La réforme du travail détraque le gouvernement

Réforme travail détraque gouvernement
Manuel Valls et Myriam El Khomri à Matignon à Paris en novembre 2015.

 
Face aux propositions nourries contre le projet de loi sur la réforme du travail, Manuel Valls a décidé lundi de prendre lui-même en mains le dossier. En attendant, la présentation en est reportée de quinze jours, au 24 mars, temps jugé nécessaire pour tenter d’amadouer les partenaires sociaux, et désarmer – si possible – la rébellion d’une partie de la majorité. Quant à Myriam El Khomri, le ministre du Travail, elle est aux abonnés absents, à la suite d’un malaise, qui la contraint à subir des examens médicaux. Décidément, le gouvernement est patraque – pour ne pas dire détraqué.
 
Tout le monde semble désormais aux petits soins pour Myriam El Khomri, officiellement fatiguée par la dureté de la politique, et l’opposition d’une partie de la gauche. Mais, dans les coulisses, d’aucuns s’interrogent pour savoir si cette dureté de la politique n’est pas due à l’inconséquence d’un premier ministre qui, en choisissant un ministre du Travail, traite Myriam El Khomri comme une potiche, puisqu’il lui retire la gestion du gros dossier de l’actualité en ce domaine.
 

La réforme du travail provoque le malaise de Myriam El Khomri

 
C’est bien ce que semble dire Pierre Jacquemain, ancien conseiller de Myriam El Khomri, qui a démissionné il y a un mois, pour protester contre le projet de loi, et une certaine gestion de la politique. « C’est une régression en matière de droits sociaux, dans la mesure où de nombreux acquis des travailleurs pourront être renégociés à l’échelle des entreprises, où le rapport de force est systématiquement défavorable aux salariés », déclare-t-il à L’Humanité.
 
Et il ajoute : « En réalité, la politique du ministère du Travail se décide ailleurs, à Matignon. C’est le Premier ministre qui donne le ton. »
 
La satisfaction manifeste de Luc Bérille, secrétaire général de l’UNSA, interrogé alors qu’il sortait d’un rendez-vous avec Myriam EL Khomri, vient renforcer cette critique. « On voit bien qu’il y a un problème politique général, affirme le dirigeant syndical On préfère avoir directement des gens en capacité de discuter avec nous et pas en attente d’un arbitrage. »
 

Un gouvernement détraqué

 
Manuel Valls n’en a cure. Il faut dire que la popularité de l’exécutif dégringolant dans les sondages de jour en jour, et la gauche manifestant une opposition grandissante à sa politique, le premier ministre n’a plus grand chose à perdre.
 
Il faut « lever les incompréhensions » et « corriger ce qui doit l’être », déclarait-il à l’occasion de sa visite au Salon de l’agriculture, tout en affichant une « très grande détermination du gouvernement pour faire avancer ce texte ».
 
En français, ça se traduit par l’expression populaire : « Cause toujours, tu m’intéresses ! »
 

Tension grandissante

 
D’ores et déjà, les syndicats ont annoncé qu’ils resteraient très vigilants, décidés qu’ils sont à ne pas accepter ce texte en l’état. A l’opposé, le MEDEF, qui se dit plutôt satisfait du projet de loi, a déclaré s’opposer à son délitement.
 
Les quinze prochains jours risquent d’être fort chauds pour Manuel Valls. Un de ses conseillers pourrait, en tout cas, lui expliquer que l’autoritarisme et les coups de menton ne sont guère indiqués lorsque l’on prétend négocier…
 

François le Luc