En créant sa réserve d’or, le Texas engage le fer contre le monopole ruineux de la Réserve fédérale

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La politique de la Réserve fédérale, la banque centrale des Etats-Unis (« Fed »), a été longuement mise en cause par Donald Trump pendant la campagne présidentielle de 2016. Au Texas, en ce moment, c’est son monopole qui est battu en brèche. La Chambre des représentants de l’Etat sudiste a voté à l’unanimité de ses 150 membres (95 républicains, 55 démocrates) la loi 3169 qui crée une institution de réserve d’or, amorçant la mise en cause du contrôle exclusif de la Fed sur la monnaie. Ce texte, porté par le jeune représentant républicain Giovanni Capriglione, un catholique âgé de 44 ans élu du comté de Tarrant (Fort Worth), constitue un missile à têtes multiples contre le très controversé monopole de la Fed. Il prévoit en effet que la création de ces provisions prépare une future monnaie d’Etat et il permet la fixation de taux de changes entre le métal précieux de l’institution monétaire texane et d’autres monnaies, parmi lesquelles le dollar des Etats-Unis.
 

La loi de Giovanni Capriglione suit le décret de Greg Abbot créant une réserve d’or

 
Voici déjà deux ans, le gouverneur républicain du Texas, Greg Abbot, avait signé un décret autorisant la création d’une chambre forte pour entreposer or et métaux précieux. L’encre n’était pas encore sèche que les fonctionnaires se mettaient au travail pour aménager les locaux. Les termes employés par Giovanni Capriglione pour rédiger le texte de loi évoquent le dollar US comme une monnaie étrangère, volonté affichée de libérer les Américains de ce chaudron monétaire qu’est la Réserve fédérale, véritable bombe financière avec sa politique de création de liquidités tous azimuts pudiquement dénommée « assouplissement quantitatif ». Ce texte démontre une fois de plus combien les autonomies locales permettent de contrer les abus d’un pouvoir central autiste.
 

Pour le professeur William Greene, l’initiative du Texas peut faire sombrer la Réserve fédérale et son monopole

 
Le professeur d’économie William Greene, de la Stern School of Business de l’Université de New York, estime que cette volonté de contester le contrôle exclusif de la Réserve fédérale sur la monnaie pourrait finir par faire sombrer la banque centrale. Un processus qui devrait faire réfléchir les doctrinaires de la monnaie unique en Europe. Progressivement, explique-t-il, les résidents du Texas ayant en main à la fois des billets de banque de la Réserve fédérale et des pièces d’or et d’argent du Texas, vont arbitrer : « La bonne monnaie (pièces d’or et d’argent) chassera la mauvaise (les billets de la Fed) ». William Greene poursuit : « Ce phénomène entraînera une cascade de conséquences, avec l’afflux de banques, les citoyens résidant hors de l’Etat préférant déposer leurs avoirs en monnaie forte, et au final une défiance générale envers les coupures de la Fed. Si cette extrémité survient, la Réserve fédérale deviendra inutile et pourra être abolie par le Congrès. »
 
Bien évidemment, le pouvoir central fera tout pour bloquer ce mouvement de libération monétaire, qui se manifeste dans d’autres Etats. Il est arrivé une seule fois qu’une institution fédérale prenne le parti d’une saine monnaie locale. C’était en 1868 quand la Cour suprême statua en faveur de l’Oregon dans son arrêt « Lane County vs. Oregon ». L’Etat de la côte pacifique levait ses taxes en pièces d’or. Un contribuable exigeait de payer en billets verts, au prétexte que ces derniers « ont un pouvoir libératoire pour toute dette ». La Cour suprême donna tort au plaignant, soulignant la part de souveraineté des Etats en matière fiscale.
 

Pour G. Edward Griffin, la monnaie fiduciaire de la Fed ne pourrait résister à l’or

 
Le bénéfice économique d’un retour de monnaies assises sur les réserves de métaux précieux a été analysé par le grand critique du monopole de la Réserve fédérale et de sa monnaie fiduciaire, G. Edward Griffin, dans « The Creature From Jekyll Island » : « Les deux caractéristiques de la monnaie fiduciaire sont qu’elle ne représente aucune valeur intrinsèque et qu’elle est décrétée monnaie légale. La notion de monnaie légale signifie simplement qu’elle est obligatoire pour tout commerce. Depuis que la monnaie ne vaut rien, sans cette obligation elle serait rejetée par la population au bénéfice d’autres moyens d’échange, comme l’or ou l’argent. » En contrepartie, la monnaie basée sur l’or lierait l’activité économique à la masse des réserves, soulignent ses détracteurs.
 
Profitant de la panique bancaire survenue en 1907, le pouvoir fédéral et un cartel bancaire ont créé une Réserve fédérale monopolistique avec la loi Owen-Glass de 1913. Comme le rappelle Griffin, cette loi fut concoctée en 1910 lors d’un conclave secret entre financiers sur Jekyll Island, île de la côte géorgienne. Depuis lors, la Fed a manipulé la monnaie jusqu’à lui faire perdre l’essentiel de sa valeur, soit 95 % en un siècle. Signe de sa complicité avec l’oligarchie bancaire, le président de la Réserve fédérale Ben Bernanke a refusé en 2009 de révéler au Congrès le nom des institutions renflouées à coups de milliards par la Fed. Et comme le dollar est une monnaie mondiale, le pouvoir de décision de la Fed, exempt de tout contrôle, est un pouvoir mondial.
 
Il reste au Sénat du Texas, Etat à parlement bicaméral, à ratifier à son tour la loi sur les réserves d’or votée par la chambre. Et le premier coup de canif aux privilèges du monstre monétaire abrité derrière les colonnades néo-classiques au style mussolinien de l’Eccles Building à Washington, aura été donné.
 

Matthieu Lenoir