HISTOIRE Des lendemains qui chantent
Cinéma ♥

des lendemains qui chantent
 
Encore trop de nudités complaisamment étalées pour recommander ce film qui par ailleurs ne manque pas de qualités. Des lendemains qui chantent entendent présenter, à travers des personnages-prétextes, souvent à clefs, une réflexion de la gauche française sur ce qu’il faut bien appeler son échec, chose avouée dès l’ironie du titre. Le champ recouvert est celui de l’Histoire, entre son euphorie de mai 1981 et son désespoir du 21 avril 2002. Le discours ouvriériste de 1981 paraît d’un autre temps. L’échec complet sur le plan économique et social de la relance Maurois est bien rendu, avec une désindustrialisation massive, qui se continue hélas encore aujourd’hui. Au fond, les discours des socialistes se renouvellent peu, la « gauche moderne » date au moins de 1984 et le premier ministre Fabius, repris mot pour mot par Valls. Deux frères, militants socialistes en 1981 choisissent des voies différentes, l’un finissant par quitter l’administration pour faire fortune dans la communication, l’autre cherchant la fidélité à ses engagements initiaux, et n’aboutissant à rien. La seule « réussite » des années 1980 sera le Minitel Rose, si l’on ose dire. La pensée de gauche est incarnée par le profond « philosophe » BHL, la grande « conscience » de gauche par l’homme d’affaire à fibre sociale, prétendait-il, Bernard Tapie. Sont intégrées à la narration des extraits authentiques de déclarations de ces personnages, chefs d’œuvre d’humour involontaire, absolument hilarants pour qui connaît la suite. La satire des rédactions de Libération et du Nouvel Observateur amuse aussi. Les acteurs, des petites vedettes du monde du spectacle pour la plupart, jouent leur propre rôle de bourgeois de gauche. Au moins, ils ne sont pas faux, même s’ils n’éveillent pas de sympathie. Certains tabous de la gauche demeurent, dont le fait que les immigrés seraient tous nécessairement formidables. Les soirées amorales avec des dames légères, certes historiques, peuvent gêner la pudeur du spectateur catholique. Des lendemains qui chantent demeurent pour le public averti une très intéressante mise en perspective historique, avec le constat lucide de son échec par la gauche elle-même.
 
Hector Jovien