Clash est un anglicisme utilisé en arabe contemporain, qui signifie le choc frontal, l’affrontement. Le film repose sur une forme de huis-clos, original, qui a lieu dans un fourgon cellulaire de la police égyptienne. L’action prend place à l’été 2013, peu après le coup d’Etat du général (depuis autopromu maréchal) Al-Sissi, renversant le président islamiste Morsi, lié aux Frères Musulmans. Morsi, à la politique parfaitement détestable, qui persécutait les Chrétiens coptes et n’était manifestement pas à la hauteur des immenses défis économiques et sociaux de l’Egypte, n’en avait pas moins été démocratiquement élu par les électeurs égyptiens seulement un an plus tôt. Ce coup d’Etat avait été préparé par de violentes manifestations de libéraux hostiles aux islamistes. Le renversement de Morsi a provoqué de violentes manifestations de Frères Musulmans, qui ont attaqué les manifestants libéraux – qui ont continué à défiler – les policiers, les militaires. Dans ce fourgon ont été emprisonnés d’abord des journalistes, arrêtés à tout hasard pour espionnage, grande tradition locale, puis des libéraux surexcités – acclamant paradoxalement le coup d’Etat militaire – et enfin, les plus nombreux, des islamistes membres de la Confrérie des Frères Musulmans.
Clash : une série de portraits intéressants à voir impérativement en arabe
Le film est à voir impérativement en arabe, pour l’ambiance et la langue en elle-même, particulièrement intéressante dans ses variations dans le film, et impossibles à rendre en doublage. Le sous-titrage français sous-traduit quelque peu les interminables formules de salutations pieuses des islamistes, qui ont leur ridicule pour le non-islamiste. De même leur langue arabe islamiste mêle un dialecte arabe égyptien fort populaire et des formules et prononciations archaïsantes qui détonnent : l’effet en arabe est ou un pédantisme rarement réussi, ou un ridicule à peu près équivalent au français pseudo-médiéval des « Visiteurs ».
Durant les premières heures, les camps politiques se reforment dans la cellule mouvante. Ils peinent à ne pas littéralement s’entretuer. Les policiers sont obligés d’intervenir, brièvement, en les arrosant tous au canon à eau. Puis, au fil des heures interminables, sous l’effroyable soleil extrêmement chaud de l’été cairote, les pires ennemis politiques sont obligés de coopérer. Ils doivent formuler calmement et poliment une demande collective pour obtenir de l’eau, vitale. Les plus faibles défaillent, et risquent, littéralement, de graves séquelles, sinon la mort. Tous se découvrent. Clash offre une série de portraits intéressants. Aussi antipathique que soit leur cause, les islamistes peuvent parfois se montrer humains. Les libéraux ne sont pas parfaits non plus ; lorsque l’un d’entre eux apprend que son meilleur ami fréquente sa sœur, il a une réaction digne d’un islamiste. Pourtant la monstruosité des islamistes dans leur projet profond et leurs actions n’est pas cachée. On regrettera seulement la fin de Clash, voulue ouverte, sans solution, mais surtout confuse.