Monti nie l’existence d’un complot de Bruxelles, Merkel et la Deutsche Bank contre Berlusconi en 2011

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Mario Monti, qui avait remplacé Berlusconi après la démission de ce dernier le 12 novembre 2011 sous la pression des marchés financiers, comparaissait juste avant les fêtes de Noël devant la commission parlementaire d’enquête sur le système bancaire et financier. Renato Brunetta, le chef du groupe Forza Italia, qui demande depuis des années « la vérité pour les Italiens et pour l’histoire » à propos de la crise financière de 2011, est vice-président de cette commission, et Monti a donc dû s’expliquer sur ces événements qui ont conduit à la démission du gouvernement de Berlusconi sous la pression combinée du président italien Giorgio Napolitano, un ancien communiste, de Bruxelles, de Nicolas Sarkozy, d’Angela Merkel, de la Deutsche Bank et des agences de notation.
 

L’eurocrate Mario Monti a-t-il participé à un complot de Bruxelles et d’Angela Merkel pour faire tomber le gouvernement Berlusconi en 2011 ?

 
L’eurocrate Mario Monti – il avait été commissaire européen au Marché intérieur puis à la Concurrence avant de prendre la présidence du Conseil en Italie – a toutefois nié l’hypothèse d’un complot international contre Silvio Berlusconi et son gouvernement de coalition des droites incluant la Ligue du Nord, c’est-à-dire le parti allié au Front national français au Parlement européen. Pour Monti, l’UE a tout simplement été « très active dans son soutien à l’Italie », avec notamment, a-t-il souligné, des rachats massifs de bons du trésor italiens par la BCE. Pour Monti, c’est l’augmentation très rapide des écarts de taux (« spread ») entre les titres de dettes italiens et les titres allemands qui ont mis l’Italie, très endettée, en difficulté en 2011. Monti n’a toutefois pas levé les doutes sur ce qui avait provoqué l’augmentation du spread sans véritable justification économique : la dette de l’Italie était stable et ses fondamentaux aussi. Sans spéculation sur les écarts de taux, Rome n’aurait pas été mise en difficulté pour assurer le service de sa dette. Or plusieurs dirigeants et hauts fonctionnaires internationaux ont, plusieurs années après, révélé l’existence probable d’une machination politique derrière la spéculation sur la dette italienne de juin à novembre 2011.
 

Cinq anciens dirigeants de la Deutsche Bank sous la loupe du parquet de Milan en raison de possibles manipulations des marchés en 2011

 
Selon ce qu’ils ont rapporté, la Deutsche Bank a joué un rôle décisif pour lancer la spirale de la spéculation en juin-juillet 2011. Et, si le tribunal de Trani n’a finalement pas condamné les six dirigeants d’agences de notation qui étaient poursuivis par le parquet italien, cinq anciens dirigeants de la banque allemande font toujours l’objet d’une enquête du parquet de Milan où le dossier, ouvert depuis deux ans, a été transféré par le parquet de Trani. L’enquête du parquet italien concerne les ventes massives de titres de dette italiens par la Deutsche Bank au cours du premier semestre 2011. Ces ventes, qui lui avaient permis de se débarrasser de 7 milliards d’euros en bons du trésor italiens sur les 8 milliards qu’elle détenait, fut annoncée aux marchés le 26 juillet 2011, ce qui eut l’effet d’une bombe. Le Financial Times titra alors sur la fuite des investisseurs internationaux de la troisième économie de la zone euro. Selon l’accusation préparée par le parquet de Milan, la Deutsche Bank avait toutefois, à la date de son annonce, déjà racheté sans le dire pour au moins deux milliards de bons du trésor italien. Parallèlement, une société allemande rachetée par la Deutsche Bank en 2010 détenait pour 4,5 milliards de titres de dette italiens, ce dont les marchés n’avaient pas non plus conscience lors de l’annonce du 26 juillet. Pour le parquet de Milan, il semble donc y avoir eu une manipulation volontaire des marchés qui fut sans doute une opération juteuse pour la Deutsche Bank, mais qui déclencha la crise financière à l’origine de la chute du gouvernement des droites de Silvio Berlusconi en novembre 2011.
 
Quels que furent les commanditaires et les motivations derrière les agissements de la Deutsche Bank, la morale de cette sombre histoire, c’est qu’une dette excessive est incompatible avec la souveraineté et la démocratie. Ce qui valait pour l’Italie en 2011 vaut certainement pour certains pays, dont la France, aujourd’hui.
 

Olivier Bault