La France va mieux ? Le monde agricole au bord du suicide !

Monde Agricole Suicide France Va Mieux
 
Quand François Hollande dit que la France va mieux, de quoi veut-il parler ? De la paix sociale ? De la guerre civile ? De l’invasion ? De l’éducation sinistrée ? Non : de l’économie. Les « voyants sont au vert », paraît-il. Sauf qu’on se moque du monde : l’agriculture est au bord du suicide, comme l’établissent les dernières données publiées par la MSA, la Mutualité sociale agricole.
 
La CGT, FO et les casseurs légitimés aux yeux de l’opinion par deux mois de grève contre la loi travail ; une vague de migrants qui sème le désordre de Calais à Menton ; un baccalauréat obtenu par des quasi analphabète en attendant que les enfants de CP apprennent l’arabe ; le directeur de la DGSI, Patrick Calvar, affirmant devant une commission d’enquête parlementaire que la France est au bord de la guerre civile : comment le président de la République peut-il dire que la France va mieux ? C’est tout simple : en bon énarque élevé à l’économisme il a senti un léger ralentissement dans la catastrophe économique. Pour reprendre le vocabulaire des lecteurs du Monde, certains « indicateurs sont au vert ». Le chômage n’augmente plus uniformément. Et le moral des entreprises de taille intermédiaires (ETI) est « au plus haut depuis cinq ans. »
 

Le pouvoir empêche de mesurer comment va la France

 
Cela pose la question des indicateurs fiables, ou plus simplement et plus généralement de la mesure des phénomènes. Comment mesurer si la France va mieux, ou pas ? Pour trancher une question de ce genre, il faut disposer de données certaines et significatives. Par exemple, si vous vous êtes gelés tout un printemps sous la pluie les pieds dans les inondations, le thermomètre à 34 degrés donne une mesure indiscutable qu’est revenu ce qu’on nomme à tort ou à raison chez nous le beau temps. La chose est simple et ne souffre pas de discussion.
 
A l’inverse, brosser une image acceptable de l’immigration en France est une tâche compliquée, en partie parce que notre pays, à la différence de la Grande Bretagne ou des Etats-Unis, n’autorise pas les statistiques ethniques et religieuses. Il faut beaucoup d’ingéniosité pour trouver des failles dans l’écran statistique placé par l’INSEE devant notre réalité sociale pour la masquer. La médecine peut en ouvrir : ainsi connaît-on la proportion des bébés venus du sud dans le total des naissances en France (35 %) grâce au test de dépistage d’une maladie rare, la drépanocytose, qui n’affecte que certaines populations, et qui est pratiqué sur 35 % des nourrissons nés aujourd’hui.
 

En France, l’industrie va peut-être un peu mieux

 
Quant à l’activité économique en France, François Hollande veut se persuader et nous persuader qu’elle va mieux parce qu’il en a fait la condition sine qua non de sa candidature en 2017. Il a exclu de se représenter si le chômage ne régressait pas et il semble qu’il ait régressé en mars et avril. Mais cette baisse est très faible, elle ne touche pas toutes les catégories de chômeurs, et elle peut être l’effet de la négligence des chômeurs à signaler leur situation. Cet indicateur n’est donc ni fiable ni significatif. On attend les chiffres de mai demain pour en savoir plus, mais quel que soit le résultat on n’aura rien de décisif.
 
Plus intéressant pour le pouvoir semble le baromètre BPI France Le Lab selon lequel « le moral des patrons des entreprises de taille intermédiaire est au plus haut depuis cinq ans ». Cocorico. Pour le coup, François Hollande paraît fondé à dire que la France va mieux. Une précision : une ETI emploie entre 250 et 4.999 salariés pour un chiffre d’affaire inférieur à 1,5 milliard d’euros. Il y en a 4.800 en France, dont un quart propriété étrangère, et la moitié de leurs salariés travaille dans l’industrie. Ce n’est donc pas négligeable, mais que nous dit l’information : que la majorité de leurs dirigeants trouvent que ça va mieux. C’est une déclaration, une impression, non un fait avéré. Sur quoi se fonde cette impression ? Sur des carnets de commandes qui font anticiper à 47 % des patrons d’ETI une augmentation de leur chiffre d’affaire et les portent à embaucher. Et aussi, pour être honnête, sur une restauration des marges dues en partie à la baisse du pétrole.
 

