Subventions des autorités pour des millions de logements invendus en Chine : la spéculation guette

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La surproduction de logements en Chine communiste est bien plus qu’un phénomène conjoncturel. C’est devenu un problème économique majeur, la mévente traduisant une bulle spéculative aux conséquences potentiellement ravageuses. Aussi, la réduction du nombre d’appartements inoccupés est-elle restée l’un des objectifs majeurs du régime communiste-capitaliste en 2016. Selon les chiffres officiels, le stock de logements invendus atteignait 709 millions de mètres-carrés fin août 2016, soit seulement 9,8 millions de moins qu’un an auparavant, une baisse homéopathique de 1,38 %.
 
Les villes de deuxième et troisième rang (par leur population) ont continué de voir leur marché stagner, tandis que seules les villes de premier rang ont continué de bénéficier d’une dynamique. Le phénomène est confirmé de source indépendante grâce à un système de détection satellitaire basé en Californie, dont les données sont utilisées par les traders américains, par exemple ceux du géant de la gestion d’actifs BlackRock. L’ordinateur analyse les images des immeubles des principales villes de Chine, captées par le satellite. Ces données confirment que le boom immobilier chinois est en net ralentissement, indique le New York Times.
 

Les subventions : argent, prêts à taux zéro… ou coupons locaux à Erdos 

 
Le gouvernement communiste chinois en est réduit à subventionner les achats de logements. Meishan, dans le Sichuan, offre par exemple 200 à 300 yuans (26 à 41 euros) par mètre carré aux acquéreurs d’un logement. A Shenyang, dans la province de Liaoning, les autorités proposent des prêts à taux zéro aux étudiants fraîchement diplômés.
 
Erdos, dans la région autonome de Mongolie intérieure, connue sous le nom de « ville fantôme » en raison de son stock colossal de logements vides, expérimente un système de coupons. Non point ces coupons qui étaient jadis donnés au compte-goutte pour favoriser tel ou tel, du temps de la pénurie de masse subie par la Chine maoïste. Au contraire. Il s’agit de subventionner les achats dans un marché submergé par l’offre. Le système évite l’affectation autoritaire de familles déplacées, les futurs résidents pouvant choisir leur quartier sur l’une des plateformes de vente sur internet. Le coupon offre une valeur supérieure à celle de la surface indiquée, pour inciter à l’achat. Le prix proposé par les autorités est relativement bas, ce qui n’empêche pas de nombreux promoteurs de souhaiter être inclus dans le système. Mieux vaut brader que ne rien vendre du tout. A Erdos, on dénombrait 33.900 appartements invendus dans le seul district de Dongsheng. Depuis l’introduction du système, les ventes se sont réveillées.
 

Les logements invendus en Chine alimentent la spéculation

 
« Ces coupons-logement sont une forme de subvention destinée à aider la ville à écouler son stock d’invendus », explique Li Jingguo, professeur à l’Institut d’études environnementales et urbaines de l’Académie chinoise des sciences, dans le média officiel Global Times. Mais plusieurs experts s’inquiètent des conséquences de ce type d’aides susceptibles d’encourager la spéculation et finalement de déplacer la charge de la bulle immobilière d’un acteur – le promoteur – vers un autre – l’émetteur local des coupons.
 
Car la possibilité de céder ces coupons a créé un marché dans lequel les intervenants et les spéculateurs les achètent à petit prix et les revendent avec une nette plus-value. Les détenteurs primaires les cèdent souvent à bas prix en raison des contraintes de localisation que comportent ces titres. Global Times indique ainsi qu’un seul agent immobilier, Xang Rui, a investi 1,8 million de yuans (138.000 euros) en achetant ces coupons à prix bradé.
 

Les autorités chinoises, les villes fantômes et la spéculation par satellite interposé

 
Le parc immobilier chinois est décidément un gigantesque casino. De l’autre côté du Pacifique, aux Etats-Unis, les fonds spéculatifs jouent sur les effets de marge facilités par l’utilisation de puissants ordinateurs pour la modélisation quantique des risques. Le Blackstone Alternative Asset Management, qui gère 70 milliards de ces fonds, a investi des milliards de dollars dans ces sociétés d’analyse. Certains observateurs estiment que ces modélisations quantiques servent simplement de produit d’appel pour les clients. D’autres jugent qu’il s’agit d’un saut technologique comparable à celui qui a bouleversé d’autres industries.
 
Au bout du processus, il reste les banques. Un marché pléthorique reste un marché pléthorique et les gains spéculatifs n’ont qu’un temps. L’Espagne et sa bulle immobilière de la fin des années 2000 est là pour le prouver. Ce pays commence tout juste à s’en remettre.
 

Matthieu Lenoir