Sarco, le sarcophage du suicide, fait sa première victime, en Suisse

Sarco sarcophage suicide Suisse
 

La police suisse a arrêté plusieurs personnes dans le nord du pays après l’utilisation – une première, semble-t-il – de la nouvelle « capsule suicide » Sarco imprimée sur place en 3D. Inventée par l’euthaneusiomane Philip Nitschke en 2017, c’est un sarcophage où vous pouvez vous asseoir confortablement et qui vous tue en vitesse et en douceur sur simple pression d’un bouton pour libérer de l’azote capable de vous expédier ad patres en moins de deux. C’est la société Exit, spécialisée dans le suicide assisté et membre du réseau Exit International créé par l’inventeur australien, qui annonçait la commercialisation de l’engin en juillet dernier et déjà, les autorités helvétiques avaient fait savoir que cela ne les faisait pas rire du tout, s’agissant de la « commercialisation d’un dispositif médical sans autorisation ».

Drôle de « dispositif médical », qui relève davantage de l’art du bourreau…

En juillet, le journal suisse Blick a rapporté que Peter Sticher, procureur de Schaffhouse, avait écrit aux avocats d’Exit International pour leur dire que tout exploitant de la capsule de suicide pourrait faire l’objet de poursuites pénales si elle était utilisée dans son pays, et que toute condamnation pouvait entraîner jusqu’à cinq ans d’emprisonnement, affirme Euronews.

 

La légalité du Sarco en Suisse pose toujours question

Mais entre-temps, l’autorité de surveillance Swissmedic a fait savoir que le Sarco n’est pas un dispositif médical et qu’il n’est donc pas soumis à autorisation. Par ailleurs, l’azote étant naturellement présent dans l’air, on ne peut le considérer comme un médicament.

Depuis le passage à l’acte, cependant, le ministre suisse des Affaires intérieures, Elisabeth Baume-Schneider, a déclaré lundi qu’elle était d’avis que le Sarco ne répondrait pas aux exigences en matière de sécurité des produits et que l’azote contenu dans le Sarco n’était pas conforme aux règles de la loi sur les produits chimiques, selon le journal suisse NZZ.

Les procureurs du canton de Schaffhouse ont été informés par un cabinet d’avocats qu’un « suicide assisté » impliquant le Sarco avait eu lieu lundi près d’une cabane forestière à Merishausen, a indiqué la police régionale dans un communiqué. Les poursuivis dans cette affaire sont ceux qui ont accompagné la victime : une enquête est ouverte pour « incitation au suicide » et « complicité de suicide ».

Mais comment cela se fait-il, direz-vous, puisque la loi suisse autorise l’assistance au suicide à condition que la personne mette fin à ses jours sans « aide extérieure » et que les personnes qui l’aident à mourir ne le fassent pas pour « un motif intéressé » ? On se le demande. Sans doute les responsables de l’opération sont-elles demandeuses de poursuites afin de faire valider le processus au moyen d’une décision de justice.

 

Le sarcophage du suicide sous l’œil des journalistes

Un photographe du quotidien de gauche néerlandais De Volkskrant assistait ou voulait assister à l’événement (la chose n’est pas très claire) : il fait partie des personnes poursuivies, tout comme un militant de l’euthanasie, l’un des dirigeants de l’association The Last Resort (le dernier recours), l’avocat Florian Willet, présent sur les lieux de cette première utilisation du Sarco. L’association a acquis un sarcophage de la mort et assure être « le seul endroit au monde où la capsule Sarco pourra être utilisée ». Willet assure même avoir été seul avec la « suicidée » au moment de sa mort. Nitschke suivait la chose par visio depuis l’Allemagne, au moyen de capteurs d’activité cardiaque et d’oxygénation…

L’autre dirigeant fondateur de The Last Resort est l’avocate Fiona Stewart, qui se trouve être la femme de Philip Nitschke.

On lit sur le site de l’association : « Conforme à la loi suisse, le Sarco permet une mort élective, paisible et fiable au moment choisi par le patient. Le Sarco est une option sans médicaments et sans coûts cachés. En effet, l’utilisation du Sarco au Last Resort est gratuite pour les “utilisateurs agréés” », à savoir les personnes d’âge avancé, ou souffrant de poly-pathologies de la vieillesse ou d’une maladie grave, chronique ou terminale, « pour toute personne confrontée au processus de la mort, qu’il soit lent ou rapide » (ça en fait, du monde). La démence précoce est également éligible, « tant que les capacités mentales sont conservées ».

 

Le sarcophage du suicide profite du tourisme de la mort en Suisse

En l’occurrence, la victime est une femme américaine de 64 ans, selon le Volkskrant : elle a selon Nitschke appuyé sur le bouton dès qu’elle est entrée dans le Sarco avec vue sur la forêt où celui-ci était installé. Elle aurait perdu connaissance au bout de deux minutes et cessé de vivre dans les cinq minutes, tout s’étant passé exactement « comme on s’y attendait ».

La victime avait enregistré une déclaration de 4 minutes dont elle a autorisé la transmission au Volkskrant : elle y affirme qu’elle désirait mourir depuis deux ans en raison d’une maladie qui s’accompagne de douleurs sévères, et que ses deux fils la soutiennent « à 100 % » dans sa démarche. Elle avait subi une évaluation psychiatrique la jugeant à même de prendre une telle décision et avait fait savoir qu’elle voulait mourir « aussi vite que possible ».

On est passé de la mort acceptée (et, dans le meilleur des cas, offerte) à la mort médicalisée ; voici que vient la mort « démédicalisée » aux allures de tour de manège. Gratuit… Comme le Sarco lui-même pourra être réutilisé à volonté, la victime a seulement payé 18 francs suisses pour le réservoir d’azote, et ses propres frais d’enterrement. Et l’aller simple depuis le Midwest, évidemment.

La publicité que The Last Resort a donné à cette affaire montre en tout cas une volonté de prosélytisme.

On a inventé la mort en kit.

 

Jeanne Smits