Premières nominations de Donald Trump : beaucoup de Républicains de l’Etablissement

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Les premières nominations du président-élu des Etats-Unis sont dans la continuité de sa campagne électorale : Donald Trump a choisi dimanche Stephen (Steve) K. Bannon comme « stratège principal » – pour reprendre la terminologie américaine – de la Maison Blanche tandis que Reince Priebus en sera le chef de cabinet. Les deux hommes faisaient déjà partie de l’équipe de campagne de Donald Trump qui, affirme la presse américaine, ne s’était pas véritablement préparée à une victoire. On parle d’un branle-bas de combat pour remplir les différents postes de l’équipe de transition qui non seulement assurera les relations avec l’administration sortante mais préparera les premières mesures à prendre dès l’entrée en fonctions du président, le 20 janvier prochain – 4.000 postes seront à pourvoir. On est frappé, quoi qu’il en soit, de la présence de nombreux Républicains qui naviguent depuis longtemps au sein de l’Etablissement.
 
Pouvait-il en être autrement ? Après tout, ce n’est qu’à titre personnel que Trump a joué les « outsiders » : il avait l’investiture d’un des principaux partis américains et à ce titre, il est l’obligé des Républicains en même temps que leur représentant. La rupture et le changement tant désirés, manifestement, par les Américains, pourrait se révéler de moindre ampleur que ce qu’avait promis le milliardaire.
 

Donald Trump choisit pour le seconder des Républicains de l’Etablissement

 
Alors qu’un quart de son comité exécutif de seize personnes est constitué de membres de sa famille – sa fille Ivanka, ses fils Éric et Donald junior ainsi que son gendre Jared Kushner – Trump aura pour premier souci de bien distinguer sa fonction présidentielle de ses intérêts personnels. Le magnat milliardaire s’est dès vendredi dernier désengagé de son empire immobilier mais il en a transmis les rênes précisément à Ivanka, Eric et Donald, ce qui n’est pas sans poser problème du point de vue du conflit d’intérêt.
 
Mike Pence, fortement pro-vie, chrétien évangélique, colistier de Trump pendant la campagne, a été nommé à la tête de l’équipe de transition, à la place du gouverneur Chris Christie. Chaud partisan du Traité transatlantique et du Partenariat transpacifique, Pence, gouverneur lui aussi – de l’Indiana – a également soutenu le « Patriot Act » autorisant toutes sortes de surveillances, et il a voté régulièrement avec les « neo-cons », notamment dès lorsqu’il était question d’engager les États-Unis dans diverses aventures militaires dont on sait les désastreuses conséquences. C’est donc lui-même un homme de l’Etablissement qui a passé plus de dix ans à la chambre de Représentants, à voter dans le sens globaliste.
 
Voilà qui nous ramène à Bannon et Priebus. Le premier est l’ancien responsable d’un site d’informations conservateur, Breitbart.news, connu pour avoir lancé des accusations politiques contre le « speaker » républicain Paul Ryan et d’autres leaders du parti dont il dénonçait la faiblesse et l’inefficacité. La presse française voit en lui un « ultraconservateur » dangereux, « raciste » et « sexiste », pourquoi pas. Ancien de Goldman Sachs, réalisateur de séries à succès, il est présenté comme un homme de la droite dure.
 

Reince Priebus, un homme du sérail, directeur de cabinet de Donald Trump

 
Face à lui et en même temps à ses côtés, Reince Priebus, un homme jeune, 44 ans, fait partie du sérail. Il bénéficie d’une recommandation de Paul Ryan et connaît tout le monde : l’homme rêvé pour faire le lien entre la Maison Blanche et le Congrès où il est apprécié et où son rôle devrait consister à arrondir les angles. En clair, il s’agit de réunifier le parti, ce qui semble devoir se faire par une certaine édulcoration du discours de Trump, et par conséquent de son action par rapport à ses promesses électorales. Des deux hommes, c’est Priebus qui a le rôle le plus politique. Le Monde le désigne comme un apparatchik qui a déjà fait beaucoup pour permettre à Trump d’obtenir l’adhésion du parti républicain. Habileté et ambition personnelle ? Ou serait-ce l’art de contrôler l’ennemi en le rejoignant ? Ou tout simplement, comme il le dit lui-même, Priebus serait-il tombé sous le charme personnel de Trump, capable de jouer de multiples rôles mais au caractère bien plus riche, assure le jeune loup républicain, que ne pouvait le laisser penser la campagne ?
 
Ce qui est certain, c’est que les noms de ceux qui exerceront le pouvoir aux côtés de Trump ne semblent pas devoir être inconnus. Parmi son équipe de campagne, on note la présence d’un ancien directeur de la CIA sous Bill Clinton, James Woolsey, qui s’est distingué au cours de la campagne en qualifiant de « mauvaise décision » l’idée d’interdire l’entrée des Etats-Unis aux musulmans et qui a par le passé fortement soutenu l’engagement américain en Irak. En revanche, il prône l’indépendance énergétique des Etats-Unis par rapport aux pays musulmans pratiquant un islam radical, comme l’Arabie Saoudite. C’est aussi un « réchauffiste » convaincu, rapporte Politico.
 
L’équipe de transition comprend également le sénateur de l’Alabama Jeff Sessions, connu pour son opposition aux grands traités libre-échangistes qu’Obama a tenté d’imposer par force.
 

Les premières nominations de Trump n’annoncent pas la rupture

 
Mais on note aussi la présence de l’ancien « speaker » neo-conservateur, Newt Gingrich, membre du Council on Foreign Relations de 1990 à 2014 qui bénéficie du soutien des médias néoconservateurs aux Etats-Unis, tel Fox News. La presse américaine voit en lui un possible secrétaire d’Etat pour Donald Trump.
 
Egalement présent dans l’équipe restreinte charger de la transition : le général Michael Flynn, qui a servi sous Obama à la tête des services de renseignement de l’armée et qui est tombé en disgrâce pour avoir clairement désigné la menace islamiste et les dangers du politiquement correct, qui a accusé les États-Unis d’avoir financé les financiers et soutiens de l’État islamique, et qui dit son admiration – ambivalente – pour Poutine.
 
Pour ce qui est des affaires économiques, ce sont également des Républicains de longue date qui ont été sollicités : David Malpass, haut fonctionnaire du Trésor et du département d’État, ainsi que Paul Atkins, ancien membre de la SEC (Securities and Exchange Commission), l’autorité de régulation de la bourse qui est personnellement opposé au pouvoir de plus en plus étendu de cette institution, à ses amendes et à ses sanctions, et à la création d’un conseil chargé de surveiller les risques systémiques. Opposé, donc, à une mise au pas de la haute finance qui s’est faite au bénéfice des banques centrales.
 
Sans s’inscrire docilement dan la ligne des administrations précédentes, cette équipe n’est certainement pas une équipe de rupture.
 

Anne Dolhein