Cernan, le dernier homme qui a marché sur la lune est mort : quelle nouvelle frontière pour la terre ?

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C’était au siècle dernier, voilà 45 ans, Cernan, commandant d’Apollo XVII, a marché sur la lune. Il est mort. L’espace n’est plus la « nouvelle frontière » assignée à l’enthousiasme des humains. C’est sur la terre, devenue déesse mère, que les choses se passent.
 
Eugene Cernan était pilote d’aéronavale, il a fait partie des missions Apollo et a passé 72 heures sur la lune en 1972. Puis ce type de vols spatiaux a été abandonné faute de crédits d’abord, d’envie ensuite. On envisage aujourd’hui des vols commerciaux vers la lune, mais l’intérêt des scientifiques et des jeunes s’est reporté vers la terre elle-même. On fouille ses océans, ses forêts, pour les sauver. On répertorie sa faune et sa flore, pour les sauver, pour les exploiter intelligemment. La maîtrise de l’environnement direct a remplacé la fuite vers les grands espaces.
 

Le dernier homme est mort, il avait marché sur la lune

 
Il y a de l’intelligence dans ce mouvement, de la sagesse aussi. A quoi sert-il à l’homme d’avoir marché sur la lune s’il vient à saloper la terre ? Aimer ce qui est proche, le préserver, vaut sans aucun doute mieux qu’aller gâcher l’argent du contribuable dans le vide intersidéral.
 
C’est vrai, avec des bémols. D’abord, ce retour sur le plancher des vaches fait un peu pantouflard. Le mouvement naturel de l’homme est d’aller de l’avant, c’est comme ça qu’il découvre. Si Vasco de Gama et Christophe Colomb avaient appliqué le principe de précaution à la lettre nous n’en serions pas là. Placer dans l’espace la nouvelle frontière de l’Amérique, c’était signifier qu’il n’y avait pas de limites à l’esprit pionnier. Pour la santé morale et physique de l’homme, il n’est pas mauvais de cultiver l’étoffe des héros. Cernan était un homme, c’est plus roboratif qu’un Jadot. Et puis ça sert parfois de faire des choses qui ne servent à rien. La recherche spatiale permet autant d’avancées que la recherche océanographiques. Plus, peut-être ? Je l’ignore, n’étant ni astronome ni océanographe.
 

La terre est notre nouvelle frontière, Cernan n’a plus sa place

 
Enfin le risque est surtout politique et, comment dire, philosophique. Le concept même de nouvelle frontière, si enthousiasmant qu’il ait pu paraître aux Américains (il faisait référence aux immigrants qui partaient conquérir l’Ouest avant  même l’installation du télégraphe et du chemin de fer), est un peu tyrannique. On assigne une tâche préférentielle, voire exclusive, aux jeunes. Aujourd’hui, il s’agit de vivre ensemble sur une terre divinisée, sans tuer ni manger d’animaux, sans émettre de gaz à effet de serre, fumée de tabac comprise mais fumée du cannabis permise, en respectant le droit du vivant et les droits humains parmi lesquels l’avortement et l’euthanasie, sans discrimination d’aucune sorte : on voit bien que la nouvelle frontière est passée de l’exploration du monde au contrôle social de l’homme. Social, moral, politique, philosophique, religieux. L’écologisme est une ascèse imposée. Bref, le marché est mauvais pour l’homme libre. Hier on lui promettait la lune, aujourd’hui on lui promet la terre : sa nouvelle nouvelle frontière est une prison.
 

Pauline Mille