Villiers, Trump, Netanyahu : Macron président, mission impossible et en même temps mission réussie

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Impossible de ne pas admirer le président Jupiter : il réprimande le général de Villiers, récupère Trump, caresse Netanyahu. Plus régalien que Macron tu meurs. Mais en même temps, l’état de grâce commence à finir. Et si une partie de sa mission, réussie, était de déconsidérer la fonction qu’il occupe ?
 
Parmi les ruptures annoncées par En Marche, figurait pour Emmanuel Macron l’obligation d’être une président qui ressemble à un président. Après Calamity Flamby, l’homme casqué qui allait à l’aube porter à scooter des viennoiseries à sa greluche, après le boudiné portant cravate de travers et montre à l’envers, l’homme qui attirait l’averse et la foudre, a succédé le chef des armées en son command-car, le roi soleil qui reçoit Poutine à Versailles, le jeune warrior qui broie la main de Trump, lui tapote l’épaule, le ventre, le bras. Au vieux Vitellius qui au sortir de longs banquets s’adonnait à de confuses parties de billard politique succède un jeune Auguste qui prétend commander nettement, au vu de tous.
 

Pourquoi la mission de Macron est impossible

 
Bref, après un président Duracell, le lapin Sarkozy, et un président nigaud, le normal Hollande, voici notre président Jupiter. Régalien, vous dis-je ! Gala, Paris Match, BFM et Roudoudou les belles images nous l’ont complaisamment montré à pied, à cheval et en voiture, jouant au tennis avec les handicapés ou embrassant des mémés. Tonnant parfois, redoutable à l’occasion, olympien quand il lui chante, indomptable toujours. Mais Zeus finit toujours par descendre sur terre, et, la mythologie nous le rappelle, c’est alors que les choses se gâtent pour lui.
 
De récentes affaires, Ferrand, Bayrou, Sarnez, l’ont montré. Et le débat sur la fiscalité. Chacun sait bien qu’une fois la canicule finie, bien avant l’été indien, avant même la rentrée, les classes moyennes seront mangées, comme la chèvre de monsieur Seguin. Le vrai plaisir de l’affaire est qu’il n’y a pas de surprise. Si la mission de Macron était de résoudre les problèmes qui se posent à la France ce serait une mission impossible : le président est un artiste, pas un magicien.
 

Mission impossible pour le chef d’état-major des armées

 
Sans attendre la trêve d’août, le temps a commencé à se gâter. Le chef d’Etat major des armées, Pierre de Villiers, le frère de l’autre, a rué dans des brancards trop étroits, à cause d’une affaire de budget. L’argent, parmi ses vertus, à celle-ci : c’est une mesure de l’impossible.
Sur un budget déjà étique, les armées se sont fait piquer huit cent millions d’euros par un arbitrage de Bercy : des crédits prévus pour un maigre investissements sont réaffectés pour payer des opérations extérieures très gourmandes et qui n’avaient pas de financement (ce qu’il y a de rigolo, c’est que des gens qui travaillent comme ça reprochent à Marine Le Pen son manque de sérieux en matière économique).
 

Villiers et le président : le temps de l’affrontement

 
Pour devenir chef d’état major, il faut savoir avaler les couleuvres en silence, mais il y a des moments où trop c’est trop, et Pierre de Villiers a prévenu qu’il ne « se laisserait pas baiser ». C’est une manière de racheter des années de complaisance en tombant noblement : l’honneur d’un général, comme celui d’un capitaine, est parfois de relever la tête. Aussitôt Macron Jupiter a parlé de la couper. Il a dressé un menton proprement mussolinien pour rappeler que « le chef des armées » c’est lui, qu’il y a une chaîne de commandement et que quand il y a un problème entre le président et le chef d’état major, celui-ci s’en va. Puis Castaner et Edouard Philippe ont mis de l’huile dans le circuit, rappelé la haute estime où le président tenait Villiers, et en même temps souligné les exigences du « management ». Mais que Villiers se soumette ou qu’il se démette le résultat sera le même, confiance rompue entre l’armée et son chef. Après l’affaire Sylvie Goulard, ça bouge à la Défense : on n’avait pas vu ça depuis la guerre d’Algérie et l’affaire Dreyfus ! Macron fait une démonstration devant ses peuples admiratifs de l’autorité de l’Etat et de sa propre autorité sans se rendre compte qu’il tourne à vide.
 

