Chômage : le gouvernement à la manœuvre. Et la courbe ?

Chômage gouvernement manoeuvre courbe
 
Le gouvernement a annoncé jeudi qu’il reprenait la main sur l’assurance chômage après l’échec des négociations entre les partenaires sociaux. Dans le même temps, ou presque, l’INSEE annonce que la courbe du chômage pourrait – enfin ! – s’inverser
 
Le gouvernement a annoncé jeudi qu’il reprenait la main sur l’assurance chômage après l’échec des négociations des partenaires sociaux sur une nouvelle convention. La situation, de fait, est critique, ce qui fait que chacun refuse de faire évoluer ses positions. Selon ses propres prévisions, en effet, l’Unedic, qui indemnise 2,7 millions de demandeurs d’emploi, sera en déficit de 4,2 milliards d’euros en 2016, et de 3,6 milliards en 2017. Ce qui, au total, portera son endettement à 33,6 milliards fin 2017…
 

Chômage : le gouvernement remplace les partenaires sociaux

 
Ni le MEDEF, ni les syndicats n’ont donc voulu poursuivre, et prolonger une convention dont les patrons estiment qu’elle a fait la preuve de son inefficacité – mais qui va être prolongée néanmoins au-delà du 30 juin par décision gouvernementale.
 
On peut imputer, comme le font les syndicats, ce nouvel échec aux dissensions internes du MEDEF, qui, pour sa part, leur renvoie la balle en les accusant d’avoir adopté des « postures dogmatiques visant à punir les entreprises ».
 
On peut aussi, et de façon plus certaine, y voir le signe d’une détérioration d’une situation générale de la société que, malgré ses fanfaronnades, François Hollande n’est pas parvenu à redresser. A tel point que les commentateurs notent qu’il y avait plus de trente ans que le gouvernement n’avait pas été obligé d’intervenir directement…
 
Il y a sans doute une autre raison à cette intervention gouvernementale, qui tient davantage de l’inquiétude que de la sollicitude. En effet, les autorités françaises ont promis à la Commission européenne de trouver 1,6 milliard d’euros d’économies d’ici la fin de l’année prochaine. Et la situation actuelle augure mal des moyens d’y parvenir, au point que la négociatrice de la CFDT, Véronique Descacq, a mis en garde le gouvernement contre la tentation de « diminuer les droits des demandeurs d’emploi » pour tenir cet engagement.
 
Quoi qu’il en soit, l’idée exprimée par Matignon, que les partenaires sociaux puissent reprendre les négociations à la rentrée, paraît pour le moins utopique, chacun s’accordant à dire que la perspective de l’élection présidentielle risque, au contraire, de compliquer davantage encore la situation.
 

La dynamique d’Emmanuel Macron

 
L’Etat devait donc avoir, comme l’a souligné vendredi le ministre de l’Economie, un « rôle croissant » à jouer dans l’assurance chômage. Et ce d’autant plus, soulignait-il, que le système est de moins en moins paritaire.
 
« Quand il y a quasiment trente milliards d’euros de déficit cumulé et que c’est la garantie de l’Etat, et donc du contribuable, qui fait vivre le système, on n’est plus totalement dans un système paritaire », a-t-il expliqué.
 
Emmanuel Macron, qui a par ailleurs rassuré François Hollande en affirmant qu’il n’envisageait pas de se porter candidat à la présidentielle, a ajouté – pierre dans le jardin des partenaires sociaux ? – qu’il fallait en outre donner une « dynamique plus intelligente » au système d’indemnisation du chômage.
 
C’est donc au moment où l’Etat décidé de reprendre la main en ce domaine, que l’INSEE annonce – coïncidence heureuse ! – que le chômage devrait tomber à 9,5 % de la population active à la fin de l’année en France métropolitaine, soit 0,4 point de moins qu’en 2015.
 

INSEE : courbe ou manœuvre ?

 
Dans une note de conjoncture publiée jeudi, l’institut anticipe aussi une croissance de l’économie française à 1,6 % cette année.
 
Le ministre des Finances, Michel Sapin, s’est aussitôt félicité de ces prévisions qui viennent conforter, voire consolider, le scénario de croissance de 1,5 % de l’économie française affiché par le gouvernement pour cette année.
 
« Ces prévisions nous incitent à continuer à mettre en œuvre nos politiques de soutien à l’activité, à l’emploi et au pouvoir d’achat », a ajouté le ministre.
 

La satisfaction de Michel Sapin

 
C’est peut-être un peu rapide, et l’on peut douter que la courbe du chômage ait enfin entendu les incantations de François Hollande, d’autant que, en définitive, ce taux ne fait que revenir à celui qui existait au début du quinquennat.
 
Autrement dit, la politique dont se félicite Michel Sapin a surtout commencé par aggraver la situation…
 
Comme il faut éviter ce genre de considération, on nous sert un bouc émissaire pour éventuellement expliquer à l’avance que ces prévisions ne se réalisent pas. Et il y en a un tout trouvé : le Brexit, qui, selon l’INSEE, est « un aléa négatif ».
 
Ah ! les braves gens ! Non seulement ils servent sur un plateau les chiffres dont le chef de l’Etat a besoin pour envisager 2017 avec sérénité, mais, en outre, comme ces chiffres ne sont que prévisionnels, il dédouane François Hollande d’un possible échec sur le dis des Britanniques.
 
On devrait les décorer…
 

François le Luc