Chine : les Philippines la comparent à l’Allemagne nazie, les Etats-Unis l’accusent de violer les droits de l’homme

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Il y a toujours de bonnes raisons d’accuser la Chine. Mais Pékin s’attache à renvoyer chaque balle et ne négocie pas – comme elle n’a pas négocié, il y a quelques jours, avec l’artiste qui avait fait un photomontage du président chinois, Xi Jinping, lui faisant arborer une moustache et un nez froncé. Elle fustige le président des Philippines qui la compare, devant un parterre de politiques japonais, à l’Allemagne nazie. Réaffirme aux États-Unis ses droits sur les fameuses îles de la mer de Chine méridionale. Et ne daigne pas même répondre lorsque ces derniers lui rappellent de se conformer aux droits de l’homme, visant la foule de ses prisonniers politiques…
 

La Chine ? « L’Allemagne nazie » pour les Philippines

 
Le président philippin Benigno Aquino était en visite au Japon, dans le but de renforcer leur coopération en matière de sécurité maritime. Dans son discours de mercredi, il n’a pas hésité à comparer la Chine à l’Allemagne nazie, face à sa détermination expansionniste en mer de Chine méridionale : « si tout le monde continue à apaiser la Chine, elle pourrait suivre les traces d’Hitler ».
 
Il a rappelé « comment l’Allemagne avait tâté le terrain, [en 1939] pour voir la réaction des diverses puissances européennes ». « Malheureusement, jusqu’à l’annexion des Sudètes, en Tchécoslovaquie, puis l’annexion de l’ensemble du pays, personne n’a dit stop »… La Chine aurait-elle le même mode opératoire ?! Benigno Aquino a appelé à résister dans le cadre de l’ASEAN (Association des nations de l’Asie du Sud-Est) et le Japon a répondu par la positive, ayant lui aussi des récriminations sur d’autres archipels de la mer de Chine du Nord.
 
Les Philippines ont toujours eu les plus fortes réactions face à la Chine qui s’avance inexorablement depuis 2012 dans ces eaux et sur ces îles situées à plus de mille kilomètres des côtes chinoises les plus proches, mais à quelques centaines seulement de leurs propres côtes. Pékin a peu à peu transformé ces récifs coralliens en ports, en infrastructures diverses, dont une véritable piste d’atterrissage : des postes d’avant-garde dans ce très important carrefour de routes maritimes, mais aussi des sources potentielles d’hydrocarbures dont les sous-sols marins regorgent.
 

« Jouer des coudes » en mer de Chine

 
La réaction chinoise ne s’est pas fait attendre. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères s’est dit « profondément choqué et mécontent de ces remarques sans fondement », accusant les Philippins de coopérer avec des pays « extérieurs » pour semer le trouble dans la région…
 
Des pays extérieurs comme, bien sûr, les États-Unis qui, il y a quelques jours encore, par la voix d’Obama, ont exhorté les puissances régionales à respecter les lois internationales et à cesser de « jouer des coudes » : un message à la seule attention de la Chine.
 
Mais Pékin affirme que c’est elle qui a, la première fois, nommé, exploré et administré ces îles. Elle refuse d’arrêter les travaux effectués en pleine mer, sur ses « propres îles et récifs ». Et hurle au viol de sa souveraineté.
 

Les États-Unis : la voix de droits de l’homme…

 
Le jeu d’intimidation est permanent et les États-Unis sont au premier rang. Jeudi, deux parlementaires américains ont dénoncé des violations « persistantes » des droits de l’Homme en Chine, dans une lettre adressée au président chinois jeudi, jour anniversaire du massacre de la place de Tiananmen… Parce qu’après 26 ans, il y a toujours des militants du printemps 1989 en prison. Parce que chaque année, des dissidents veulent se rassembler pour commémorer cette tentative de « printemps démocratique » et finissent dans les geôles du Parti. C’est « une barrière à une coopération rapprochée » entre Washington et Pékin.
 
Quasiment toute la presse américaine et une bonne partie des officiels sont sur le qui-vive pour dénoncer les faits et gestes chinois : la très grande cyberattaque dont a été victime en avril le gouvernement fédéral américain et que l’on vient d’apprendre hier, a tout de suite fait pointer du doigt la Chine qui s’est aujourd’hui largement offusquée d’une attitude « irresponsable et sans fondement ».
 

« Plus de coopération que de désaccord » selon l’ambassadeur chinois aux États-Unis

 
Néanmoins, l’intimidation joue de concert avec une nécessaire coopération aux enjeux multiples. L’ambassadeur chinois aux États-Unis l’a redit il y a quelques jours, « les intérêts communs entre la Chine et les États-Unis l’emportent sur leurs différences », et « cette situation ne changera jamais » – affirmation osée dans un contexte apparemment aussi épineux…
 
Il a parlé d’« exagération » des médias, à propos des désaccords. « Nous sommes liés à bien des égards et nous travaillons ensemble sur de nombreux fronts », de la sécurité au commerce, sans parler des nombreux problèmes régionaux et mondiaux. En septembre, le président chinois Xi Jinping s’acquittera de sa première visite d’État aux États-Unis pour continuer de parfaire ce « nouveau modèle de relation » comme a dit le diplomate – un « bras de fer » obligé qui doit rester à la verticale ?
 
Clémentine Jallais