Restructuration de l’islam : le prince héritier Mohammed bin-Salman d’Arabie saoudite continue sa tournée

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« L’ouverture » de l’Arabie saoudite a un sens bien précis : un sens que le prince héritier Mohammed bin-Salman est en train d’expliciter à la face du monde au cours d’une tournée qui le mène dans plusieurs pays d’Occident. C’est depuis l’enceinte de l’ambassade saoudienne à Washington – où son propre frère est ambassadeur – que le chargé des réformes visant à l’adaptation de la charia aux temps modernes a exposé sa pensée. Objectif : restructuration de l’islam.
 
Le wahhabisme ? Cette forme radicale de l’islam, soucieuse d’appliquer le coran et les hadiths à la lettre, il n’en a jamais entendu parler ou quasi. Mohammed bin-Salman a affirmé ne pas être « familier » de cet islam totalitaire solidement installé en Arabie saoudite et volontiers exporté vers les pays de ce qu’il faut bien appeler la colonisation musulmane. Interpellé par le journaliste Jeffrey Goldberg de The Atlantic, le prince héritier – MBS pour les intimes – a plaidé l’ignorance : « Ce wahhabisme – s’il vous plaît, définissez-le-nous. Il ne nous est pas familier. Nous n’en savons rien. »
 
Goldberg tenta bien de rappeler en quelques mots l’histoire de cette version multiséculaire d’un islam revenu aux sources, mais MBS a balayé tout cela d’un revers de main, minimisant l’importance du soutien de l’Arabie saoudite au cours du XXe siècle pour en faire une simple retombée contre nature de la politique de la Guerre froide, assurant qu’on ne l’y prendrait plus.
 

Le prince héritier Mohammed bin-Salman d’Arabie saoudite en tournée pour « vendre » l’islam expurgé

 
L’islam repensé par le prince Mohammed bin-Salman et ceux qu’il représente est « une religion de paix et d’amour » – air connu. Non seulement elle peut s’accommoder de l’existence d’Israël – à telle enseigne que les pays du Golfe et leurs alliés comme l’Egypte et la Jordanie ont des intérêts communs avec l’Etat hébreu – mais le mot islam, dont vous et moi pensions qu’il voulait dire « soumission », veut dire « paix ».
 
Le saviez-vous ? Le deuxième devoir du musulman – après celui d’une vie juste – est de répandre la parole de Dieu. Et cela fait 1.400 ans que les fidèles de l’islam s’y emploient. Ce n’est pas de leur faute si parfois cela s’est fait dans le sang : « Au Proche-Orient, en Afrique du Nord, en Europe, on ne leur a pas permis de répandre la parole. C’est pour cela qu’ils ont combattu pour répandre la parole. Mais vous voyez aussi que dans de nombreux pays d’Asie – en Indonésie, en Malaisie, en Inde – les musulmans ont été libres de répandre la parole. On leur dit : “Allez-y, dites tout ce que vous avez envie de dire, les gens ont leur libre arbitre pour croire ce en quoi ils ont envie de croire.” L’islam, dans ce contexte, n’avait rien à voir avec la conquête, il s’agissait de répandre paisiblement la parole. »
 
Bref, les batailles, la dhimmitude, la prise de Constantinople, l’avancée vers Poitiers, Lépante, Vienne, tout ça, c’était de notre faute : il suffisait d’accueillir la « Parole ».
 

Restructuration de l’islam : ils prétendent opérer un retour aux origines

 
« Aujourd’hui, ajoute le prince, tout être humain a le droit de choisir sa croyance. Dans chaque pays, il est possible d’acheter des livres religieux. Le message est transmis. Nous n’avons plus le devoir de combattre pour répandre l’islam », a insisté le prince, expliquant que le « triangle du mal » dont l’Iran est le cœur avec son chef suprême « pire qu’Hitler » et nourri de rêves d’empire, n’a rien à voir avec cet islam remis au goût du jour. Installer l’oumma par la force ? « Dieu ne nous a pas demandé de faire cela, et le prophète Mahomet ne nous l’a pas demandé non plus. Dieu nous a simplement demandé de répandre la parole. Mission accomplie. »
 
Il va falloir sérieusement expurger le coran et les hadiths…
 
La disponibilité des livres religieux, on peut le soupçonner, concerne les livres de l’islam. Il n’est toujours pas question de permettre la construction d’églises en Arabie saoudite, et d’ailleurs le prince Mohammed bin-Salman a tenu à préciser qu’il n’était pas question de mettre en place une démocratie représentative, d’abolir la monarchie absolue dont il héritera, ni même d’assurer la liberté d’expression au-delà de la de certaines limites à l’intérieur desquels tout est permis. Il suffit de s’abstenir de diffamer l’islam, de diffamer les individus de mettre en péril la sécurité nationale.
 

La restructuration de l’islam pour le mettre en conformité avec la dictature du relativisme

 
Bref, c’est la restructuration de l’islam mais jusqu’à un certain point seulement : comme l’a dit le prince, il faut avancer prudemment afin d’éviter de créer des problèmes vis-à-vis des « familles conservatrices », mais toujours avec cet objectif : « Le développement, les droits et la liberté. » Toutes notions compatibles avec la marche vers le mondialisme maçonnique et relativiste, qui constitue quant à lui l’objectif ultime et non-dit de cet aggiornamento que l’on perçoit aussi bien en Arabie saoudite qu’en Egypte qu’au Pakistan, sans d’ailleurs que les chrétiens qui y vivent s’en trouvent véritablement mieux.
 
Pour mieux comprendre ce que veut le prince Salman, il suffit de se reporter quelque jours en arrière : la semaine dernière, à l’issue de sa rencontre avec le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres à New York, MBS a déclaré au cours d’une conférence qu’aujourd’hui le plus important est de respecter les principes de l’ONU et l’état de droit. A l’en croire, les problèmes actuels du Proche-Orient sont dus aux idéologies contraires aux principes des Nations unies, et qui violent ses lois et coutumes en s’ingérant dans les affaires internes d’autres Etats.
 
Tout cela ne manque pas de sel, vu la poudrière actuelle du monde arabe, l’affaire du Yémen et tout le reste, mais a du moins le mérite de montrer que l’ONU, une fois de plus, est présenté comme le sauveur.
 

Anne Dolhein