NSA : le rapport de ses opérations massives de surveillance au Conseil de l’Europe

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« Mass surveillance », c’est le titre du rapport très critique du député démocrate-chrétien néerlandais Pieter Omtzigt membre de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, sur les programmes états-uniens de surveillance électronique de masse de la National Security Agency (NSA) révélés par Edward Snowden, et leurs conséquences pour l’Europe. Un rapport qui a été adopté à l’unanimité et sans amendement par les 84 membres de la commission des affaires juridiques et des libertés de l’assemblée parlementaire du Conseil, représentant 47 pays.
 
En exergue, une phrase de Soljénitsyne : « Notre liberté repose sur ce que les autres ignorent de notre existence. » Notre époque moderne veut l’oublier ou plutôt certains ne souhaitent l’appliquer qu’à eux-mêmes…
 

« Une surveillance qui n’épargne rien ni personne » (rapport)

 
Pieter Omtzigt refait le tour de l’ensemble des révélations d’Edward Snowden, publiées jusque-là. C’est une certitude : « Toutes les formes de communication sont interceptées grâce à une multitude d’instruments et de programmes mis au point par la NSA et les autres services de renseignement du monde entier. » Du réseau câblé de fibres optiques aux communications vocales, tout est surveillé, trié, étudié. Et peut servir à des « fins politiques, économiques » tout autant qu’à des « opérations de propagande ». La NSA a également développé la mise en place de « trappes », le décryptage systématique et l’envoi ciblé de logiciels malveillants.
 
Le rapport dévoile en sus toute la coopération qui existe sur ces bases de renseignements, fortement alléchantes. En particulier avec les « Five Eyes » ou « Cinq Yeux » – c’est ainsi qu’on désigne l’alliance des services de renseignement de l’Australie, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni et des États-Unis. Quant au refus américain de conclure des « accords de non-espionnage » avec un quelconque pays, il est par lui-même éloquent.
 

Pour le Conseil de l’Europe, ces opérations « mettent en danger les droits de l’homme »

 
En l’état, c’est une violation de la Convention européenne des droits de l’homme et de la convention du Conseil de l’Europe sur la protection des données personnelles. Le rapport condamne fermement les États-Unis et son « gigantesque complexe industriel de la surveillance » dont l’emballement est « dû au fait que les dirigeants politiques ont perdu le contrôle des activités des services de renseignement ». Ou du moins ont fait semblant de le perdre !
 
Il préconise « d’utiliser tous les instruments dont l’Union européenne dispose dans ses relations avec les États-Unis pour faire pression en faveur de la protection de la vie privée des citoyens européens ». A l’inverse du premier ministre David Cameron qui souhaitait précisément le limiter, il approuve aussi l’appel lancé par le Parlement européen pour « promouvoir l’utilisation généralisée du chiffrement et résister à toute tentative de fragilisation du chiffrement et des autres normes de sécurité d’Internet ». Et souhaite la mise en place d’un véritable code déontologique du renseignement.
 
Dans le même temps, il s’oppose à toute création de « clouds souverains » ou « d’Internets nationaux ». Et reconnaît la nécessité d’une coopération transatlantique dans la lutte contre le terrorisme et les autres formes de criminalité organisée. L’ensemble est-il possible, est-il seulement plausible ?…
 

La NSA s’attaquent aussi au DNS

 
Les États-Unis n’ont pas vraiment jusque-là, et le rapport le note, apporté la preuve de leur collaboration. Et les découvertes se poursuivent : ces derniers jours, un nouveau lot de documents officiels a révélé que la NSA s’attaquait de façon massive et systématique au DNS (Domain Name System), qui gère les répertoires de noms à l’échelle mondiale. De la gérance des groupes des « serveurs racine » à l’attribution des numéros IP, les américains occupent la place et ont ainsi pu élaborer un vaste programme d’espionnage, baptisé « MoreCowBell ». Une surveillance dite « passive » pouvant à tout moment passer à l’offensive…
 
Poursuivie par le méthodique déroulement médiatique des révélations d’Edward Snowden, il a bien fallu, à l’agence, donner quelques gages d’honnêteté et de bonne volonté. Dans un tout récent article publié dans la revue de mathématique américaine « Notices », Michael Wertheimer, le directeur de la recherche de la NSA, a reconnu qu’elle était parvenu à imposer à la communauté internationale l’usage d’un algorithme de cryptographie piégé, contenant une porte dérobée. Il a réassuré formellement que « les algorithmes de la NSA éliminent approximativement 99,998% des données auxquelles elle a accès… Après ce processus de filtrage, les données restantes doivent remplir des conditions très strictes avant d’être sélectionnées pour traitement et analyse. »
 
Les conditions « très strictes » restent à leur appréciation… Oui, c’est une « guerre contre la sécurité ». C’est aussi une guerre pour la Surveillance.