Forte augmentation des dépenses militaires de la Russie et de la Chine en 2015, selon l’IISS

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La Russie développe de nouveaux missiles de croisière, des avions de combat et des blindés, tels que le char T14-Armata, au blindage doté d’un système de protection active (APS) capable d’intercepter missiles et grenades.

 
Selon le rapport annuel de l’Institut international pour les études stratégiques (IISS), publié mardi, la Russie et la Chine ont affiché la plus forte augmentation des dépenses militaires dans le monde en 2015. La Russie a représenté à elle seule, en 2015, 20 % de l’augmentation globale des dépenses militaires, selon la publication The Military Balance 2016, avec un budget qui a progressé de 23 % (en roubles) par rapport à 2014 : c’est la mise en œuvre de la volonté de Vladimir Poutine de moderniser l’armée russe – malgré la déprime économique qui résulte de la chute des cours du pétrole. Cela représente plus de 5 % du PIB et comprend pour la première fois des crédits garantis par l’Etat dans un contexte de sanctions financières occidentales.
 

En Chine et en Russie, augmentation des dépenses militaires de 20 et 25 %

 
La Chine et la Russie n’ont pas changé de rang dans le classement des pays les plus dépensiers établi par l’IISS : toujours à la deuxième et à la quatrième place respectivement, elles sont loin toutefois d’atteindre, même ensemble, le niveau de dépenses militaires américaines évalué à 597,5 milliards de dollars en 2015. La Russie affiche, elle, 65,5 milliards, et la Chine – avec un budget lui aussi en forte augmentation, près de 20 % – 145,8 milliards. Entre les deux, à la troisième place, l’Arabie Saoudite a consacré 81,9 milliards à son budget défense.
 
A la cinquième place, le Royaume-Uni a dépensé 56,2 milliards en 2015, assez loin devant l’Inde (48 milliards) qui supplante pour la première fois la France à la 6e place : celle-ci se retrouve 7e avec un budget militaire de 46,8 milliards de dollars.
 
Si les quinze pays qui suivent les Etats-Unis sur le tableau dépassent ensemble de quelque 50 milliards le budget du géant américain, le poids de ce dernier sur le plan global reste très largement dominant puisqu’il représente à lui seul plus du tiers des dépenses militaires des 170 pays pris en compte par The Military Balance.
 

L’Institut international pour les études stratégiques évalue les dépenses militaires du monde en 2015

 
De son côté la part de l’Europe dans les dépenses militaires globales continue de décliner, malgré une stabilisation, voire une petite augmentation des dépenses dans certains pays, et ce pour la première fois depuis la crise financière de 2008, une situation que l’IISS impute à l’affaire ukrainienne et aux attaques terroristes à Paris.
 
Très significative, la hausse des dépenses militaires en Asie s’accentue laissant les pays européens de l’OTAN de plus en plus loin derrière. Leurs dépenses militaires avaient été dépassées par celles de l’Asie en 2012 : en 2015, l’écart s’est creusé pour atteindre près de 100 milliards de dollars, certes aggravé par la dépréciation de l’euro par rapport au dollars, mais signe fort néanmoins des capacités militaires croissantes des nations émergentes. Celles-ci sont menacées par la chute des cours des matières premières, l’IISS s’attend à un ralentissement.
 

L’IISS met en garde contre la progression militaire des pays d’Asie

 
Le cas de la Russie mérite un éclairage supplémentaire. La forte hausse de ses dépenses a été pour une grande part consacrée à la construction d’un nouveau char « révolutionnaire », l’Armata T-14. « Il est équipé d’une tourelle non habitée, capable d’accueillir un canon de 125 mm – peut-être même davantage à l’avenir – et conçu avec un système de protection intégrale active qui abat les missiles antichar à l’approche », explique le général de brigade Ben Barry, spécialiste de la guerre terrestre à l’IISS.
 
L’Armata 14-T devrait être opérationnel en 2017 ; l’objectif de 2.300 unités déployées d’ici à 2020 « ne sera probablement pas atteint », selon l’IISS. Reste que son canon est plus puissant que celui de son équivalent britannique, le Challenger 2. « A supposer que l’Armata soit un succès sur le plan de la conception et qu’il entre en service, les forces terrestres occidentales ont des raisons d’être très inquiètes », a indiqué Ben Barry. L’actuel armement antichar occidental ne ferait pas le poids, au détriment de l’efficacité de son infanterie : « Il ne me semble pas évident que les armées occidentales aient saisi effectivement l’importance de cette menace », a-t-il déclaré.
 

Anne Dolhein