Royaume-Uni : Cedars, un centre de luxe pour demandeurs d’asile à près de 600.000 euros par famille

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Les Cedars, ancien hôtel de luxe pour immigrés en voie d’expulsion.

 
On crève les plafonds de la gabegie. Au Royaume-Uni, un centre d’accueil pour familles qui n’ont pas obtenu le droit d’asile aura coûté près de 600.000 euros par famille hébergée sur une période de neuf mois à cheval sur 2014 et 2015. Pour un séjour le plus souvent limité à trois jours, le centre d’accueil sécurisé Cedars a accueilli 14 (quatorze) familles sur la période. Coût d’exploitation : 6.398.869 livres sterling, soit près de 8,4 millions d’euros, à la charge du ministère de l’Intérieur, heureux propriétaire de l’ancien hôtel de luxe, et donc à celle du contribuable britannique.
 
Il s’agit d’un hôtel de rêve idéalement situé à proximité de l’aéroport de Gatwick, et pourvu de multiples équipements de qualité : une salle « multisensorielle », un terrain de basket, des salons communs, une bibliothèque pourvue de nombreux ouvrages en différentes langues, ordinateurs et accès internet, d’amples jardins paysagés pourvus d’une aire sensorielle, sans oublier des aires de jeu puisque le but est de fournir un environnement agréable aux familles en attendant leur expulsion.
 

Les Cedars, un centre de luxe pour demandeurs d’asile en voie d’expulsion

 
Avec neuf appartements équipés pourvus d’une à trois chambres, salon et cuisine, la maison Cedars permet aux réfugiés dont le dossier n’a pas passé la barre des contrôles d’agrément de s’organiser eux-mêmes pour leurs repas. Mais les familles peuvent préférer le café, et se restaurer dans la salle à manger commune où les trois repas quotidiens sont proposés aux résidents préférant ce moment de sociabilité.
 
Bien sûr, le lieu est parfaitement sécurisé puisque les familles sont techniquement en situation illégale, mais les portiques de contrôle et autres équipements de surveillance sont camouflées pour en éviter le côté traumatisant.
 
Des soins de santé 24 heures sur 24 sont proposés sur place et les réfugiés en voie de refoulement peuvent avoir accès à un médecin généraliste dans la journée – là où les Britanniques qui dépendent du National Health Service doivent attendre jusqu’à une semaine pour obtenir un rendez-vous.
 
J’allais oublier : un chapelain est disponible et Cedars possède une salle de prière et même une petite mosquée.
 
Le nom n’a d’ailleurs pas été choisi par hasard : c’est l’acronyme de Compassion, Empathy, Dignity, Approachability, Respect and Support. Pas besoin de traduire…
 

Le contribuable du Royaume-Uni paie le fonctionnement des Cedars : 26 millions de livres en cinq ans

 
Depuis sa création par le gouvernement britannique de coalition en 2011, le centre de luxe aura coûté au total 26 millions de livres en coût de fonctionnement depuis cette date. Il aura accueilli le plus souvent des femmes seules avec leurs enfants pour des durées qu’on ne connaît pas exactement, les statistiques étant floues, si ce n’est que de nombreux séjours n’ont duré que trois jours. 60 % des hébergés sont repartis dans leurs pays, les 40 % restants ont bénéficié d’une libération temporaire.
 
C’est l’inspecteur principal des frontières et de l’immigration, David Bolt, qui a révélé l’affaire dans un rapport officiel où il a souligné, avec un art consommé de la litote, que les Cedars ont été « sous-employés ». Ce que les directeurs du centre sont prêts à reconnaître, mais du bout des lèvres seulement : « Les directeurs ont estimé que les Cedars ont joué un rôle important pour aider les familles et les enfants de gérer le stress lié au renvoi depuis le Royaume vers ce qui constitue, pour certains enfants, un environnement et une culture peu familiers. Cependant, ils ont reconnu que le centre était sous-employé. »
 

Un coût exorbitant pour un centre de luxe « sous-employé »

 
Sans doute l’environnement de luxe par lequel ils transitent prépare-t-il au retour vers l’Afrique noire, le Pakistan ou l’Albanie, pays de provenance de nombre des familles accueillies. On espère qu’ils puissent trouver aussi bien sur place.
 
Moins indulgente, Dia Chakavraty, s’exprimant au nom de l’Alliance des contribuables, a qualifié de « grotesque » le fait que l’accueil proposé n’ait pu être financé à bien moindre coût : « Cela fait preuve d’un mépris total pour les efforts des contribuables déjà lourdement imposés, ainsi que d’une absence complète du sens des responsabilités. »
 
Mais du côté du ministère de l’Intérieur britannique, le discours est parfaitement huilé. Une porte-parole a souligné que grâce aux Cedars, le gouvernement avait su tenir son engagement de toujours tenir compte en priorité du bien des enfants. Elle a osé ajouter : « Le faible taux d’occupation des Cedars atteste du succès des procédures de retour puisque davantage de familles acceptent l’aide volontaire au départ du Royaume-Uni lorsqu’elles n’ont plus de justification légale pour leur séjour ici. Après tout, les Cedars ont toujours eu pour objectif de servir de solution de dernier recours après l’échec de toutes les options de retour volontaire, suivant les conseils d’un panel indépendant d’experts du bien-être infantile. »
 
Les Britanniques devront se contenter de son assurance selon laquelle « une enquête est en cours sur le coût actuel des séjours préalables au départ » et, pendant ce temps, s’occuper du « bien-être infantile » de leur progéniture qui ne semble pas autant préoccuper leur gouvernement.
 

Anne Dolhein