Le monde agricole appelle à l’aide

 
Dès que quelque chose va un peu mieux, on ne va pas cracher dessus, mais ce n’est tout de même pas ça qui va sauver la France. On ne sait si le mouvement esquissé est pérenne ni surtout s’il va s’étendre aux PME qui sont le vrai cœur économique du pays et le plus gros employeur de France. Pour mesurer sérieusement si notre pays va mieux ou non, mieux vaut chercher des données moins sollicitées. Et il nous en vient précisément du monde agricole, en l’espèce de la Mutualité sociale agricole, qui vient de publier des chiffres inquiétants lors d’une conférence de presse de son président, Pascal Cormery.
 
La MSA a lancé en 2014 une cellule téléphonique de prévention du suicide dénommée Agriécoutes. La moyenne mensuelle des appels étaient de 90 jusqu’en décembre 2015, elle est de 341 en 2016. Presque quatre fois plus. Jusqu’à présent, seuls les célibataires étaient désespérés, maintenant, les familles appellent elles aussi.
 
Cet épuisement moral se lit dans une autre donnée, les demandes de la prime d’activité, qui remplace le RSA activité et s’élève à 183 euros par mois : la Mutualité sociale agricole en attendait 60.000 en 2015, il en est venu 153.000, deux fois et demie plus. Et ce ne sont plus seulement les salariés agricoles qui les demandent, mais les exploitants. Comme le dit Pascal Cormery , « quand un exploitant agricole qui s’expose habituellement peu à demander de l’aide, demande 180 euros, c’est qu’il y a un problème ».
 

Comment la France et l’Europe ont tué le monde agricole

 
Et même un sacré problème ! En fait il s’agit de la mort programmée du monde agricole, que prédisait Henri Mendras voilà cinquante ans dans la fin des paysans. La terre qui ne ment pas, la production à l’ancienne, la nation française, tout cela devait être balayé par le productivisme à outrance, l’Europe, le mondialisme. Par une coïncidence qui attire l’attention, l’un des pères de cette mutation mortelle du monde agricole, Edgar Pisani, ancien ministre de l’agriculture et commissaire européen, est mort hier.
 
Dans son éloge funèbre, François Hollande a salué un « républicain détaché des querelles partisanes » : traduire, un représentant de la caste des technocrates, désignés aujourd’hui par le sigle UMPS, qui n’ont pas de conviction nationale : Edgar Pisani, né maltais et sujet anglais à Tunis, aventurier déguisé en grand commis de l’Etat, servit d’abord De Gaulle puis Mitterrand, avec le même élan technocratique, pro européen, tiers-mondiste, sans jamais avoir la fibre française ni bien sûr paysanne. Il fut le cacique du remembrement et de la PAC, la politique agricole commune.
 

La France trahie par ses élites

 
Il faudra bien faire un jour à ce propos un bilan de l’Europe de Bruxelles et des technocrates apatrides qui l’ont forgée. Le traité de la CECA a été conclu pour développer la sidérurgie européenne : elle est aujourd’hui anéantie en France et au Luxembourg, sinistrée en Allemagne. La PAC avait été conçue comme compensation laissée aux Français, qui en attendaient monts et merveilles. Las, le pays de Sully, des labourages et des pâturages, souffre le martyre, la Mutualité sociale agricole, qui n’est pas un organisme révolutionnaire, est forcée de le constater. Le véritable fruit de l’expérience de Bruxelles, c’est la liquidation de la production industrielle et agricole européenne dans le cadre d’une spécialisation internationale du travail définie par les instances mondialistes. Sauf à la marge bien sûr Mercédès et le château d’Yquem. L’Europe musée, tourisme et produits de luxe.
 

Le suicide d’agriculteurs longtemps complices

 
Mais bien sûr la mort du monde agricole est aussi un suicide. Il fut longtemps le bénéficiaire addictif de l’usine à gaz de la PAC, donc le complice du système qui l’étrangle, la FNSEA, le puissant syndicat agricole, en sait quelque chose. Habitué aux subventions, aux montants compensatoires, aux primes d’arrachage, endetté à mort auprès du Crédit agricole, soutenu par l’Etat français et le super Etat bruxellois comme le pendu l’est par la corde, c’était un mort en puissance. Il suffisait de serrer le nœud coulant pour l’étrangler. Et c’est ce qui est en train de se passer. Dans le monde réglé par l’OMC et les grands traités transocéaniques, la notion d’indépendance alimentaire n’est défendue ni par Bruxelles ni par Paris : l’agriculture française ne sert donc plus à grand-chose, à part entretenir le paysage. Il est temps qu’elle disparaisse. Elle le sent bien. Elle se suicide. Parfois, elle téléphone avant. Ou elle quémande une prime pour survivre un peu.
 

Pauline Mille

 

Monde Agricole Suicide France Va Mieux
Cérémonie en hommage aux agriculteurs qui se suicident chaque année, sur le parvis de la basilique à Sainte-Anne-d’Auray en octobre 2015.