En Écosse, le centre principal de l’industrie du whisky pourrait se voir encerclé par l’éolien

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En plein Speyside, région préservée des Highlands où l’industrie du whisky « coule » à flots, on commence à nourrir de sérieuses craintes. L’éolien se multiplie et menace les paysages, autant qu’il pourrait menacer désormais le tourisme. Au pays de l’Aberlour et du Glenfiddich, le « durable » finit par avoir mauvaise presse.
 

Boire du whisky et pêcher le saumon sauvage sur la rivière Spey

 
Joerg Bondzio est l’heureux fondateur et propriétaire d’une entreprise, Sporting Scotland, spécialisée dans le tourisme sportif. Il a su mettre à profit les merveilles naturelles et sauvages du Speyside, et nombre de touristes lui font confiance, venus du monde entier. Des touristes qui veulent goûter de grands whiskys, mais faire aussi du canoë et pêcher le saumon sauvage sur la rivière Spey…
 
Seulement, depuis ces dernières années, Bondzio regarde avec appréhension le nombre d’éoliennes se multiplier et changer la physionomie de ces paysages pour lesquels il a succombé il y a plus de vingt ans – il est allemand d’origine.
 
Les touristes risquent de déserter cette contrée de plus en plus saturée par l’éolien, une contrée qui pourrait se trouver véritablement encerclée dans un « anneau de fer » peu avenant et semblable à des milliers d’autres dans nos pays industrialisés.
 

Glenfiddich perd face à l’éolien

 
« Quand je lis les commentaires de nos clients, ils louent toujours la vue, étant à la campagne. Je ne sais pas ce qu’ils vont penser en regardant directement les éoliennes ». Joerg Bondzio subit déjà des turbines de près de 60 mètres de hauteur à moins de trois kilomètres de ses lieux d’activités : d’autres pourraient bientôt se construire, deux fois plus près…
 
« Les propriétaires fonciers se font énormément d’argent avec, les développeurs en retirent aussi beaucoup d’argent, mais pour les petites entreprises, ils sont au mauvais endroit. C’est juste pas de chance pour nous ». Il y a actuellement 156 éoliennes opérationnelles à Moray qui mesurent plus de 50 mètres de hauteur. On estime qu’il y en a encore 106 qui ont déjà reçu un permis de construire mais qui n’ont pas encore été construites.
 
La semaine dernière, les propriétaires de Glenfiddich, William Grant et Sons, ont perdu une bataille juridique emblématique pour mettre fin à la construction du parc éolien de Dorenell (59 turbines de 120 mètres de hauteur dans le Banffshire), au motif que ce dernier serait trop près de sa distillerie à Dufftown et que cela gâterait la campagne pour les visiteurs – rien n’y a fait.
 

Une région saturée par la quantité de technologie dite « renouvelable »

 
Le député de la circonscription écossaise de Moray, Douglas Ross, se dit aussi « de plus en plus préoccupé ». « Nous devons garder à l’esprit l’importance de l’industrie du tourisme pour Moray et le nombre d’emplois qui en dépendent – et l’impact négatif que le développement excessif du paysage peut avoir sur ce secteur. Il peut être difficile de « monétiser » la valeur d’un paysage préservé, mais cela ne signifie pas que son importance doive être négligée ».
 
« Personne ne vient en vacances pour regarder un paysage industrialisé [qu’on a aussi chez soi]. Les entreprises, grandes et petites, sont maintenant touchées ». Pour Douglas Ross, nous sommes passés « du paysage qui a des parcs éoliens à un paysage de parc éolien ».
 
D’autre part, il faut savoir que les décisions prises par le département de planification du Conseil de Moray concernant les parcs éoliens sont systématiquement annulées, en appel, par le gouvernement écossais. Niveau démocratie et écoute des communautés locales, c’est un abus remarquable voire un scandale.
 

L’Écosse mène-t-elle la bonne bataille ?

 
L’Écosse est une championne de l’éolien et tient à conserver sa place – au détriment de ses vrais atouts. En 2016, elle cumulait 3 400 éoliennes terrestres, contre 1 657 en 2012 (soit une nouvelle éolienne par jour en moyenne). Plus d’un millier d’autres sont prévues.
 
Et elle vient tout juste d’inaugurer, une première mondiale, un parc de cinq éoliennes installé en pleine mer du Nord, à 25 kilomètres au large de ses côtes nord-est : une capacité totale de 30 mégawatts et un chantier à 214 millions d’euros qui compte exploiter les vents du large, plus puissants et plus réguliers que ceux de la côte.
 
La pollution visuelle sera, certes, moindre. On est moins certain du rapport qualité/prix.
 

Clémentine Jallais