Les enclaves sont propices à l’immigration. Les villes portuaires de Ceuta et Melilla, petite entités espagnoles sur la côte marocaine, n’échappent pas à la règle. En 2014, plus de 20.000 migrants ont tenté l’assaut de leurs barbelés – près de 5.000 y sont parvenus. Une toute récente loi, en Espagne (26 mars) autorise les forces de l’ordre dans ces enclaves à repousser les étrangers détectés sur la ligne de démarcation, lorsqu’ils tentent de franchir les éléments d’endiguement frontaliers pour traverser la frontière de manière irrégulière. La Commission européenne a indiqué jeudi qu’elle examinait la légalité de ces « refoulements à chaud », leur compatibilité avec Bruxelles, dans ce principe d’ouverture de plus en plus accentué, de plus en plus permissif, qui a fait de l’Europe un véritable aimant.
L’Espagne adopte les « refoulements à chaud »
En juillet 2014, une délégation du Comité pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe s’est déjà rendu à Melilla afin d’analyser la situation de visu. Elle en avait conclu qu’il n’y avait « pas de base juridique » pour permettre aux autorités espagnoles d’expulser les immigrants vers le Maroc, sans les soumettre d’abord au processus d’identification et les assurer de certaines garanties comme celle d’un interprète. Aujourd’hui, le commissaire européen aux Affaires intérieures, Dimitris Avramopoulos, se rend carrément sur place après un entretien lundi matin à Madrid avec le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy.
Pour le Conseil de l’Europe, ces retours à chaud « violent » tout simplement la loi. La Commission rappelle que « toute mesure de surveillance des frontières doit être (…) conforme au respect des droits fondamentaux et aux principe de non-refoulement ». Elle encourage à utiliser « des mesures alternatives basées notamment sur la coopération et l’échange d’information », lorgnant d’un mauvais œil sur les clôtures de barbelés de six mètres de haut à Ceuta, ce « mur de la honte » comme ont dit certains, sur lequel s’asseyent toutes les nuits les candidats au passage…
Notons, pour le sourire, qu’elle se réjouit de l’installation récente, du côté marocain de la frontière, de bureaux pour des demandes d’asile à Ceuta et Melilla… et réclame en même temps à l’Espagne de « prendre les mesures nécessaires pour assurer que les Forces auxiliaires marocaines n’entrent pas sur le territoire espagnol et qu’aucun étranger ne leur soit livré » en raison du « risque de mauvais traitements »… Il semble que tout le monde ne s’impose pas la même politique en matière d’immigration.
Immigration croissante : le rapport de la Cour des Comptes
La pression migratoire est pourtant croissante, en particulier dans cette Méditerranée qui a vu, rien que du 10 au 12 avril, en l’espace d’un seul week-end, plus de 8.000 migrants arriver sur les côtes italiennes via 42 bateaux – 400 d’entre eux se sont noyés. Tous les jours, de nouvelles opérations de sauvetage sont en cours – et les flux provenant de Libye ne sont pas près de s’arrêter. En 2014, ils ont été 276.000 à entrer illégalement dans l’Union européenne, soit trois fois plus que l’année précédente.
Le coût de ces arrivées permanentes n’est plus à démontrer. Un tout récent rapport de la Cour des Comptes, récupéré à l’avance et publié lundi par Le Figaro, dénonce l’incurie totale dans la gestion française des demandeurs du statut de réfugiés et les incroyables lacunes de la réforme Valls-Cazeneuve, qui est arrivée mercredi en commission des lois au Sénat. Les magistrats chiffrent le coût de l’asile à plus de 2 milliards d’euros par an pour la collectivité nationale, le double de ce qu’alléguaient jusque-là les autorités. Car, in fine, si « 75% des demandes d’asile sont rejetées annuellement en moyenne (…), malgré l’obligation de quitter le territoire français qui leur est notifiée, seul 1% des déboutés sont effectivement éloignés »…
Bruxelles forcera l’Espagne
Ainsi, « la politique d’asile est devenue la principale source d’arrivée d’immigrants clandestins en France ». « Tant que la question de l’organisation systématique et rapide de leur retour ne sera pas réglée, le système ne pourra fonctionner correctement ». Cette politique menée depuis des décennies en matière de protection des personnes persécutées, n’est « pas soutenable à court terme ». Entre 2007 et 2013, les demandes ont été multipliées par deux (66.000 en 2013) et la multiplication des conflits au Moyen-Orient et en Afrique laissent présager la suite.
Oui, c’est sûr, c’est un aspect « comptable » comme lui ont reproché de multiples associations… et comme viendra le faire à son tour le Conseil de l’Europe. Il y a une misère réelle, un désastre humanitaire terrible. Mais le soulagement de ces « fuyants » n’est pas le véritable objectif des politiques européennes et par-delà mondialistes qui nous les imposent, n’en déplaise à toutes les bonnes volontés qui veulent leur venir en aide.
Et Bruxelles forcera l’Espagne.