Pour Steve Bannon, derrière la Corée du Nord, la Chine est l’ennemi n°1

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Le président Donald Trump en compagnie de Stephen Bannon dit Steve Bannon.

 
Après le test nucléaire assez convaincant de la Corée du Nord, Trump fait feu de tout bois et affirme pouvoir/vouloir tirer sur tout ce qui a un lien, au moins de près, avec Kim Jong-un. Donc la Corée du Sud et en arrière-plan, la Chine ! Une occasion merveilleuse pour la communauté internationale de monter en épingle cette arrogance belliqueuse pouvant donner jour à toutes les « catastrophes » possibles. Steve Bannon, l’ancien stratège de Trump, dénonce aussi cette attitude mais n’en accuse pas moins la Chine qui doit bien être, selon lui, l’ennemi n°1.
 

Trump contre tous ceux qui veulent frayer avec la Corée du Nord

 
Voudrait-il se mettre à dos tous les pays asiatiques, qu’il ne le ferait pas autrement. La Corée du Sud ? Trop douce à ses yeux, pas assez vindicative face au programme atomique de son opiniâtre voisin… Les tweets de Trump l’ont tancée, lui reprochant, tant qu’à faire, ses politiques protectionnistes injustes qui nuisent aux industries automobiles et sidérurgiques américaines.
 
Et puis aussi la Chine ! Dimanche, le président a déclaré envisager la solution radicale de « stopper tout commerce avec n’importe quel pays faisant affaire avec la Corée du Nord ». Déclaration confortée lundi par l’ambassadrice des USA à l’Onu, Nikki Haley, et par le secrétaire au Trésor, Steven Mnuchin, qui a en sa besace un nouveau paquet de sanctions potentielles.
 
Et qui fricote avec la Corée du Nord ? En tout premier lieu, la Chine (85 % de tous les échanges avec la Corée du Nord), l’Inde et la Russie.
 
L’administration Trump parle de maintenir la pression face à une menace militaire de taille (une pression, certes, que les précédents gouvernements n’ont jamais fait peser : la Corée du Nord a monté tranquillement son petit arsenal pendant les dernières décennies alors que d’autres pays subissaient l’ire des Etats-Unis). Mais Trump ferait-il aussi de la Corée du Nord un « prétexte » pour viser sa grande ennemie commerciale, la Chine, comme l’envisage l’agence d’informations (proche du Kremlin) Sputnik ?
 

Steve Bannon : la Chine doit être une priorité « obsessionnelle »

 
Certes, la perspective est quasi grotesque, tant les chiffres sont immenses. En 2015, les échanges sino-américains s’élevaient à 659 milliards de dollars, sachant que la Chine a exporté aux USA des marchandises pour 497 milliards de dollars… Et puis, cela provoquerait un recours législatif immédiat des dirigeants du Congrès – Trump n’est pas si fou.
 
Néanmoins, c’était et c’est la politique prônée par Steve Bannon, stratège de Trump jusqu’à la mi-août. Sa crainte était que le débat à la Maison Blanche soit gagné par ceux qui veulent « s’accommoder rationnellement » avec la Chine, redevenue récemment le premier créancier des États-Unis avec 980 milliards d’euros de dette. « Vous devez sanctionner les entreprises chinoises et les institutions financières chinoises » scandait-il selon Breitbart.
 
Bannon ne cautionne pas la menace de Trump de faire tomber « le feu et la colère » sur la Corée du Nord : « Il n’y a pas de solution militaire, laissons tomber. » Mais il défend mordicus (dans American Prospect) que « la guerre économique avec la Chine, c’est la question numéro 1 », la priorité « obsessionnelle ».
 

Faire monter la peur pour prendre le contrôle

 
Ce qui reste intéressant, c’est la posture consensuelle internationale, qui voit dans l’attitude de Trump une entreprise totalement « hasardeuse », comme le disait un haut responsable de la sécurité nationale dans l’administration Obama cité dans le New York Times. Voire une « folie » aux implications géopolitiques et économiques dramatiques, hésitant entre bombes nucléaires et écrasements économiques… Julian Assange, le fondateur de Wikileaks, a même mis en garde le président américain qu’il perdrait son poste en déclenchant cette grande guerre commerciale contre la Chine.
 
La peur est la pire conseillère, mais la meilleure des alliées…
 
Et la sphère asiatique semble s’en servir merveilleusement. Certains pensent que ce nouvel essai fera bouger la Chine ? Pourtant, elle ne rajoute rien aux « gages » diplomatiques qu’elle a déjà donnés. Si en août, Pékin a exprimé son soutien aux sanctions du Conseil de sécurité des Nations unies contre Pyongyang, puis a décrété elle-même des sanctions commerciales contre la Corée du Nord, elle en appelle aujourd’hui simplement au dialogue.
 

Ce n’est pas Kim Jong-un qui doit forcer l’intérêt

 
Qui est l’agresseur in fine ? La Corée du Nord a beau avoir fait annoncer, ce 6 septembre, une « contre-offensive » aux conséquences catastrophiques en cas de nouvelles sanctions, les media font porter d’abord à Trump la perte du « self-control ».
 
Et, sur ce point, la Russie, le grand méchant loup, est tout d’un coup, ô surprise, entendue ! Vladimir Poutine a parlé lui-même d’une « hystérie militaire ». A l’issue du sommet des BRICS, le 4 septembre, en Chine, il n’a pas hésité à charger les Etats-Unis d’un certain nombre de responsabilités et à pratiquement défendre la Corée : « Les exemples de l’Irak et de la Libye les ont convaincus que la dissuasion nucléaire était la seule voie crédible pour leur assurer leur sécurité… »
 
Étonnante attitude, quand les mêmes glosent, ailleurs, de stabilité internationale et de désarmement nucléaire. Dialectique toujours…. qui permet de faire réclamer au monde une concertation internationale de paix, tandis que Chine et Russie tentent de prendre le leadership. Ce n’est pas Kim Jong-un qui doit forcer l’intérêt – c’est ce qui se passe autour.
 

Clémentine Jallais