La crise financière saoudienne pourrait ramener le pétrole à 25 dollars le baril

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L’Arabie saoudite doit affronter une baisse de ses liquidités en raison de la fuite de ses capitaux vers l’étranger, avec pour conséquence moins de fonds disponibles et un « stress » grandissant du système bancaire. Les taux interbancaires à trois mois ont soudain décollé pour atteindre des sommets inconnus depuis la crise de 2008. Les informations selon lesquelles le gouvernement saoudien s’apprête à payer ses cocontractants en reconnaissances de dettes échangeables montrent à quel point la situation devient critique.
 
Le groupe Ben Laden, fortement endetté, est en train de licencier 50.000 employés du bâtiment en raison de l’austérité. La Société Générale a conseillé à ses clients d’éviter le riyal saoudien, s’attendant à ce que le pays abandonne sa vieille indexation sur le dollar, ce qui pourrait entraîner une bataille à couteaux tirés pour une redistribution des parts de marché dans le domaine du pétrole au niveau mondial.
 

L’Arabie saoudite pourrait désolidariser le riyal du dollar

 
Selon Francisco Blanch, de Bank of America, une rupture de l’indexation – événement improbable mais possible, selon la théorie du « cygne noir » – pourrait faire chuter le prix du baril à 25 dollars. Les réserves de devises de l’Arabie saoudite baissent actuellement à raison de 10 milliards de dollars par mois, malgré des ventes d’obligations et des prêts groupés pour aider à remédier à l’immense déficit budgétaire.
 
Les réserves de devises du pays (582 milliards de dollars) sont théoriquement largement suffisantes, mais là ne réside pas le problème. Pour la banque centrale saoudienne (SAMA), il est lié au fait que la diminution de ses réserves fait peser une contrainte sur sa politique monétaire. Les dépôts diminuent, tout comme les fonds disponibles à plus long terme. Les ventes d’obligation domestiques n’aident pas parce qu’elles assèchent le marché des capitaux et font baisser les liquidités. Et les prix du baril (à 50 dollars depuis la mi-février) n’ont pas été suffisants pour faire cesser les problèmes financiers du pays.
 

La crise financière saoudienne mettra-t-elle le pétrole à 25 dollars le baril ?

 
La reprise est de plus en plus fragile du fait de la ligne dure de la Réserve fédérale américaine qui a fait monter le dollar, et que le Canada se prépare à revenir à une production de 1,2 millions de barils par jour. « Selon nous, les marchés ont évolué trop vite, trop haut, trop loin. Nous sommes toujours face à des stocks excédentaires et les coupures d’approvisionnement sont réversibles », analyse BNP Paribas.
 
La semaine dernière, le PDG de Total Patrick Pouyanné a déclaré au Sénat que les prix pouvaient descendre aussi vite qu’ils montent : « Le marché ne se rééquilibrera pas avant la fin de l’année. » Selon lui, l’effondrement annuel de l’investissement dans le gaz et le pétrole (400 milliards de dollars contre 700 milliards de dollars en 2014) mènera à une baisse de 5 millions de barils en 2020 et à un nouveau pic des prix. Mais auparavant, avertit-il, la production surabondante devra être écoulée.
 
La situation devient donc périlleuse. Les inventaires américains affichent une hausse de 1,31 millions de barils pour la semaine du 13 mai. « L’excédent de stock semble persister. Le coût du pétrole pourrait bien descendre de nouveau d’ici la fin de l’année », assure Ben Combes de Llewellyn Consulting.
 
A long terme, le prochain pic cyclique du pétrole viendra à la rescousse. La question est de savoir si les Saoudiens peuvent fermer les écoutilles et traverser la tempête financière dans un bateau qui prend l’eau.
 

Patrick Neuville