Angleterre : selon le fils d’un « imam modéré » assassiné, Daech utilise les organisations de bienfaisance pour radicaliser les jeunes

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Le fils d’un imam dit modéré, assassiné à Rochdale dans le grand Manchester (Angleterre), assure que les partisans de Daech mettent en avant leurs organisations de bienfaisance pour mieux radicaliser les jeunes. Dans cette affaire où chaque mot compte se conjuguent plusieurs propagandes.
 
Les faits sont là : en février 2016, un imam de Rochdale, dans le nord-ouest de l’Angleterre, Djalal Uddin, a été matraqué à mort par deux jeunes gens, Mohamed Syeedy (graphie anglaise) et Mohamed Abdoul Kader parce qu’il pratiquait un islam que les musulmans fondamentalistes, en particulier Daech, considèrent comme « de la magie noire », et que les médias jugent « modéré ». Ils l’avaient harcelé pendant dix-huit mois et attiré dans un guet-apens. Les jurés de Manchester ont condamné Syeedy à vingt-quatre ans de prison pour avoir assassiné l’imam et la police recherche toujours Kader, qui a fui vers la Turquie trois jours après le meurtre.
 

L’imam assassiné par Daech ou des islamophobes ?

 
A partir de là commencent les interprétations et la propagande. Immédiatement après le crime, une partie des médias a demandé « des précautions urgentes pour assurer la sécurité » des musulmans de Rochdale, en se fondant sur l’hypothèse d’une agression « islamophobe » fomentée par des Blancs britanniques. En Angleterre aussi le réflexe politiquement correct est dominant. Mais le contre-terrorisme a très vite établi la culpabilité de Syeedy et sa qualité de partisan de Daech. S’il a tué l’imam « modéré », c’est qu’il devait être « puni » pour sa pratique. La cour a condamné « sa haine et son intolérance ».
 
Cependant le superintendant Tony Mole, qui dirige la section du contre-terrorisme du nord-ouest de l’Angleterre, tout en reconnaissant les « sympathies pour Daech » de Syeedy ne le classe pas parmi les « terroristes », mais plutôt parmi les « meurtriers ». La raison de cette distinction intéressante est la suivante : « Il était motivé par la religion ».
 

Comment Daech utilise les organisations de bienfaisance pour radicaliser les jeunes

 
Tony Mole et les jurés de Manchester, développent chacun dans son genre la théorie du « pas d’amalgame », refusant d’accepter l’intrication du politique et du religieux dans l’islam, ce qui permet de construire le mythe de l’islam modéré. C’est ce que fait aussi le fils de l’imam Uddin assassiné, tout en développant une propagande tout à fait différente. Présentant d’abord, avec un respect filial louable, le mort comme « le meilleur des pères au monde », son fils Saleh el Arif accuse explicitement les partisans de Daech, en Angleterre et à Rochdale, d’exploiter la religion pour mieux radicaliser les jeunes, en particulier dans la communauté bangladaise. « De l’extérieur, c’est comme s’ils faisaient le bien, du bénévolat, des œuvres de bienfaisance. Mais ils veulent juste donner une bonne opinion d’eux et en fait ils travaillent à radicaliser les jeunes, et les gens de la communauté ne veulent pas en entendre parler. Ils ont peur, ils croient que Daech est derrière et ils veulent que la police les en débarrasse ».
 

Le mythe de l’islam modéré à l’usage des fils d’Angleterre

 
Un discours très sécuritaire et très anti-Daech destiné à bien passer dans la population d’Angleterre, dont le fils de l’imam assassiné encourage l’inquiétude  soupçonneuse : « Il y a des gens qui n’ont pas participé au meurtre de mon père mais qui étaient au courant qu’il devait avoir lieu. On devrait avoir l’œil sur eux, enquêter de manière appropriée. » Avec cela cependant, Saleh el Arif impose l’image d’un imam modéré terrorisé par les extrémistes, avide d’en être débarrassé. Et celle d’un père martyr de la vraie foi et de la vraie charité de l’islam : « Il était très religieux (…) Il n’avait pas de vue politiques mais il avait de très fortes convictions religieuses, et ce qu’il croyait, il essayait de le pratiquer jusqu’à la mort ». C’est exactement ce que les humanistes d’Angleterre et d’ailleurs veulent entendre, en feignant d’oublier que l’islam ne sépare pas le religieux du politique.
 

Pauline Mille