Le CRIF s’inquiète de ce que les juifs de France soient devenus des citoyens de deuxième zone

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Manuel Valls au dîner du CRIF à Paris le 7 mars 2016.

 
Roger Cukierman, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (plus connu sous son acronyme CRIF), a déclaré lundi à Paris que les juifs de France vivaient avec le « sentiment angoissant » d’être devenus des « citoyens de deuxième zone ».
 
« En raison des attaques ou menaces jihadistes et des actes antisémites, nous vivons une vie retranchée », a ajouté Roger Cukierman. « Nous avons le sentiment angoissant d’être devenus des citoyens de deuxième zone. Cet ostracisme isole et traumatise. »
 

Les juifs de France sont devenus des citoyens de deuxième zone

 
Ces propos – et quelques autres, – ont été tenus à l’occasion du dîner annuel du CRIF. Que l’on sache, ce dîner est devenu un rendez-vous incontournable de la vie française, où se pressent, chaque année, plusieurs centaines de personnalités, tant politiques que médiatiques, ou appartenant au monde du spectacle. Il se tient, en général dans un très grand restaurant parisien, et il en coûtait, cette année, neuf cents euros – dont huit cents donnaient droit à un reçu fiscal, sujet sur lequel les réseaux sociaux s’en sont donnés à cœur joie…
 
Tout cela est tout de même très loin de ce qu’on peut appeler « une vie retranchée »…
 
Mais cela n’a pas empêché Roger Cukierman de lancer : « L’état d’urgence doit aussi s’appliquer sur internet. »
 
Après tout, pourquoi se priver, puisque Manuel Valls, qui remplaçait François Hollande retenu à Bruxelles, a eu exactement la réaction attendue. Disant comprendre la « peur » des juifs de France, le premier ministre a mis sur le même plan « antisémitisme » et « antisionisme », la « haine d’Israël ».
 
Parmi les assurances données, on peut noter : « Oui, les juifs de France, trop souvent, ont peur. De porter la kippa, d’aller à la synagogue, d’aller faire leurs courses dans les commerces casher, d’envoyer leurs enfants à l’école publique. C’est une réalité. Et cette réalité, nous ne l’acceptons pas. »
 
Ou encore : « Les juifs de France ont bâti la France et ils doivent continuer de la bâtir. »
 

L’inquiétude du CRIF et les assurances de Manuel Valls

 
En pratique, Manuel Valls, qui a appelé les Français juifs à ne pas douter de la France, a – notamment – annoncé que la disposition visant à sortir les délits antisémites et racistes du droit de la presse pour les faire rentrer dans le droit commun figurerait dans un projet de loi soumis au Parlement au printemps.
 
Ce qui invite à s’interroger : la presse serait-elle antisémite ? Pourtant, parmi ces Français juifs, il y a manifestement un certain nombre de journalistes juifs. Ou alors, les juifs sont-ils les seuls à pouvoir traiter des sujets qui les concernent ?
 
Apparemment, il n’y a pas eu de précision donnée quant à cette « peur » des juifs de France. Si ce n’est le propos de Roger Cukierman, soulignant que seul un tiers des enfants juifs seraient aujourd’hui scolarisés dans le secteur public, du fait de l’insécurité qu’ils y rencontrent. Leurs familles préfèreraient les mettre dans le privé, juif ou catholique.
 
Manuel Valls n’a manifestement pas noté que c’était un bon point décerné aux catholiques, et un mauvais point à la République – ou au moins à son gouvernement.
 
Il ne semble pas que le président du CRIF ait été plus loin, comme il l’avait fait l’année dernière en déclarant que « toutes les violences antisémites aujourd’hui sont commises par des jeunes musulmans ». Le propos avait évidemment provoqué une bronca que Roger Cukierman a sans doute préféré éviter. Mais au moment où le président de la République traitait justement de la question des migrants, l’idée l’aura sans doute effleuré…
 

François le Luc