L’Église belge contre l’euthanasie des personnes démentes

L’Église belge contre l'euthanasie des personnes démentes
 
L’Église belge s’était mobilisée, l’année dernière, contre la monstrueuse euthanasie des mineurs, votée en février, dans un texte commun à l’ensemble des cultes reconnus. Aujourd’hui, l’archevêque Léonard et la Conférence épiscopale prennent individuellement la parole en investissant les colonnes de « La Libre Belgique » et du « Standard », pour dénoncer le nouveau risque à venir : celui d’une extension de la loi aux personnes démentes. Et en exprimant d’abord leur reconnaissance à toutes les personnes engagées « dans l’accompagnement de ces personnes fragiles ».
 

L’Église belge rappelle la loi naturelle

 
Oui, du fait du vieillissement inexorable de la population, la société va vers un accroissement du nombre de ces personnes séniles. Oui, ce n’est pas « économiquement rentable », dit le texte. Mais rien ne peut nous donner une raison de les supprimer. « Cette conviction répond à un choix purement éthique ». Et seulement éthique. Là est bien le problème et ce pourquoi les évêques peuvent à bon droit craindre la suite.
 
Où réside la dignité humaine ? Les évêques belges rappellent qu’elle ne peut dépendre « de ce qu’on possède ou non certaines capacités. Elle est liée de manière inaliénable au simple fait d’appartenir à l’espèce humaine. Toute personne, même en état de démence, mérite donc le respect et doit recevoir en conséquence les soins appropriés. »
 
Ils dénoncent cette pseudo-autonomie qu’on nous vend comme la réelle dignité moderne de l’homme, « moi, et moi seul, décide de ce que je fais de ma vie ». « Les individus ne sont pas des îles. Chaque être humain vit dans un environnement social, culturel, historique et relationnel. De la naissance à la mort, nous dépendons les uns des autres. La tradition chrétienne exprime cela en considérant les êtres humains comme des frères et sœurs, reliés au même Père (…). Je suis le gardien de mon frère, que je le veuille ou non. » Nous avons le devoir de nous occuper de nos plus fragiles. « Le niveau moral d’une société se mesure au traitement qu’elle réserve aux plus faibles de ses membres. » Ce fut vrai de toutes les civilisations.
 

La non-dignité des personnes démentes ?

 
Aucune proposition de loi n’a pour le moment été déposée. Mais tout la laisse prévoir. Sous la législature précédente, un sénateur avait déposé une proposition visant à élargir l’euthanasie aux « personnes atteintes d’une maladie neurodégénérative ou de toute autre affection cérébrale à un stade avancé et irréversible ». La Société belge de soins intensifs a aussi publié un document réclamant l’autorisation de l’euthanasie « non demandée » pour « améliorer la qualité de la fin de vie » du malade quand il n’est plus suffisamment conscient…
 
Le nouveau critère, le nouveau cran de la culture de mort, serait donc, non plus la « souffrance intolérable », mais la perte de la capacité cognitive. « Le danger n’est pas illusoire que l’on veuille réserver le concept de personne humaine – et les droits qui y sont afférents – à ceux qui sont capables de reconnaître pour et par eux-mêmes la valeur de leur propre vie. Ceux qui ne le peuvent pas, ou ne le peuvent plus, risquent d’être éliminés ou de se voir privés des soins nécessaires. »
 
Si le pas est logique, il est immense. La loi maçonnique autorisera à tuer sur la volonté des proches ou celle, unique, suffisante, du corps médical, ceux dont on juge que la vie n’est plus « assez » humaine.
 

L’euthanasie de demain

 
Ce nouveau cran indiquera aussi un glissement de la notion même d’euthanasie. Pour sa légalisation, on a persuadé le quidam que c’était pour sauver sa dignité et accéder à ses volontés du moment. Demain, sa volonté devra être posée d’office – pour le cas où il ne pourra plus décider –, dans un geste évident et naturel de générosité civique : il sera considéré comme un devoir d’avoir sur son cœur, serrée dans son portefeuille, sa déclaration personnelle de volonté d’euthanasie – les évêques évoquent le risque d’un « devoir de mourir ». C’est la société qui disposera de sa fin de vie et non plus lui-même.
 
Pour le moment, la dérive est là, qui s’agrandit. « Les limites de la loi sont systématiquement contournées, voire transgressées. L’éventail des groupes de patients entrant en ligne de compte pour l’euthanasie ne cesse de s’élargir. » « Souffrance existentielle » pour cette femme euthanasiée après avoir subi, sans succès, une opération de changement de sexe.
 
« Désespoir profond » pour cette mère de famille euthanasiée parce qu’elle venait de perdre ses deux filles dans un accident de voiture. (Curieusement, pour le délinquant sexuel interné depuis 30 ans pour viols et assassinat, et qui réclamait de la justice le droit de mourir par assistance médicale – maladie incurable, souffrance psychique – le spectre de la peine de mort a merveilleusement joué son rôle de repoussoir…) Les chiffres ont une croissance exponentielle : on arrive presque à 2.000 euthanasies (officielles) pour l’année 2014.