DRAME RELIGIEUX Marie-Madeleine •


 
Marie-Madeleine est un drame religieux qui entend rendre hommage à la sainte qui a effectivement accompagné le Christ et les Apôtres, avant comme après la Mort et la Résurrection du Seigneur. La figure de Marie-Madeleine a hélas souvent été détournée, et ce depuis l’Antiquité, par des courants ou sectes gnostiques. Ces thèmes, blasphématoires, sont très populaires aujourd’hui, comme dans le Da Vinci Code. Aussi éprouvions-nous les pires craintes au sujet d’un film consacré à Marie-Madeleine. Il n’y a heureusement rien de gnostique dans le film. Nous l’avons vu intégralement et attentivement. Nous ne le recommanderons pas pour autant.
 
Marie-Madeleine (Rooney Mara) est une femme judéenne très pieuse de son temps, à la recherche de Dieu. Cette recherche l’a conduit à fuir un mariage arrangé –licence scénaristique pas absurde en soi – pour suivre à temps complet le Christ. Elle éprouve pour lui un très bel amour spirituel. Elle comprend, est-il avancé, avant tous les apôtres égarés dans leur espoir de voir dans Jésus-Christ un messie temporel, que le Royaume qu’Il annonce n’est pas de ce monde. Par moment, cette Marie-Madeleine, correctement interprétée, émeut. Le Christ (Joaquin Phoenix) qu’elle accompagne, est, avant Sa Résurrection, présenté comme un Christ souffrant intérieurement à la perspective de la Croix et devant le spectacle d’une assez large incompréhension de Son message, y compris par les disciples, sauf Marie-Madeleine donc. Judas est montré comme l’apôtre le plus sympathique des Douze, avant sa trahison. Des gens excellents peuvent très mal tourner et le Christ n’avait pas choisi un scélérat manifeste pour compléter les Douze. Mais pourquoi s’autoriser une pareille interpolation ? Interprétation audacieuse, il aurait trahi le Christ afin de le forcer à se défendre, à réaliser une série de miracles temporels violents et à prendre le pouvoir à Jérusalem. On déplorera également un saint Pierre pas très intelligent, assez antipathique et, curiosité superficielle, manifestement subsaharien, ce qui fait quand même bizarre dans un contexte évocateur de la Palestine du premier siècle à défaut d’être jamais une reconstitution archéologique soignée.
 

Marie-Madeleine, une dimension polémique, anticatholique, qui a gâché notre plaisir

 
S’il est un film chrétien, ce Marie-Madeleine propose une interprétation strictement protestante des Evangiles. Il ne peut pas s’empêcher de multiplier les piques anticatholiques : saint Pierre aurait été une des pierres de l’Eglise parmi tant d’autres, est-il affirmé explicitement. Quelques phrases coupées en conclusion prétendent défendre Marie-Madeleine contre l’interprétation catholique traditionnelle, opposant saint Grégoire le Grand et le pape François – qui plaît aux Protestants. De façon générale, le Christ et Marie-Madeleine se conduisent largement dans le film en pasteurs baptistes avant la lettre. Ce n’est pas indigne mais simplement déplacé et il y aurait énormément à dire sur ces sujets. Cette dimension polémique, anticatholique, dont le film aurait pu fort bien se passer, a gâché notre plaisir.
 

Hector JOVIEN