Le TPP – Partenariat Trans-Pacifique – adopté sans la Chine – et sans le Congrès américain

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Le Partenariat Trans-Pacifique (TPP) a été finalisé lundi, au bout de sept jours de négociations. Les ministres du commerce des douze pays d’Asie-Pacifique sont arrivés à un compromis sur ce traité de libre-échange qui vise à établir des normes communes pour favoriser et étendre le commerce international. Des années, qu’Obama tente de l’imposer, dans un projet tout mondialiste qui revisite tout l’ancien réseau d’échanges… Il y est arrivé, mais l’opinion américaine et quelques éléments du Congrès ruent dans les brancards – bien que la Chine ne fasse pas (encore) partie de l’accord.
 
A l’administration Obama, désormais, de convaincre le Congrès de voter ce TPP bien obscur – un vote qui aura lieu en février 2016, en pleine campagne électorale présidentielle…
 

TPP : le libre-échange « du XXIe siècle »

 
Ce sera la plus vaste zone de libre-échange au monde : elle concernera 40 % de l’économie mondiale. La présidente du FMI, Christine Lagarde a salué « un événement très positif », dans ce libre-échange « du XXIe siècle » qui englobe l’Australie, le Brunei, le Canada, le Chili, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour, les États-Unis et le Vietnam. « Un accord qui va créer des emplois, mener à une croissance durable, promouvoir un développement équitable et développer l’innovation dans la région Asie-Pacifique », a affirmé le négociateur américain, se souvenant des discours servis aux Européens.
 
Les pourparlers furent pourtant difficiles. Les uns voulaient conserver la propriété intellectuelle de leurs brevets concernant les nouveaux médicaments issus des biotechnologies, les autres cherchaient à protéger leurs productions nationales laitières… Les concessions, pour ouvrir de façon substantielle les différents marchés, furent obligées.
 

Pas d’examen législatif sérieux pour le Partenariat Trans-Pacifique

 
Obama a salué la conclusion d’un accord qui reflète, selon lui, « les valeurs américaines ». Mais, vu le pouls de l’opinion américaine et la virulence de certains politiques, on ne peut qu’en douter… Une seule chose est certaine dans cette obscurité voulue qui entoure le TPP : tout cela s’est fait sans les Américains.
 
Déjà, le 18 juin dernier, avait été votée la Trade Promotion Authority (TPA) qui fournit à l’exécutif une procédure d’adoption accélérée : désormais, le Congrès sera dans l’obligation d’accepter ou de rejeter en bloc tout accord de libre-échange conclu d’ici 2021 – sans amendement possible.
 
Le « fast track » faisait ainsi céder au Congrès une partie de son pouvoir au Président. (Notons qu’il concerne les trois grands accords commerciaux que sont le Partenariat Trans-Pacifique (TPP), le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (T-TIP) et l’Accord sur le Commerce des Services (Tisa) – 90 % du PIB mondial à tout le moins)
 

Adhésion aveugle du Congrès américain…

 
Surtout, le Congrès va devoir voter un texte dont une page peut-être, seulement, a été rendue publique. Même aujourd’hui, alors qu’un accord final a été trouvé, l’administration américaine refuse d’en publier le texte intégral, invoquant des raisons techniques…. Le fera-t-elle pour l’examen du Congrès dans cinq mois ? La question se pose.
 
Quelques bribes néanmoins en ont été arrachées. Grâce à la « Freedom of Information Act » (FOIA) (« Loi pour la liberté d’information »), a été récemment révélé qu’un chapitre entier traite des dispositions d’entrée de travailleurs étrangers temporaires – forcément assouplies. Que le TTP est un « accord vivant » et que, donc, il peut être modifié à la suite de son adoption : tout nouveau membre du partenariat serait ainsi en mesure de modifier certains points cruciaux de la politique d’immigration de l’Amérique.
 
La perspective en est évidemment mondialiste. Et tend à limiter, pour l’avenir, les capacités de réglementation politique du Congrès.
 

Encore un moyen de s’opposer ?

 
Mike Huckabee, candidat républicain à la présidentielle, a fustigé, hier, un accord « contre les travailleurs américains », « un document pour des initiés, des groupes d’intérêt »…
 
Y a-t-il encore moyen de le bloquer ? Le sénateur républicain Jeff Sessions, interrogé par Breitbart, pense que oui. Historiquement, aucun accord de commerce n’a jamais été contré par le Congrès avec la procédure de « fast track » : il faudrait générer suffisamment d’opposition pour obtenir la majorité nécessaire.
 
Mais, alors que leurs électeurs ne les suivent pas sur ce point, la majeure partie des élus républicains ne sont pas opposés au TPP. Et pratiquement tous leurs principaux candidats à la présidentielle, y compris Jeb Bush et Marco Rubio soutiennent l’accord commercial – à l’exception de Donald Trump.
 

La Chine, soigneusement éliminée – pour l’instant

 
Pourquoi le Congrès a cédé en juin sur la TPA et cédera très probablement en février en signant le TTP, c’est que la Chine a été assez médiatiquement et très opportunément exclue de l’accord – ce qui ne pouvait que déclencher le soutien des conservateurs.
 
Obama a doctement argumenté : « Alors que plus de 95% de nos clients potentiels vivent en dehors de nos frontières, nous ne pouvons pas laisser les pays comme la Chine écrire les règles de l’économie globale. Nous devons écrire ces règles, en ouvrant nos produits américains à de nouveaux marchés et en établissant des hauts standards de protection des employés et de sécurité environnementale ».
 
De fait, le TPP promeut en particulier les droits de propriété intellectuelle et dénonce le protectionnisme, des sujets qui vont contre les principes communistes chinois. Beaucoup le voient comme une réplique à la nouvelle « Route de la Soie » du président Xi Jinping qui veut réorganiser tout le continent eurasiatique autour de la Chine. Un négociateur de l’accord a eu ce mot : « C’est un club dont la Chine est, de fait, bannie ».
 
Pourtant, le très influent think-tank mondialiste, le Council on Foreign Relations (CFR), qui, depuis des décennies détermine la politique tant des Républicains que des Démocrates, avait bien appelé en juin dernier à inclure cette Chine communiste au TPP. Obama n’a fait que jouer sur du velours pour mieux emporter l’adhésion – l’opinion mondialiste n’était encore pas assez mûre. Le TTP aura tout le temps d’évoluer…
 

Clémentine Jallais