Projet de loi El Khomri : manifestations et reculade du gouvernement

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Manifestants ce mercredi 9 mars 2016.

 
Plusieurs centaines de milliers de personnes ont manifesté mercredi en France contre la réforme du droit du travail dans le projet de loi El Khomri. Une journée qui, pour les plus virulents de ses opposants n’aura été qu’un échauffement en vue d’actions futures, mais qui a déjà provoqué une reculade du gouvernement.
 
Les manifestations de mercredi se sont déroulées à l’appel de la CGT, de Force ouvrière et d’une vingtaine de mouvements de jeunesse. Concernant ces derniers, il faut noter qu’elle s’est traduite par le blocage d’une petite centaine de lycées sur quelque 2.500 établissements, selon les chiffres donnés par l’Education nationale, ce qui est relativement peu. A cela s’ajoutait une grève, relativement peu agressive, des cheminots qui protestent contre leurs conditions de travail.
 

Manifestations contre le projet de loi El Khomri

 
Au total, ce sont 176 rassemblements ou défilés qui ont été organisés, pour un total de 400.000 participants selon les organisateurs : 100.000 à Paris, 20.000 à Toulouse, 15.000 à Bordeaux, 10.000 à Lyon, 6.000 à Rennes, etc.
 
Comme il est habituel en pareil cas, les chiffres donnés par le ministère de l’Intérieur sont bien moindres, puisqu’il évoque 224.000 manifestants au total, dont 27.000 à 29.000 pour le cortège parisien, environ 10.000 à Toulouse, 9.000 à Bordeaux, 7.000 à Lyon, 4.500 à Rennes, etc.
 
Au delà de ces calculs, on peut supposer que le gouvernement aura compris, même s’il prétend faire de la relativement faible participation à ces manifestations un argument, que la question était bien plus délicate, et notamment parce que c’est, en grande partie, sa propre base qui manifeste ainsi contre lui. A quelques jours de la conclusion des consultations entreprises par le gouvernement, et notamment par Manuel Valls sur le sujet, une partie importante de la gauche et la plupart des syndicats ne veulent toujours pas entendre parler de la réforme envisagée.
 
Il ne s’agissait donc, dans l’esprit des organisateurs, que d’un coup de semonce. « Derrière moi et partout en France, c’est une première grosse mobilisation. On démarre fort et il faut donc continuer à élargir », a ainsi déclaré Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT.
 
Force ouvrière, qui affirme vouloir « maintenir la pression », affirme pour sa part dans un communiqué : « Il appartient maintenant au gouvernement de prendre conscience du rejet de son projet et d’en tirer les conséquences. »
 

La reculade à peine dissimulée du gouvernement

 
En face, Manuel Valls a aussitôt donné l’impression de vouloir rebattre les cartes, d’être prêt à « bouger des curseurs », mais, assurait-il, sans remettre en cause l’équilibre général du texte. En pensant sans doute à l’appel que lui avait lancé mardi le président du Medef, Pierre Gattaz, à ne pas « dénaturer » un projet de loi qu’il considère comme une « rupture » salutaire susceptible de relancer les embauches.
 
Assurance feinte ? Inconscience ? Ce qui est sûr, c’est que la position du gouvernement n’est pas aussi forte que le premier ministre le prétend. La reculade est à l’ordre du jour, puisque, parmi les curseurs évoqués, il envisage désormais la « surtaxation » des CDD, répondant ainsi à l’une des revendications des syndicats.
 
Ceux-ci ont fort bien compris que, si le gouvernement commençait à céder, il convenait non de s’abstenir, mais de peser plus fort. Il est étonnant qu’un gouvernement issu de la gauche ne l’ait pas compris. Comme il n’a pas compris, semble-t-il, que les plus extrémistes des organisations syndicales, en favorisant l’émergence d’une classe de travailleurs étrangers, en pleine crise migratoire qui plus est, sape la perspective de voir François Hollande se succéder à lui-même.
 

Les ravages de l’idéologie

 
Nous nous trouvons, en fait, devant l’opposition de deux formes de mondialisme : celle, au pouvoir, qui vit dans les sphères de la mondialisation libre-échangiste, et qui, face à la réalité, modère ses pulsions idéologiques de peur de casser le jouet, c’est-à-dire la société ; et l’autre qui, emportée par ce poids idéologique, est prêt à le détruire, en ruinant notre pays, pourvu que ses idées triomphent.
 
Mais, quoi qu’il en soit, l’idéologie empêche, en pratique, toute réforme d’une France qui est en train de sombrer. La jalousie systématique de classe, qu’exprime bien cette partie de la jeunesse qui manifeste aujourd’hui en espérant succéder demain à des postes que leurs aînés leur conservent bien au chaud, est la version moderne de cette femme qui préfère voir mourir un enfant plutôt qu’un autre qu’elle l’emporte.
 
On attend toujours un Salomon…
 

François le Luc