Etats-Unis : de plus en plus de citoyens armés et badgés, les milices « SCOP », font le travail de la police

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Michael Youlen, insigne sur la poitrine et pistolet à la ceinture, distribue les avertissements. Il s’est récemment rendu dans un appartement de son quartier pour rappeler à un conducteur la suspension de son permis. La routine pour un policier  mais Michael Youlen n’est pas policier. Il est simple citoyen. Il a créé la « Manassas Junction Police Department » dont il est le chef et le seul membre.
 
Il agit en toute légalité et il n’est pas le seul à le faire.
 
De plus en plus de citoyens de Virginie se transforment en policiers de proximité grâce à un alinéa de la loi qui permet aux citoyens de porter une arme, un badge et de procéder à des arrestations.
 

750 « SCOP » armés et badgés dans l’Etat de Virginie pour faire le travail de la police

 
Ils sont appelés les « special conservators of the peace » (SCOP) et sont désormais 750 dans l’Etat de Virginie.
 
La croissance de ces SCOP s’observe dans tout le pays, à mesure que la demande s’accroît et que les forces de police diminuent ou sont vouées à d’autres tâches que celle du maintien de l’ordre. Vendredi dernier, l’Etat de Virginie adoptait une loi obligeant ces policiers privés à suivre une formation de 130 heures (contre 40 auparavant). Une formation plus courte que ce qui est exigé d’une esthéticienne ou d’un agent de sécurité.
 

Formalités simplifiées pour les milices

 
Pour devenir SCOP en Virginie, la procédure est donc simple : il faut s’enregistrer auprès du Department of Criminal Justice Services, fournir un casier judiciaire vierge et passer un test pour vérifier l’absence de toute addiction à l’alcool ou à la drogue. Il suffit ensuite de suivre la formation de 130 heures, bien loin des 580 à 1.200 heures requises pour entrer dans la police municipale…
 
Il existe des possibilités similaires dans beaucoup d’autres Etats américains.
 
L’origine de ces forces armées indépendantes se trouve dans le droit commun anglais et avait été adopté par l’Etat de Virginie en 1860 pour autoriser certains propriétaires à défendre leurs établissements. L’appellation demeure mais aucune autorité ne contrôle le travail de ces hommes qui s’autoproclament policiers.
 

Ces citoyens font le travail de la police, sans contrôle et avec une faible formation

 
Leur travail se concentre majoritairement sur les campus étudiants, les relations de voisinage ou le respect de la loi dans des endroits désertés par la police.
 
Michael Youlen est un ancien policier et voit son travail comme un complément et non comme un remplacement : il sert à régler les petits problèmes que les villes n’ont plus les moyens (ou qu’elles ne se donnent plus les moyens) de régler.
 
Infractions au code de la route, tapage, petits trafics de drogue : même mineurs, ces problèmes sont normalement ceux dont la police devrait se charger… En cas de viol ou d’homicide, Michael Youlen remet l’affaire entre les mains de la police mais il pourra témoigner et fournir des preuves lors du procès, exactement comme un policier municipal est habilité à le faire.
 
En 2014, Michael Youlen a enregistré 77 arrestations, distribué 162 amendes de stationnement, et répondu à 221 appels de citoyens… Un besoin donc mais une réponse impossible à contrôler et des abus inévitables à prévoir.
 
Ces abus existent en Virginie comme ailleurs.
 
En 2012 par exemple, plus de 20 habitants d’une banlieue de Baltimore ont déposé une plainte contre une compagnie de sécurité, affirmant que ces citoyens avaient abusé les résidents du quartier et violé leurs droits en procédant à des arrestations abusives… Deux des trois accusés faisaient partie d’un groupe de « special police » similaire aux SCOP de Virginie.
 
Mais l’existence et la croissance de ces forces armées privées est prévisible lorsque l’Etat abandonne ses fonctions régaliennes pour se préoccuper de contrôler le quotidien des gens…