Le débat : 1 Fillon, 2 Mélenchon, 3 Le Pen. Hamon et Macron zéro

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On ne s’est pas couché très tôt hier sur TF1 mais on s’est pas mal ennuyé. Hamon et Macron ont approché le zéro absolu, Fillon et Mélenchon ont été bons, Le Pen moyenne. Deux programmes sont moins mauvais, ceux de Fillon et Le Pen. En somme, peu d’infos pour un si long débat.
 
C’est maintenant prouvé, les débats, à cinq, à sept, à onze, ne marchent pas. On s’y ennuie, on zappe, on s’en va : les émissions de commentaires ont commencé avant la fin du débat pour rattraper les quelques spectateurs qui n’étaient pas couchés. Qu’il est loin le débat entre Giscard et Mitterrand, qui décida de l’élection présidentielle de 1974 !
 

Hamon, mime Marceau qui zozote, zéro débat

 
Sans doute manque-t-on de grands acteurs. Il y a des moments où l’on a regretté Georges Marchais ou Le Pen, le père : d’un bon mot, d’une phrase, ils vous auraient emballé tout ça, ce débat qui, malgré quelques empoignades de détail, a ressemblé à une morne juxtaposition de programmes – or on le sait, ce qui compte le moins dans un débat présidentiel et qui n’est jamais respecté après, c’est le programme.
 
Ce qui anime un débat, ce sont les hommes et les rôles qu’ils y tiennent. Hamon fut une allégorie de l’utopie. Sa pensée tournait en rond comme un courant électrique dans un bain d’hélium réfrigéré au zéro absolu. L’utopie est déjà plus barbante que le dessin géométrique, il en a su en faire une quintessence d’ennui. C’est une sorte de mime Marceau avec des oreilles d’elfe, mais un mime qui parle, et qui zozote, même, qui pontifie ad libitum, comme ces petites voitures à entraînement qui continuent sur leur erre tant qu’aucun obstacle ne les arrête. Le secret d’ennuyer est celui de tout dire, avec le sérieux du militant.
 

Macron zéro, Mélenchon dix-huit

 
Le secret d’ennuyer est aussi celui de ne rien dire, ou de tout dire et son contraire, et dans cet emploi Macron a fait merveille. Sa rhétorique est apparue claire comme le jour dans toute sa vacuité. Sans poids, sans épaisseur, pur sophiste sans référence au réel, on aurait dit un élève de première dans un exposé sur le thème in medio stat virtus. C’était son premier match, mais c’était son match de trop : l’absence de valeur n’attend pas le nombre des années pour se révéler. Si cette marionnette devait être élue, ce serait la preuve irréfutable que le système peut imposer n’importe qui.
 
A l’opposé Mélenchon figurait l’homme qui a réfléchi, dont les paroles expriment une conviction profonde et personnelle. Il a fait rire, sourire, et derrière ses vieux schémas marxistoïdes et son imagerie misérabiliste, il a même touché deux ou trois vérités.
 

Le Pen se fait voler par Fillon le rôle d’homme de la réalité

 
Et Marine Le Pen ? Eh bien le Front national avait traditionnellement un rôle en or, celui de coryphée du chœur des spectateurs, il lui suffisait de dire tout haut la vérité que tout le monde voit et que le système s’est ligué pour taire. Le briseur de déni de réalité. Elle l’a tenu, notamment sur le communautarisme. Mais seulement un peu, pas assez, et assez mal. Par exemple, sur la sécurité, mal conseillée par son énarque de gauche qui opinait derrière elle, elle a réclamé un gonflement massif des effectifs de police et de gendarmerie. Or on sait, et le FN le disait naguère, que la difficulté actuelle ne tient pas d’abord aux effectifs mais à l’état d’esprit, au commandement, et au cadre politique dans lequel il s’exerce. En plus, dans l’état de délabrement où se trouvent les finances de l’Etat, gonfler les effectifs est difficile. François Fillon l’a fait remarquer d’une voix un peu lasse, vaguement éraillée par la campagne. Il a été remarquable : ici, et en quinze autres occasion, c’est lui qui est apparu comme l’homme de la réalité.
 

Comment faire la politique du moins pire après ce débat ?

 
Deux mots quand même des programmes : celui de Hamon est le pire, mais ceux de Macron et Mélenchon valent à peine mieux ; celui de Fillon, un peu meilleur dans l’ordre économique, ne se compose ailleurs que de bonnes paroles. Quant à celui de Marine Le Pen, il est très insuffisant (elle n’a pas parlé d’inverser les flux migratoires, elle n’a rien dit contre l’euthanasie ni pour la famille) et même un peu bête par certains aspects (les retraites notamment). En tant qu’électrice, je n’aurai donc après ce débat que le choix de la politique du moins pire. Si Hamon est au deuxième tour, je vote tout sauf lui. Si Macron est au deuxième tour, je vote tout sauf lui, même Mélenchon. Si Mélenchon est au deuxième tour contre Fillon ou Le Pen, je vote pour elle ou lui. Et si Fillon et Le Pen s’opposent au deuxième tour ? Je prie pour demander au ciel de m’inspirer.
 

Pauline Mille