Blasphème au Vatican : le pape François a-t-il vraiment mal parlé de la Très Sainte Trinité ?

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Rencontre entre le pape François et les participants à une réunion du groupe Ethique et théologie catholique au sein de l’Eglise mondiale le 17 mars 2017.

 
La revue catholique américaine Crux, qui n’est pas spécialement réputée pour son traditionalisme, a publié le 25 mars sous la plume autorisée d’Austen Ivereigh le compte-rendu d’une réunion qui s’est tenue le 17 mars au Vatican entre le pape François et les participants à une réunion du groupe Ethique et théologie catholique au sein de l’Eglise mondiale. Ce fut l’occasion pour la première diplômée Docteur d’État de l’université pontificale catholique d’Argentine, Mme Emilce Cuda, de parler du pape et des mots qu’elle avait pu échanger avec lui. Elle attribue au pape François ce qui en toute logique et foi, est un gravissime blasphème à l’égard de la Très Sainte Trinité. Austen Ivereigh, qui n’est pas non plus réputé pour son opposition au souverain pontife, rapporte les mots sans la moindre réserve ni interrogation.
 
Selon Emilce Cuda, donc, qui vient de publier un livre sous le titre Para leer a Francisco (« Pour bien lire François »), raconte qu’au cours d’une visite où elle s’est sentie très impressionnée par l’office papal rempli par son ancien évêque de Buenos Aires, François les a encouragés à étudier l’éthique théologique dans le cadre d’une « herméneutique de l’unité dans la différence ». C’est en effet leur point de vue, à ces quelque 1.500 théologiens et spécialistes d’éthique catholiques du monde entier qui s’apprêtent à se réunir à Sarajevo, une ville à 80 % musulmane… c’est un choix délibéré.
 

Un blasphème attribué au pape François par une théologienne spécialiste du populisme

 
Cette « unité dans la différence » fait partie des sujets de prédilection du pape François, souligne Ivereigh : « La création de processus où le Saint Esprit établit de nouvelles synthèses à partir de disparités et de désaccords ». Voilà qui n’est pas sans rappeler la dialectique hégélienne et les trois points maçonniques symbolisant thèse, antithèse et synthèse.
 
En plaisantant, le pape a dit, selon Mme Cuda : « A l’intérieur de la Sainte Trinité, ils se disputent tous derrière les portes closes, mais en dehors ils donnent l’image de l’unité ».
 
On peine franchement à coucher une telle phrase sur le papier. Comme si la Sainte Trinité que relie un amour infini, dans une communion qui dépasse infiniment la moindre idée que nous puissions en avoir, puisse dans sa majesté divine avoir des opinions différentes puis afficher une entente de façade ! Porter l’anthropomorphisme à un tel minable niveau est à l’évidence un blasphème, même sur le ton de la plaisanterie, un blasphème qui « contredit nombre de dogmes qui se rapportent à la perfection infinie de Dieu, la parfaite harmonie de sa volonté, son infinie bonté », comme l’observe le site novusordowatch. Et il n’est nul besoin de partager le sédévacantisme de ce dernier pour constater, avec lui, l’horreur.
 
Il ne s’agit que d’une parole attribuée, et cela mérite d’être souligné avec plus de vigueur que ne l’a fait Austen Ivereigh.
 

Au Vatican, le pape François accueille des proches de la théologie de la libération

 
Puisque nous en sommes là, signalons qu’Emilce Cuda, qui a raconté l’anecdote avec délectation, ajoute que la comparaison lui avait fait penser à quelque chose de plus terre-à-terre, une phrase attribuée à Juan Domingo Peron : « Dans le péronisme, quand ils entendent des chats hurler, les gens dehors pensent qu’ils se battent ; en réalité, ils se reproduisent ». C’est élégant.
 
Mais pourquoi s’en émouvoir en effet lorsque le sujet principal de la conversation du pape avec la délégation de théologiens apportés sur l’immigration, les ponts et les murs.
 
Passons sur la discussion plus ou moins étendue sur le populisme qui se trouve être la spécialité de Mme Cuda. Elle est elle-même disciple d’Ernesto Laclau, militant de la gauche révolutionnaire durant sa jeunesse, toujours resté socialiste, considéré comme un post-marxiste non sans lien avec la théologie de la libération. Au sein de son mouvement, Ethique théologique catholique au sein de l’Eglise mondiale, Cuda voisine avec d’autres tenants de cette théologie, Gustavo Gutierrez et Juan Carlos Scannone, lui-même en pointe dans la lutte pour l’accès à la communion des divorcés remariés dans le cadre d’Amoris laetitia.
 

La Très Sainte Trinité, unie par une même volonté, un même amour immuables

 
Interrogée à la suite de cette rencontre, par un média argentin, sur le populisme – qu’elle définit comme la prise en compte, hors partis politiques et hors syndicats de demandes populaires non satisfaites – Mme Cuda salue en François un pape de la continuité. « Il revient au principe fondamentaux du christianisme, à l’importance de l’homme, de sa souffrance, du pardon. Il a un discours contemporain, amène et simple. Tous peuvent le comprendre. Avant, les encycliques étaient quasiment incompréhensibles pour le commun. Aujourd’hui il n’y a pas de place pour le doute, le pape est complètement clair ».
 
Une pique contre les auteurs des Dubia ?
 
Et elle poursuit, en commentant les « très dures critiques » qui s’adressent à lui depuis « certains secteurs conservateurs » : « Il y a de l’opposition comme dans n’importe quelle institution. Mais celui qui a remporté la légitimité populaire, il est très difficile de le déloger. Le pape a obtenu un consensus mondial incroyable. Il est dans la presse tous les jours à cause de ce qu’il dit. S’il est vrai qu’il a des opposants, il est vrai aussi qu’il a une grande légitimité, pas seulement parmi les catholiques mais aussi parmi les noms catholiques. Il jouit d’un consensus mondial ».
 
A sa place, cela m’inquiéterait.
 

Jeanne Smits