DRAME HISTORIQUE La Maison au toit rouge ♥


 
La Maison au toit rouge possède de grandes qualités formelles, reconstituant finement les décors du Japon des années 1930. Le film sait faire preuve de délicatesse dans le traitement des caractères et des situations : des amants se retirent ensemble dans la même pièce sans qu’il soit besoin de monter davantage. Les sentiments sont exprimés le plus souvent avec délicatesse. La société des années 1930, tiraillée entre son ancrage dans la tradition japonaise millénaire et une occidentalisation superficielle, est donc bien rendue, des habitudes culturelles profondes aux vêtements et aux coutumes culinaires. Toute la population nippone de cette période, des directeurs d’usine aux servantes, est animée d’un nationalisme peu construit intellectuellement mais qui touche toutes les couches sociales. On se réjouit alors des victoires militaires en Chine, y compris à Nankin (1937), avec une bonne conscience rétrospectivement étonnante. La population, abreuvée de propagande patriotique par les journaux, tend à croire les versions officielles.
 

Le message de La Maison au toit rouge dérange

 
Tout ceci s’avère très intéressant. Mais le message du film dérange. Dénoncer les excès d’un nationalisme agressif frôle un antimilitarisme et un antipatriotisme tout aussi excessifs, mis en lumière dans le dialogue intergénérationnel entre la vieille tante sur ses dernières années et son petit-neveu. Plus grave, l’adultère d’une mère de famille avec un des rares artistes de Tokyo des années 1930 paraît tacitement approuvé, dans le cadre d’une dénonciation convenue des mariages traditionnels arrangés. Or aujourd’hui les couples japonais divorcent massivement ou ne se marient plus et la démographie nationale subit un effondrement dramatique ; ce n’est certainement pas mieux, ni socialement ni spirituellement.
 
Il est dommage qu’aux indiscutables qualités formelles de ce film et à la délicatesse d’expression des personnages – à une scène près – ne corresponde pas un message de la même tenue mais une forme de révolte du « moi » et de ses caprices très convenue et des plus discutables.