Grande Bretagne : Theresa May, premier ministre imposé du système

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La démission de Cameron devait prendre effet en octobre, puis en septembre après un congrès conservateur qui choisirait son successeur. Le favori, Boris Johnson, s’est retiré, suivi de Gove et d’Andrea Leadsom et Theresa May sort du chapeau, candidat imposé par l’appareil conservateur sans vote des militants. Une femme énigmatique, dont les convictions affichées évoluent, qui plait au système.
 
Elle s’est taillé une réputation de dureté au ministère de l’intérieur qu’elle occupait dans le cabinet Cameron, mais à y bien regarder, ses décisions les plus controversées, notamment le plan de délation scolaire des terroristes, étaient plus tournées contre l’ultra droite que contre les islamistes. Et elle a affirmé sans déplaisir que le Brexit allait amener  « plus d’immigration ». Comme une évidence. Sur le Brexit lui-même, elle a d’abord été contre, mais sans faire campagne, puis pour, quand il a gagné, mais du bout des lèvres. Maintenant, elle se dit décidée à « faire le job ».
 

Pour être premier ministre Theresa May s’incline devant le système

 
Mais comment ? Elle n’essaiera pas « de rester dans l’UE, ni de la rejoindre par la porte de derrière », et ne veut « pas de second referendum ». OK, mais concrètement ? « Le Brexit est le Brexit et nous allons en faire un succès ». Vous êtes plus avancés ? Moi non plus. Tout ce que je vois est une bonne vieille tautologie politicienne qui lui laisse les mains libres pour faire ce qui lui chante, ou ce que ses commanditaires souhaitent.
 
On a comparé Theresa May à Margaret Thatcher, la dame de fer, à cause de ses manières brutales. Mais Margaret Thatcher, avec tous ses défauts, avait des convictions fermes et stables. Ce n’est pas le cas de Theresa May, on l’a vu plus haut, et ce flou, ou cette propension à une évolution qui semble moins due à une réflexion de fond qu’à l’arrivisme, s’étend à la morale de la famille. Au début des années deux mille, elle s’est opposé à l’adoption par les couples homosexuels et a voté pour le maintien d’une loi (Section 28) dont l’abrogation tenait à cœur du lobby LGBT, tant et si bien qu’en 2010, quand Cameron la fit entrer au gouvernement, il y eut une campagne Facebook sur le thème «  Saquez le nouveau ministre homophobe  de l’Egalité ».
 

Le politiquement correct s’est imposé en Grande Bretagne

 
Or aujourd’hui, elle revient sur cette période : « Oui, j’ai changé d’opinion et je voterais différemment aujourd’hui ». Peu importe les justifications laborieuses qu’elle donne à cette tête-à-queue, elle est aujourd’hui pour l’adoption par les homosexuels. Et elle est aussi revenue sur son projet de se retirer de la convention européenne des droits de l’homme, qui est un instrument du politiquement correct en général, des lobbies LGBT et immigrationnistes en particulier. Bref, elle a fait sa génuflexion devant les idoles qu’il convient d’honorer pour parvenir au pouvoir. Elle a utilisé lors de sa brève campagne pour devenir premier ministre le vocabulaire humaniste nécessaire. Elle veut « un pays qui fonctionne pour tous ». Elle « s’engage pour l’égalité ». Elle ne croit plus que « l’Etat doive perpétuer la discrimination contre les LGBT », etc. En somme, elle « croit fermement dans un programme de réforme sociale ouvert, inclusif, pour une Nation, qui change notre pays pour le meilleur ».
 

Comment le système a imposé sa pouliche, Theresa May

 
Cette évolution en forme de soumission explique à la fois l’évolution positive de Theresa May dans la presse anglaise et son accession éclair au pouvoir. On la compare maintenant à Angela Merkel, plus sentimentale que Margaret Thatcher, et auréolée aux yeux du système de son soutien à l’immigration. Comme elle fille de pasteur née dans les années cinquante, elle occupe un centre droit qui peut tout dire et à qui l’on peut tout faire faire en fonction du vent dominant. Comme elle c’est une négociatrice pragmatique, et dans le cas du Brexit, elle peut aussi bien invoquer l’article 50 ou ne pas l’invoquer. Bref, elle a perdu son image de méchante.
 
Et elle a été ainsi propulsée au sommet par le système. Etrange tout de même. Les partisans plébiscités du Brexit ont tous été mis sur la touche en quelques semaines. Boris Johnson, le maladroit, qui n’avait pas vu le poignard de ses amis, et Gove, mais surtout Andrea Leadsom, une vraie femme de droite, elle, tout à fait dans le goût de l’électorat du Brexit et que l’on pensait favorite chez les militants conservateurs : on ne l’a pas laissé aller jusque là. Députés et apparatchiks conservateurs l’ont flinguée avant. Et elle est rentrée dans le rang, sous le prétexte qu’une « campagne de neuf semaine serait mauvaise » pour le parti et pour la Grande Bretagne. Si l’on ajoute cela au cas de Jeremy Corbin au parti travailliste, et de Nigel Farrage à l’UKIP, il est clair que l’établissement entend mettre le sentiment populaire qui s’est exprimé par le Brexit au pas. Theresa May sera le premier ministre très comme il faut imposé par le système.
 

Pauline Mille.