Il faut une bonne dose d’irénisme pour qualifier de « génie » le propos du pape sur ces catholiques qui se trompent en pensant qu’ils devraient procréer « comme des lapins ». La phrase triviale – le pape François s’est excusé au préalable de la familiarité du propos – prononcée au retour des Philippines lors de réponses à bâtons rompus aux questions des journalistes, aux dires de certains, montre simplement que « le message de l’Eglise ne se limite pas à un jeu entre le permis et le défendu ». Mais l’impact de cette déclaration non préparée, non structurée, facile à sortir de son contexte, est en réalité désastreux.
Les médias du monde entier se sont saisis du mot, déjà si facilement lancé comme quolibet aux familles catholiques qui ont généreusement accueilli la vie, pour justifier ce regard « mondain » sur l’esprit de sacrifice et d’amour qui les anime. C’est tout ce qu’on a retenu. Ainsi qu’une « déclaration » selon laquelle les familles catholiques devraient avoir trois enfants. Traduction des médias : pas davantage…
Les propos déformables du pape François
Soyons justes. Le pape n’a pas dit les choses ainsi. Lorsqu’on se réfère à la transcription intégrale des réponses du pape François, le côté caricatural du propos disparaît. C’est sur interpellation d’un journaliste à propos du thème de la contraception et de la croissance de la population mondiale que le pape a répondu :
« Je crois que le nombre de trois par famille que vous avez évoqué est celui qui est présenté par les experts comme nécessaire à ce que la population continue de se maintenir, trois par couple. Quand on descend en dessous, c’est l’autre extrême qui se produit, comme cela se passe en Italie. J’ai entendu, je ne sais pas si c’est vrai, qu’en 2024 il n’y aura pas d’argent pour payer les retraités : chute de la population. »
Il évoquait ensuite la « paternité responsable » à déterminer avec le « pasteur » et les « nombreux moyens licites » qui permettent d’espacer les naissances. Mais il n’en a pas fait un absolu : « Pour les plus pauvres, l’enfant est un trésor. Il est vrai qu’il faut être prudent là aussi, mais pour eux l’enfant est un trésor. “Dieu m’aidera” : certains, peut-être, ne sont pas prudents, c’est vrai. Paternité responsable, mais voyons aussi la générosité du père et de la mère qui voient en chaque enfant un trésor. »
Les médias utilisent François
Le problème vient largement de l’expression. Libre, spontanée, sans structure, elle juxtapose des considérations qui peuvent paraître contradictoires. Elle montre les graves limites de l’expression libre pour un pape qui porte la responsabilité de l’Eglise et le devoir de présenter la vérité dans la clarté. Car les médias exploitent la moindre faille.
Il faut noter aussi que les propos du pape, tels qu’ils ont été rapportés et montés en épingle, ont blessé de nombreux parents qui justement, ont répondu à l’appel fondamental de Dieu qui a demandé à l’homme de croître et de se multiplier, parce que la vie est bonne et que chaque être humain est appelé à devenir enfant de Dieu et à jouir de la vie éternelle.
Le pape François citait, dans l’avion, l’exemple d’une femme qui attendait son huitième enfant, les sept premiers étant nés par césarienne. Il lui avait reproché, lorsqu’il l’avait rencontrée, de « tenter Dieu » parce qu’elle lui avait dit faire confiance en Dieu. Il l’avait accusée de prendre le risque de faire de ses enfants des « orphelins ».
« Qui suis-je pour juger e»… les lapins ?
Cette femme – si elle existe – s’est-elle reconnue dans les propos du pape François ? On imagine la blessure. Et on se souvient de ce que le même François disait à propos des homosexuels : « Qui suis-je pour juger ? » L’acte homosexuel est intrinsèquement désordonné. Donner la vie est un bien. Il est surprenant de voir le deuxième cas de figure traité avec cette dureté, tandis que le premier semble excusé (même s’il est vrai que l’Eglise ne juge pas les pécheurs, mais le péché, chose que les médias ne comprennent pas non plus).
Faut-il donc juger les pères et mères de familles nombreuses qui ont toutes leur dose de souffrance, qui toutes font confiance à la Providence dans un monde qui les rejette, les montre du doigt et les défavorise ?
Le pape n’a jamais dit cela, mais les médias l’ont compris ainsi.
Pourquoi ? Parce que cela entre pleinement dans les principes de l’écologie, de l’idôlatrie de la Terre Mère, du panthéisme globaliste qui voit l’homme comme un gêneur et la nature comme sa victime. Réduire, ou du moins contrôler la population mondiale est le premier devoir envers cette déesse maléfique.
Il est à noter que le passage de l’interview papale sur les « lapins » n’a pas été repris dans la transcription officielle qui en a été faite par le service de presse du Vatican.