Economies sur de nouveaux médicaments au Royaume-Uni : la NHS bloque les avancées scientifiques pour les maladies graves

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Vingt pour cent des nouveaux médicaments seront rationnés au Royaume-Uni, si l’on en croit la nouvelle politique d’économies budgétaires adoptée par le NHS, le service national de santé, monopole d’Etat de l’assurance maladie qui garantit la gratuité des soins. Les patients atteints de cancers, de diabète, d’asthme vont devoir patienter pour accéder à de nouveaux traitements plus efficaces, et cela bien que les médecins aient prévenus les dirigeants du système de santé que ces nouvelles molécules pourraient présenter un meilleur rapport coût-efficacité que leurs prédécesseurs. Face à ce projet d’oukase administratif, les laboratoires ont fait savoir qu’ils cesseraient de mettre de nouveaux produits sur le marché britannique, plaçant le Royaume-Uni loin derrière le reste de l’Europe en matière de traitements d’avant-garde, et augmentant le nombre de décès par maladies graves.
 

Cancers, diabètes… : pour le NHS, économies de médicaments d’abord

 
Jusqu’à présent, les nouveaux médicaments étaient mis sur le marché par le NHS dès que le NICE (National Institute for Health and Care Excellence) homologuait la molécule sur des bases scientifiques. Avec sa nouvelle politique instaurée depuis avril, le monopole d’Etat NHS « pourra repousser la délivrance des médicaments récemment homologués par le NICE si le coût total du service rendu dépasse l’équivalent de 23 millions d’euros par an ». Une évaluation effectuée par le NICE et l’industrie pharmaceutique démontre que 20 % des nouvelles molécules homologuées, soit une douzaine par an, seront concernées.
 
La plupart des molécules menacées par cette nouvelle réglementation concernent des affections létales telles que les cancers, en particuliers ceux de la prostate et de la peau, les maladies cardiovasculaires, les diabètes… Un rationnement revient à signer l’arrêt de mort des patients qui en ont un besoin urgent. Car les médicaments qui traitent ce genre de maladies sont généralement plus coûteux et verront donc plus probablement leur mise sur le marché retardée par le NHS.
 

Au Royaume-Uni, on bloque le traitement des maladies graves

 
Philippe Anderson, de l’association Prostate Cancer UK, a déclaré dans le Times que cette nouvelle politique pourrait se révéler « catastrophique », « bloquant l’arrivée des nouveaux traitements et technologies juste avant qu’ils soient administrables aux patients ». Dans un passé récent par exemple, écrit le chroniqueur Chris Smyth dans le Times, un médicament contre le cholestérol administré à 160.000 personnes à risques, et un traitement extrêmement prometteur contre le cancer de la prostate auraient été bloqués par la nouvelles réglementation. Ce nouveau modèle économique n’eût pas permis, estiment les laboratoires, de prescrire aussi de nouvelles molécules permettant de soigner la dystrophie musculaire de Duchenne.
 
L’industrie pharmaceutique a fait savoir qu’elle ne lancerait plus de nouvelles spécialités sur le marché britannique si ce sont in fine les « bureaucrates » du NHS qui les bloquent pour des raisons uniquement financières. Le NHS d’Angleterre, lui, argumente en jugeant que les 20 % des nouveaux médicaments frappés par cette mesure coûtent environ l’équivalent de 464 millions d’euros par an, à rapporter aux 145 millions que coûtent les nouvelles molécules qui échappent à cette restriction. Il estime que cette restriction évitera de sacrifier d’autres services médicaux. La nouvelle politique semble avoir été partiellement motivée par la peur que des molécules innovantes n’émergent dans le traitement des démences type Alzheimer, ce qui entraînerait une charge supplémentaire de milliards de livres pour le NHS.
 

Matthieu Lenoir