Le nouvel Institut Jean-Paul II pour les sciences du mariage et de la famille :
le point de vue des évêques allemands

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Après le démantèlement de l’Institut Jean-Paul II pour le mariage et la famille, remplacé par une nouvelle instance plus sociologique toujours présidée par le très controversé Mgr Vincenzo Paglia, le site OnePeterFive propose un éclairage intéressant en livrant le point de vue officiel de l’Eglise catholique allemande sur cette véritable révolution.
 
Dès l’annonce de l’information, mardi, le correspondant du National Catholic Register à Rome, Edward Pentin – connu pour le sérieux de ses analyses – désignait les pressions allemandes en vue de cette refondation qui affecte un institut jusqu’ici viscéralement attaché à la diffusion de la véritable doctrine de l’Eglise sur le mariage.
 
Citant des « sources fiables », Pentin a expliqué que certains membres de l’épiscopat allemand ne cachaient pas leur frustration au vu de la lenteur des réformes du pape François qu’ils pressent de passer à la vitesse supérieure. D’où les deux récents Motu proprio, l’un sur la dévolution de la responsabilité des traductions liturgiques aux épiscopaux locaux (Magnum principium, paru la semaine dernière), l’autre, paru mardi mais daté du 8 septembre, sur la famille, Summa familiae cura (analysé ici par reinformation.tv). Leur objectif ? assurer que ces réformes deviennent « irréversibles ». Ils veulent autant que possible selon les sources citées par Edward Pentin les faire « graver dans le marbre, éventuellement au moyen d’une Constitution apostolique ».
 

L’Institut Jean-Paul II capté par la pensée allemande

 
C’est une révélation de taille, note Maike Hickson pour OnePeterFive, qui n’a pas de quoi surprendre vu le rôle joué par les prélats allemands lors de la manipulation des synodes sur la famille et son « produit », Amoris laetitia.
 
Dès mercredi, sur le site officiel de la conférence épiscopale allemande, Katholisch.de, un éditorial signé de son rédacteur principal, Thomas Jansen, saluait la nouvelle initiative du pape François, confirmant les craintes de voir l’institut pontifical pour la famille dériver vers le relativisme qu’encourage fondamentalement Amoris laetitia.
 
Le titre de l’article en dit long : Ein thinktank fur “Amoris laetitia”. C’est une frauduleuse captation d’héritage de l’Institut Jean-Paul II aujourd’hui mobilisé pour servir de boîte à idées pour la mise en œuvre de l’exhortation post-synodale qui a tant d’égards contredit les rappels doctrinaux de Jean-Paul II en matière de morale conjugale.
 
Jansen le dit sans détour : « L’Institut Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille était connu pour être un bastion de résistance face au programme de miséricorde de François. Voici que le pape l’a dissous et en a fondé un nouveau. »
Tout aussi clairement, il renchérit : « Le pape François efface… un bastion de ceux qui le critiquent en matière de mariage et de famille. » Pour Jansen, François dans son le Motu proprio « ne cache pas le fait que l’orientation antérieure de l’institut était à son sens trop conservatrice » puisque Summa familiae cura met en garde contre le fait de se limiter « aux formes et aux modèles du passé ».
 

Les sciences du mariage et de la famille à la sauce “Amoris laetitia”

 
L’éditorialiste allemand rappelle que deux professeurs de l’Institut Jean-Paul II – ancienne manière bien sûr –, Don Juan José Pérez-Soba et le Pr Stephan Kampowski ont écrit juste avant le premier synode sur la famille un livre réfutant la proposition Kasper en faveur des divorcés remariés. Ils avaient été alors chaleureusement félicités par le cardinal Georges Pell, qui avait eu ces mots sans doute prophétiques : « Nous devons travailler pour éviter une répétition de ce qui s’est passé après la promulgation d’Humanae vitae en 1968 »…
 
La préparation de la manœuvre ne date pas d’hier : c’est dès août 2016 que le président, Mgr Livio Mélina, avait été remplacé par Mgr Pierangelo Sequeri, tandis que le grand chancelier, le cardinal Agostino Vallini cédait la place à Mgr Paglia. Les deux hommes sont connus pour leur soutien à la proposition Kasper de permettre l’accès à la communion des divorcés remariés.
 
Katholisch.de se réjouit également des nouvelles orientations de l’Institut théologique pour les sciences de la famille et du mariage en confirmant ce que nous subodorions :
« En ce qui concerne le contenu, la nouvelle fondation doit avoir une orientation plus large. D’anciens instituts avaient été critiqués pour sa fixation excessive sur les questions de la procréation et de la contraception. Paglia vient d’annoncer que le nouvel institut s’occupera également de la relation entre les générations – un thème cher au cœur du pape – ainsi que des effets de l’économie sur les thèmes familiaux et écologiques. »
 

Un think-tank pour “Amoris laetitia”

 
Selon Maike Hickson, cela semble indiquer que le nouvel institut va reprendre à son compte la « discussion révolutionnaire qui se trouve dans le rapport majoritaire de la Commission pontificale sur le contrôle des naissances qui a été bloquée par la promulgation d’Humanae vitae en 1968 ». Commission dont Paul VI avait choisi de rejeter les conclusions favorables à la contraception, préférant réaffirmer – grâce notamment à l’insistance d’un certain Karol Wojtyla – l’enseignement pérenne de l’Eglise.
 
La conclusion de l’article de Thomas Jansen donne encore davantage lieu à inquiétude en mettant en évidence l’influence de la morale néo-kantienne sur l’actuel pontificat :
 
« Derrière le nouveau décret du pape se trouve clairement l’idée que le document pontifical Amoris laetitia ne suffit pas à permettre la percée de son changement de paradigme théologico-moral au sein de l’Eglise catholique. Le nouvel institut doit approfondir l’intention d’Amoris laetitia pour atteindre les hauteurs de la discussion scientifique actuelle, a expliqué Paglia. Avec ses ramifications mondiales et ses contacts internationaux, l’Institut peut jouer ici un rôle de premier plan. Dans le monde germanophone, il a à peine influencée le débat théologique et moral. En Amérique latine et dans de nombreux pays en voie de développement cependant, cette institution a fortement influencé toute une génération de clercs. »
 
Sous-entendu : il les a empêchés de participer à la discussion et surtout de se soumettre à la nouvelle moralité.
 
L’Institut Jean-Paul II fondé par le cardinal Carlo Caffarra – c’est à cette occasion que sœur Lucie de Fatima lui avait dit, en1982, que la « dernière bataille » de Satan se livrerait sur le terrain de la famille et du mariage – n’est décidément plus. Il a été détruit et remplacé alors que le cardinal, mort le 6 septembre, n’était pas encore enterré. Il aurait été plus honnête de l’appeler l’Institut pape François pour la mise en œuvre d’Amoris laetitia
 

Jeanne Smits