La bibliothèque du Congrès des Etats-Unis supprime la rubrique « illegal alien » jugée péjorative pour les clandestins

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« Chaque année, de moins en moins de mots, et le champ de la conscience de plus en plus restreint. » (1984, Orwell)

 
La plus importante bibliothèque au monde, la Library of Congress aux Etats-Unis vient d’annoncer qu’elle commencera à réorganiser dès le mois de mai son système de mots clefs pour le classement et la recherche d’ouvrages. Premiers visés, les mots politiquement incorrects et péjoratifs « alien » et « illegal alien ». Désormais, les livres et articles évoquant les clandestins se trouveront sous les rubriques « non citoyens » et « immigration non autorisée ». C’est, paraît-il, beaucoup moins stigmatisant. Il faut à tout prix éviter de rappeler que les clandestins sont hors-la-loi !
 
L’entreprise de nettoyage des mots clefs et des rubriques a été décidée à la suite de pressions d’un groupe d’étudiants d’université qui ont protesté contre l’usage « péjoratif » du mot « alien ». Leur demande officielle a été déposée à l’automne de 2014, déclenchant un processus de réflexion qui vient d’aboutir, selon un communiqué de la Library of Congress. La prestigieuse bibliothèque a mis sa division « Politique et normes » au travail pour trouver des périphrases.
 

Ne dites plus « illegal alien » pour parler des clandestins, mais « non citoyen »

 
Celle-ci a dans un premier temps rejeté la proposition faite par les étudiants qui suggéraient de parler d’« immigrés sans papiers », arguant que ces mots ne recouvrent pas exactement le concept d’« illegal aliens » puisque toutes les personnes sans papiers n’ont pas l’intention d’immigrer aux Etats-Unis et que nombre d’entre eux ont certains papiers. D’autre part, le vocabulaire juridique consacré retient les termes contestés.
 
Mais lors de la rencontre hivernale de l’American Library Association en cette année, l’ALA a encouragé la Bibliothèque du Congrès à adopter les mots « Undocumented immigrants ». Du coup la division « Politique et normes » s’est de nouveau réunie pour trouver une autre idée : avec l’aide d’autres responsables de la vénérable institution, elle a proposé de parler de non-citoyens et d’immigration non autorisée, des mots inélégants dont on peut dire au moins qu’ils conviennent mieux à la Novlangue et à ses objectifs de modification de la pensée.
 

La Bibliothèque du Congrès des Etats-Unis supprime les termes péjoratifs dans ses rubriques

 
Les « non-citoyens » désigneront dès lors les personnes qui ne sont pas citoyens du pays où ils travaillent, soit qu’ils aient l’intention d’émigrer, soit qu’ils s’y trouvent à titre temporaire en tant que touristes, étudiants, travailleurs temporaires ou autres.
 
La discussion sur les « aliens » n’est pas neuve à la Bibliothèque du Congrès : ce fut l’une des premières rubriques ouvertes dans le système de classement établi depuis 1910. Au fil des ans, on s’interrogea sur le double sens du mot qui désigne également les extra-terrestres, et c’est en 1980 qu’on imposa « Aliens, Illegal » qui devint en 1993 « Illegal aliens ». Les mots avaient l’avantage de correspondre à la terminologie couramment employée dans les ouvrages désignés.
 
Depuis lors la pensée antiraciste a gagné du terrain. Dès avril 2014 l’Associated Press s’engageait à ne plus employer le terme « illégal » pour décrire quiconque.
 
Jusqu’où iront-ils ? Vous verrez qu’il faudra bientôt il faudra désigner les criminels condamnés comme des « entrepreneurs du secteur des activités non autorisées ». On ne « stigmatisera » plus que les adversaires du politiquement correct.
 

Anne Dolhein