DRAME Masaan ♥♥


 
Masaan est un film indien, traitant des amours contrariées de jeunes gens de Bénarès, la cité sacrée des Hindous, sur les rives du Gange, célèbre pour ses bûchers funéraires. Ces derniers sont d’ailleurs bien montrés, jusqu’à des détails techniques crus : bien fracasser les crânes en cours de combustion par exemple. La mise en scène a été légèrement adaptée aux standards internationaux, et le format s’avère, de ce fait, relativement court et dépourvu de passages chantés et dansés, ce qui enlève certes un peu du charme de l’exotisme indien. Ce parti-pris de sobriété colle aux histoires tristes des individus de la classe moyenne qui nous sont montrés, comme un reflet des réalités indiennes. Les amours des jeunes ne sont pas évidentes : les fiancés doivent être agréés par les familles, y compris entre hindouistes, avec de difficiles conditions d’emploi – souci du reste raisonnable – et d’appartenance à la même caste. Tout cela ne justifie pas la fornication pour autant. Un couple pécheur est surpris par la police indienne. Défendrait-elle énergiquement les bonnes mœurs ? Non, elle fait chanter les familles, vend très cher le classement sans suite de l’affaire, et ce de manière particulièrement odieuse.
 

Masaan

 
Masaan entend donc montrer sans fard, mais sans misérabilisme excessif, l’Inde d’aujourd’hui. Le film rend compte de relations complexes, comme les liens d’exploitation par le travail et de quasi-adoption tout à la fois, entre un orphelin des rues et son patron petit boutiquier. Il insiste aussi sur la dureté de la condition féminine. Si un jeune homme pécheur n’est certes pas félicité par sa famille ou les institutions, c’est bien pire pour la jeune femme, asymétrie injuste qui est bien montrée. De même, les femmes souffrent de harcèlement sur leur lieu de travail. Malgré tout, Masaan comporte une dimension optimiste, sans rien taire des difficultés rencontrées. Les gens honnêtes, travailleurs, studieux, sobres, peuvent s’en sortir financièrement, et espérer rencontrer un conjoint convenable, morale que l’on se permettra d’approuver, malgré sa fausse naïveté apparente.
 

Hector Jovien