Face au Brexit, Donald Tusk propose à David Cameron un accord en trompe-l’œil

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David Cameron.

 
Le président du Conseil européen Donald Tusk a donc publié comme prévu le projet d’accord qu’il a négocié en début de semaine avec le Premier ministre britannique David Cameron. La série de réformes envisagées dans l’Union européenne par ce document pour contrer l’hypothèse d’un Brexit ne semble cependant pas suffisante aux partisans d’une rupture avec l’Union européenne, qui y voient plutôt un accord en trompe-l’œil qu’une réelle réponse à leurs inquiétudes.
 

L’accord convenu entre Donald Tusk et David Cameron

 
Les mesures proposées par Donald Tusk sont censées répondre aux quatre grandes questions que David Cameron avait posées à Bruxelles. Il y a premièrement le « frein d’urgence » qui avait reçu, dès dimanche soir, l’assentiment du Premier ministre britannique, et qui consisterait en un mécanisme de « sauvegarde » pour limiter, pendant une période pouvant aller jusqu’à quatre ans, les aides sociales aux travailleurs migrants intra-européens qui viennent à s’installer sur le sol britannique, et ce en cas « d’afflux de travailleurs d’autres Etats-membres d’une magnitude exceptionnelle ». Ce mécanisme pourrait être employé dans les autres pays appartenant à l’Union européenne.
 
En deuxième point, le président du Conseil européen a proposé un système de « carton rouge » que les parlements nationaux pourraient utiliser contre toute nouvelle législation avancée par la Commission européenne, qui serait alors bloquée à la condition qu’une majorité de 55 % des parlements nationaux le décide, ce qui nécessite en l’état actuel l’accord de seize parlements sur vingt-huit contre la Commission européenne.
 

« Droits et compétences »…

 
En troisième point, Donald Tusk a promis que Bruxelles respecterait « les droits et compétences » des pays n’appartenant pas à la zone euro, par le biais d’un autre « mécanisme » par lequel les neuf pays qui n’ont pas adopté la monnaie unique pourront faire part de leurs inquiétudes et recevoir « les assurances nécessaires » sur les décisions des dix-neuf autres Etats de l’Union européenne qui constituent la zone euro.
 
Mais ce mécanisme, pour autant, « ne constitue pas un veto et ne pourra retarder des décisions urgentes » en cas de crise financière, a précisé le président du Conseil européen.
 
Enfin, sur le quatrième point, l’Union européenne s’engage à favoriser la compétitivité des Etats, notamment en simplifiant les législations à ce sujet et en réduisant les frontières pour le commerce.
 
On notera que, malgré – ou peut-être à cause… les difficultés qu’ont rencontré Donald Tusk et David Cameron dans leurs discussions, ces propositions demeurent très vagues. Ce qui était à prévoir, puisque les partenaires de Londres avaient prévenu d’emblée qu’ils refuseraient que soient touchés aux principes, déclarés donc intangibles, de l’Union européenne. Si le projet était adopté en l’état, les problèmes viendraient donc à se poser au moment de son application.
 

Un trompe-l’œil face au Brexit

 
En attendant, ce flou devrait favoriser les discussions avec les autres Etats-membres de l’Union européenne, et permettre peut-être de parvenir à un accord lors du prochain sommet européenne qui doit se tenir dans quinze jours à Bruxelles.
 
David Cameron paraît néanmoins satisfait, qui a évoqué de « véritables progrès », tout en considérant qu’il restait « encore du travail à faire ».
 
Il faut bien comprendre que, dans le fond, le Premier ministre britannique souhaite tout autant que ses partenaires européens que son pays demeure au sein de l’Union européenne.
 
Il a même reçu, dans cette optique, le soutien du président américain Barack Obama. A l’occasion d’un échange téléphonique mardi, celui-ci a en effet affirmé le soutien constant des Etats-Unis pour un Royaume-Uni fort dans une Union européenne forte…
 
On ne sait trop sur quoi se fonde le président américain pour évoquer, à l’heure actuelle, une Union européenne forte. Mais il est bien sûr évident que la défection britannique lui serait un coup rude, et peut-être même fatal.
 

L’opposition britannique

 
Bref ! tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes s’il n’y avait l’opinion britannique. Les plus eurosceptiques sujets de Sa Gracieuse Majesté ont commencé à marquer leur opposition au projet de Donald Tusk qui leur paraît être – et ils n’ont pas tort – une simple liste de promesses sans efficacité concrète.
 
Qui plus est, ces mesures ne doivent entrer en vigueur que dans le cas où le Royaume-Uni déciderait de rester dans l’Union européenne.
 
Autrement dit, elles ne seraient appliquées qu’après le fameux referendum sur le Brexit, qui devrait se tenir, si l’on en croit les dernières discussions sur le sujet, fin juin.
 
On comprend que les Britanniques se montent dubitatifs. D’une part, il leur apparaît que ces mesures n’en sont pas vraiment. Et en outre, elles semblent surtout un appât à leur intention.
 
Pas de quoi s’enthousiasmer…
 

François le Luc