’assouplissement, plus connue sous le nom de Quantitative Easing. Mais ces dettes rachetées – à hauteur d’environ 15 % aujourd’hui – aux Etats-membres ne semblent pas avoir produit les résultats escomptés. Certes, ce qui est devenu l’un des premiers fonds de dettes au monde témoigne du volontarisme de la BCE à soutenir l’idéologie économique et financière qui est un des principaux fondements de l’Union européenne. Mais, à six mois de la fin de ce programme qu’on nous a assuré sur tous les tons devoir demeurer exceptionnel, les adversaires du totalitarisme bruxellois ont beau jeu d’affirmer qu’il n’a rien produit. Car l’institution monétaire, malgré l’injection dans la zone euro de cette énorme masse de liquidités, peine à relancer les investissements. La fameuse croissance est toujours atone, et ses annonceurs perdent chaque jour de leur assurance.
 

1.000 milliards de dettes !

 
A ce niveau, les professionnels du secteur économique attendaient que la BCE réagisse assez rapidement, peut-être en annonçant une nouvelle évolution de ses taux directeurs. Mais, bien évidemment, sans prendre de mesures radicales qui affecteraient l’euro, la BCE étant, par essence, la garantie de la stabilité de la monnaie unique.
 
Il faut bien comprendre que, en souscrivant également cet été aux émissions obligataires sur des entreprises privées pour atteindre ainsi ce chiffre exceptionnel de 1.000 milliards, la Banque Centrale européenne fausse le marché, et, de ce fait, perturbe l’équilibre économique. Sans parvenir à convaincre que ceci favoriserait le retour de la croissance…
 

Le soutien de la Banque Centrale européenne aux Etats-membres

 
Cela n’a pourtant pas empêché la BCE de relever jeudi sa prévision de croissance économique pour l’ensemble de la zone euro cette année. Certes Mario Draghi se montre moins optimiste pour les deux années à venir.
 
« La reprise économique dans la zone euro devrait être freinée par une demande étrangère toujours affaiblie, en partie du fait des incertitudes liées du résultat du référendum britannique, des nécessaires ajustements de bilan dans un certain nombre de secteurs et de la lenteur de la mise en œuvre des réformes structurelles », a ainsi déclaré le président de la Banque Centrale européenne.
 
Mais que fait-il des résultats de la City londonienne qui, loin des prévisions catastrophiques liées au Brexit pourtant pointé du doigt, semble retrouver du poil de la bête ?
 
Pour l’heure, Mario Draghi n’entend pas regarder plus loin. Il n’envisage pas même de prolonger au delà du terme prévu du printemps prochain la politique du Quantitative Easing. « Pour l’instant, les modifications des prévisions ne justifient pas de prendre des décisions ; la politique monétaire fonctionne », s’est-il contenté de déclarer. « Si cela est nécessaire nous agirons en utilisant tous les instruments disponibles dans le cadre de notre mandat », a-t-il ajouté sans autre précision…
 
Le moins que l’on puisse dire est que cela n’a guère de chance de pousser les marchés à l’optimisme.
 

Pour rien, ou presque…

 
L’économie aura donc bien du mal à redémarrer. Car, in fine, les consommateurs ne semblent pas vouloir dépenser davantage, par un compréhensible manque de confiance en l’avenir.
 
Et si le consommateur se refuse à consommer, il n’y a guère de raisons pour que les entreprises investissent, quelques quantités astronomiques de liquidités la BCE continuerait d’injecter. Il n’est pas besoin d’être John M. Keynes – ni d’ailleurs de partager sa vision de l’économie… – pour le comprendre !
 

Hubert Cordat