Macron savoure la belle histoire du président Trump

 
Cette histoire Villiers l’enquiquine. Une fête nationale réussie, c’est pour les enfants les lampions, les pétards, les feux d’artifice, et pour le président adolympien, l’occasion de lampions, de pétards, de feux d’artifice diplomatiques à l’échelle de la planète. Il avait déjà impressionné nos foules avec Poutine à Versailles, voilà maintenant Trump sur la Concorde et sur la tour Eiffel, avec ses limousines et ses gardes du corps. C’est plus cool que Game of Thrones. Trump et le défilé.  Trump et les facéties musicales des militaires. Trump et l’environnement surtout. Notre Macron va le faire revenir sur son retrait de l’accord de Paris. Il lui explique. Il ne désespère pas de « le convaincre ». Il relève explicitement que les villes, les Etats, les industries passent outre la décision de l’Etat fédéral, que celle-ci est donc vaine et le pouvoir de Trump de pure apparence. Il a découvert la lune, le président Macron. Et bien sûr, Trump était si nigaud qu’il n’avait pas pris garde à tout cela, ça lui ouvre les yeux, les arguments de notre Jupiter, et il va voir ce qu’il va pouvoir faire pour revenir par la fenêtre, et Nicolas Hulot juge tout cela « pertinent », et le public est prié d’y croire. Macron fait un tour de l’arène en saluant. C’est si beau la fête nationale, la Seine qui miroite de fusées sous le ciel et les histoires qu’on raconte au peuple. Rien n’y est impossible.
 

Faire plaisir à Netanyahu : mission réussie

 
Bien sûr, les ronchons  noteront que les Etats-Unis ne sont pas encore sortis de l’accord de Paris, qu’ils ne sauraient en sortir avant 2020, que rien n’indique ni les convictions profondes ni les intentions de Trump en la matière, et qu’en particulier le président américain sait parfaitement que l’Etat fédéral n’a qu’une influence limitée sur la réalité des politiques pratiquées aux Etats-Unis en matière d’environnement. Mais la Story racontée par Macron est si réussie qu’on a envie d’y croire.
 
De même le couplet sur la rafle du 16 juillet 1942. Cela fait plaisir à Benjamin Netanyahu. Macron Jupiter fait plaisir à tout le monde. Aux Algériens en leur parlant de nos crimes contre l’humanité. Aux musulmans en leur disant que l’islam n’est pour rien dans le terrorisme islamique. Aux migrants en leur ouvrant grand les portes. Aux Israéliens en leur parlant de la rafle du 16 juillet 1942. Sur cette rafle, soixante-quinze ans après, on pensait que tout avait été dit : Mitterrand, De Gaulle et les autres estimaient que la France n’en était pas responsable, Chirac défend depuis 1995 l’avis inverse, Macron vient de s’y ranger, on ne voit pas bien l’urgence de la chose, mais c’est compter sans Bibi Netanyahu : Bibi Netanyahu étant l’hôte de la France, il faut faire plaisir à Bibi Netanyahu. Ca fait partie du deal avec le pro-sioniste Trump.
 

Macron transforme la France en Camp du drap d’or

 
Avec Macron la France est transformée en un gigantesque et permanent Camp du drap d’or. Trump, Poutine, Netanyahu se succèdent et on leur sert dans la même vaisselle de vermeil à chacun la soupe qu’il préfère. Et en même temps on vend aux Français l’idée que la politique est affaire des grands de ce monde, qui prennent ensemble, pour les peuples qu’ils représentent, mais sans être mandatés, les décisions qui s’imposent à leur communauté d’esprits éclairés. C’est la gouvernance mondiale mise à la portée de Closer, Gala et Point de vue et images.
Le président de la république française devient ainsi une sorte de monsieur Loyal de l’Europe et du monde, ce qui flatte l’ego des spectateurs, tout en le privant du pouvoir que lui donnent l’histoire et la constitution, celui de souverain au nom du peuple. Il vide ainsi complètement la fonction présidentielle de son contenu réel et en même temps il donne un grand lustre de communication à sa nouvelle fonction qui est celle de gauleiter de la France et go-between entre les autres gauleiters des principaux pays d’Occident.
 

Macron réussit quand il réussit et en même temps quand il échoue

 
Mission réussie, mais en même temps mission impossible, car viendra un moment, où la réalité viendra bousculer ces belles images. Le scrogneugneu du général de Villiers en est le grincement annonciateur. C’est la limite de la stratégie Macron et en même temps c’en est le triomphe : car alors, après avoir vidé la fonction présidentielle de sa substance, il la discréditera aux yeux du peuple : le président Jupiter s’avouera impuissant à tenir ses promesses, à trouver la quadrature du cercle qu’il a annoncée, parce qu’elle est impossible. Alors les Français se détourneront un peu plus, déçus jusqu’à l’os, de la politique, et seront tout à fait prêt pour l’esclavage, pour la soumission à la gouvernance mondiale. L’échec programmé de l’autoritarisme de Macron est une propédeutique à notre avenir totalitaire.
 

Pauline Mille