Le gouvernement japonais a entériné samedi un plan de relance d’un montant de 3.500 milliards de yens (soit 24 milliards d’euros), destiné à aider les régions et les personnes ne disposant que d’un bas salaire. Mais les analystes ne cachaient pas leur scepticisme quant à la capacité des mesures du premier ministre Shinzo Abe à faire repartir, de nouveau, la croissance du Japon, du fait, entre autres, de la dépréciation du yen.
L’objectif poursuivi par le gouvernement est évidemment de sortir l’économie japonaise de la récession dans laquelle elle a été plongée par le relèvement de trois points de la TVA – de 5% à 8% – en avril dernier. Ce plan est présenté alors que le premier ministre se trouve renforcé dans sa politique, deux semaines après la nette victoire de sa coalition gouvernementale lors des élections législatives anticipées du 14 décembre. Malgré donc cette question de la TVA, Shinzo Abe se voit encouragé dans sa politique économique, qui a été surnommée, assez logiquement, « Abenomics ». Ce qu’il appelle, lui, la « stratégie à trois flèches » (à savoir largesses budgétaires, souplesse monétaire, et réformes structurelles), et qu’il estime être « la seule possible »…
Les points forts du nouveau plan de relance
Fondé, pour l’essentiel, sur des crédits aux collectivités régionales et sur des aides aux ménages pour l’achat de carburants, ce nouveau plan de relance devrait apporter, selon les calculs et espoirs gouvernementaux, un gain de croissance de l’ordre de 0,7% du PIB. Shinzo Abe espère bien y parvenir sans nouvelle émission de dette. Son financement sera obtenu, selon les prévisions du gouvernement, par l’augmentation des recettes fiscales sur l’exercice budgétaire – qui s’achèvera fin mars –, et en puisant, en outre, dans certains fonds inutilisés dans les budgets antérieurs. Quant aux nouvelles augmentations d’impôts, qui devaient être effectives en 2015, elles sont finalement reportées à avril 2017.
Bien évidemment, ce plan n’est pas exempt de tout calcul politique. « En mettant rapidement en œuvre ces mesures, je pense que nous pouvons donner du tonus à la consommation comme aux économies régionales et étendre à l’ensemble du pays un cercle vertueux de croissance », a affirmé samedi le premier ministre.
Calcul politique
Or, en annonçant vouloir concentrer ce plan sur l’aide aux régions défavorisées, Shinzo Abe espère bien parvenir à transformer lors des élections locales, à savoir en avril prochain, l’essai réussi lors des législatives anticipées d’il y a quinze jours.
Sur le total des 3.500 milliards de yens annoncés, 1.800 milliards, en effet, soit plus de la moitié, seront donc consacrés à des mesures de soutien aux bas salaires : distribution de bons d’achat de marchandises ou de carburants, mesures de soutien aux petites entreprises, etc. bref, divers moyens susceptibles, espère-t-on, de provoquer la relance de l’économie des régions.
Les 1.700 milliards de yens restants seront, eux, affectés à des mesures de prévention des catastrophes, et à la reconstruction de celles des zones dévastées par le tsunami de mars 2011 qui n’ont pas encore été remises en état.
Le Japon en proie au doute
Malgré tout, le doute des économistes demeure persistant. « C’est mieux que rien, commente ainsi l’un d’eux, mais je pense pas que ce plan de relance ait un gros impact, de nature à doper l’économie. » L’incertitude économique actuelle est trop forte pour qu’il puisse en être autrement, estiment-ils. Et, au taux de 0,7% d’une relance de la consommation envisagé par le gouvernement, ils pensent plus crédible de voir celui n’atteindre qu’un petit 0,2% du PIB.
Quoi qu’il en soit, Shinzo Abe n’a rien à craindre, compte tenu de son récent succès, de l’avis des députés qui doivent se prononcer sur son plan au début de l’année prochaine : la Chambre renouvelée lui est désormais très favorable.
A noter, parce que la comparaison peut être intéressante, que ce montant de 24 milliards d’euros correspond exactement à la somme que le constructeur automobile allemand Audi va investir dans les cinq prochaines années, tant pour le lancement de nouveaux modèles, que pour l’extension de ses capacités actuelles de production…