DRAME/DRAME SOCIAL
American Honey ♥


 
American Honey, soit à peu près la “petite chérie américaine”, narre les aventures d’un groupe de jeunes gens, très majoritairement blancs, pauvres, qui survivent en vendant de ville en ville des abonnements à des magazines. Ils forment des convois de deux ou trois voitures, et dorment à plusieurs par chambres la nuit dans des motels. Mais ils doivent vraiment dormir pour bien travailler la journée. La patronne est intransigeante, hommes et femmes ont des chambres séparées et les relations intimes sont contractuellement interdites dans l’entreprise. La réalité, est, on s’en doutera, quelque peu différente. Ainsi, une jeune femme, métisse, se laisse séduire et embarquer dans cette caravane en apparence joyeuse. Elle habitait une banlieue pauvre d’une grande ville américaine. Elle n’avait pas de perspectives professionnelles. Elle était orpheline, et seulement liée vaguement, via un amant peu intéressant, à une famille recomposée d’adoption. Elle avait tenu lieu de mère de substitution à de jeunes enfants. Elle part donc à l’aventure, pleine de bonne volonté. Elle veut travailler, acceptant un emploi qu’elle devine rude, mais croit absolument honnête. Elle a aussi, motivation supplémentaire, été plus ou moins séduite par un des hommes-vedettes de l’entreprise.
 

American Honey intéresse par son sujet dur

 
American Honey propose quelques images fortes, et chose terrible, qui renvoient à des réalités indiscutables. Le film frôle souvent le drame social, en particulier dans les premières scènes, lorsque des enfants crasseux, et le contexte n’aide pas à la propreté, font littéralement les vastes poubelles d’un hyper-marché, pour trouver de quoi se nourrir. Un poulet périmé de la veille doit en effet être encore comestible…Puis, American Honey suit les aventures dans la caravane commerciale de Star – ou étoile – l’héroïne. Elle avait été affublée par sa défunte mère de ce prénom ridicule, handicap né paradoxalement d’un espoir naïf de promotion sociale. En fait, comme elle l’avait soupçonné initialement, les gens n’achètent plus de magazines, ou infiniment moins qu’hier, et sont d’autant plus réfractaires à la perspective d’un abonnement ; ils se contentent des sites dits d’information sur internet ou des réseaux sociaux. La démarche des vendeurs est donc basée sur le mensonge et la pitié pour des jeunes pauvres : ils vendraient les abonnements pour collecter des fonds pour une bonne cause, totalement imaginaire. Star se révolte contre le mensonge, mais suit malgré tout obstinément la caravane. Le peu de gains des employés est confisqué par la patronne. L’aventure frôle à l’occasion le vol, ou, pour les filles, la prostitution.
 
American Honey réussit à intéresser à son sujet, dur. Les personnages possèdent leur existence propre, leur complexité parfois. Evidemment volés, le sachant, ils restent ensemble unis par le besoin d’avoir une famille de substitution. American Honey souffre seulement du défaut absolument majeur de durer une heure de trop, ce qui est bien dommage.
 

Hector JOVIEN

 
American Honey drame social film