270 millions de comptes faux, dupliqués ou illégitimes sur Facebook, soit 13 % de ses 2,1 milliards d’abonnés

Facebook comptes faux désaffiliation
 
Internet, cour des miracles. Facebook vient de reconnaître que 270 millions de comptes enregistrés sur ce réseau social sont « illégitimes », soulevant une nouvelle fois la question de sa sincérité alors qu’on sait déjà que la désaffiliation d’un abonné est quasi-impossible et que le géant de la relation virtuelle s’immisce dans l’intimité de ses abonnés en introduisant des algorithmes qui lui permettent de filtrer ou de forcer la réception de notifications.
 
Noyée dans la publication des résultats de la firme de Menlo Park mercredi, on découvre une précision selon laquelle un surplus de dizaines de millions de faux comptes a été recensé par rapport à ce qui avait été précédemment estimé. Au cours du troisième trimestre 2017, environ 2 à 3 pourcent des 2,1 milliards d’utilisateurs mensuels actifs se sont révélés être « des comptes mal classés ou indésirables », a reconnu Facebook, bien plus que les 1 % estimés en juillet. Il y a mieux (ou pire) : quelque 10 % de ses comptes sont des doubles d’utilisateurs réels, presque deux fois plus que les 6 % estimés lors de la publication de ses résultats du trimestre précédent.
 

La chasse aux 13 % de faux comptes pourrait affecter les résultats, admet Zuckerberg

 
En additionnant faux comptes et comptes doubles, on atteint donc un taux de 13 % de comptes « illégitimes », soit 270 millions de ses 2,1 milliards d’utilisateurs revendiqués. Le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, a reconnu mercredi que la chasse aux faux comptes pourrait affecter les futurs résultats de sa compagnie.
 
Facebook a reconnu ces chiffres dans un paragraphe écrit en petits caractères lors de sa présentation trimestrielle au cours de laquelle la société a révélé (en gros caractères) une hausse trimestrielle de 79 % de ses bénéfices, à 4,7 milliards de dollars US (4 milliards d’euros). Les caciques du réseau social affirment que la hausse du taux de comptes doubles ou faux résulte d’une amélioration de l’efficacité des filtres destinés à identifier les fraudes, bien plus que d’un hausse brutale des fraudes, même s’ils admettent qu’il puisse y avoir des « pointes épisodiques », particulièrement dans des pays comme l’Indonésie ou le Vietnam. Pour faire passer encore mieux la pilule, Facebook, qui exige le vrai nom de ses abonnés – avec preuve de leur identité dans certains cas – s’est estimé moins pollué que d’autres réseaux sociaux tels Twitter.
 
Parmi les comptes frauduleux, on cite ceux de sociétés ou organisations constitués par erreur sous forme de profil et non de pages, mais aussi ceux délibérément créés dans le cadre d’entreprises de « pollution commerciale » ou autres activités interdites par Facebook.
 

Facebook aussi sous pression dans le cadre des campagnes à connotation politique

 
Cette révélation pourrait mener à une intensification des contrôles du réseau social, au moment même où il est mis sous pression pour révéler la façon dont les fausses informations et les publicités à connotation politique ont pu affecter l’élection présidentielle de l’année dernière aux Etats-Unis ou d’autres processus démocratiques de par le monde.
 
Mercredi, un sénateur américain a affirmé que les agents russes avaient « établi une base » en Ecosse pour favoriser un second référendum d’indépendance. Facebook a reconnu que 126 millions de ses usagers aux Etats-Unis avaient reçu des publicités financées par la Russie, et 20 autres millions via Instagram, sa filiale depuis 2012.
 

Facebook disait toucher plus de 18-24 ans aux Etats-Unis qu’il n’en existe et empêche la désaffiliation

 
Les questions sur la sincérité des comptes de Facebook sont anciennes. Le géant avait déjà dû rectifier plusieurs statistiques-clés telles que le temps moyen que les gens passaient à regarder des vidéos ou le nombre de clics sur les messages publicitaires. Le nombre de ses utilisateurs avait déjà été contesté quand Facebook avait affirmé qu’il touchait aux Etats-Unis plus de 18-24 ans… que ce qu’en dénombre le recensement. L’extrême difficulté à supprimer un compte après l’avoir ouvert fait partie aussi de la stratégie visant à inciter les gens à fréquenter le réseau social en les empêchant de se désaffilier.
 
Troublant, enfin, l’intrusion de Facebook dans les échanges entre utilisateurs. Des algorithmes hiérarchisent ainsi les messages reçus par un abonné « en fonction de l’intérêt que nous estimons qu’ils revêtent pour vous », explique le système dans un communiqué récent sous la rubrique « aide à la réception ». Et c’est ainsi, s’indigne une abonnée, « que vous n’arrivez pas à recevoir certains posts de groupes et de pages auxquels vous avez souscrit ».
 

Matthieu Lenoir