Au Salon international du tourisme de Madrid, l’Espagne et le monde cherchent comment séduire la clientèle gay

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La capitale espagnole attend trois millions de visiteurs pour la World Pride fin juin.

 
Elle a un pouvoir d’achat et des loisirs qui en font un « gisement » des plus séduisants pour les vendeurs de voyages et autres offres touristiques : la clientèle gay constitue un « segment » à séduire et l’Espagne et dans le monde entier. Les marchands sont décidément intéressés et cela s’est fortement ressenti au Salon international du tourisme de Madrid, FITUR, où l’offre spécifique en direction de la communauté LGBT était au centre des préoccupations.
 
Le secteur des voyages et du tourisme en Espagne veut donc renforcer son offre. L’idée est de multiplier les types de séjours en proposant des « packages » de découverte de l’architecture ou de la nature – l’ornithologie gay, vous connaissiez ? – ou encore l’agritourisme. La région d’Estrémadoure, à l’ouest, a particulièrement travaillé sur l’accueil des LGBT, depuis qu’un homme politique local a tenu des propos « homophobes ». La ville provinciale de Badajoz, non loin de la frontière portugaise, affichait des posters de ses « gay prides » dans la section du FITUR dédiée au tourisme LGBT où les uns et les autres vantent leur accueil « gay-friendly ». « Le volume nous intéresse », a indiqué Hugo Alonso de l’agence de promotion du tourisme de la région. Selon lui, les gays et lesbiennes représentent 10 % de la clientèle touristique.
 

Une section du Salon international du tourisme de Madrid pour la clientèle gay

 
Question d’argent, donc. Pour Juan Pedro Tudeal, de Diversity Consulting International, une société hispanique de conseil aux entrepreneurs désireux d’attirer la clientèle gay, ces touristes ont « davantage de revenu disponible » parce qu’il y a moins de couples avec enfants. Et ils dépensent même davantage « lorsqu’ils se savent acceptés », assure Thomas Bomkes de Diversity Tourism.
 
Une agence onusienne, l’Organisation mondiale du tourisme, a d’ailleurs noté dans un récent rapport qu’« il est indéniable » que les gays « constituent un segment dynamique et influent dans le secteur du tourisme ».
 
A Madrid, on estime ainsi que les recettes touristiques liées à la Gay Pride ont représenté en 2016 quelque 150 millions d’euros. 2017 devrait assurer des revenus encore plus importants, alors que la capitale espagnole doit accueillir la « World Pride », avec une participation estimée à 3 millions de personnes. La compagnie aérienne Iberia et les hôteliers de Madrid proposent déjà des offres spécifiques « LGBT »…
 
Les stations balnéaires espagnoles cherchent depuis longtemps à profiter de l’aubaine en organisant des Gay Pride à répétition, de préférence hors saison : à Maspalomas aux Canaries, il y en a trois par an. Les retombées sont confortables : 20 millions d’euros par manifestation.
 

L’Espagne veut séduire la clientèle gay, au fort pouvoir d’achat

 
On note en effet que les couples homosexuels ont davantage la possibilité de voyager hors saison : pas besoin d’attendre les vacances des enfants ! Avec les nouvelles mesures en faveur de l’adoption gay et les procréations médicalement assistées, cela est aujourd’hui un peu moins vrai, mais il reste que les « foyers » homosexuels sont plus aisés. Si les opérateurs de tourisme ont tout de même un souci, c’est que les gays sont en moyenne d’un niveau culturel plus élevé, « très éduqués » comme le dit Bomkes, et donc plus enclins, explique-t-il, à organiser leur propre voyage plutôt que de faire confiance à une agence offrant des produits clefs en mains.
 
Aujourd’hui, le nouveau marché à conquérir est celui des lesbiennes, qui à la différence des hommes, friands de tourisme urbain, recherchent des séjours au grand air, axés sur la culture ou la gastronomie.
 
Les familles avec enfants, moins éduquées sans doute, qui ont moins d’argent pour les loisirs et moins de disponibilités pour voyager, ne sont décidément plus à la mode.
 

Anne Dolhein