C’est un tribunal administratif de Madrid qui a posé la question à la Cour de Justice de l’Union européenne : une exonération fiscale en faveur de l’Eglise doit-elle être assimilée à une aide publique interdite par le droit européen ? L’affaire concerne des travaux de rénovation et de modernisation à l’école piariste de l’Immaculée à Getafe, dans la province madrilène. Des travaux qui ont donné lieu au paiement par la Congrégation locale des écoles piaristes, contre délivrance du permis de construire, de la taxe municipale sur les constructions, les installations et les travaux, pour près de 24.000 €. En vertu du Concordat de 1979 entre l’Espagne et le Saint-Siège, qui permet à l’Eglise de bénéficier de certaines exonérations fiscales, les piaristes ont demandé le remboursement de cet impôt, ce qui leur a été refusé dans la mesure où les travaux concernaient des locaux non destinés à une activité strictement religieuse.
La question posée à la Cour de Justice de l’UE (CJUE)
La question à laquelle devait répondre la CJUE était donc de savoir si une exonération fiscale en faveur d’une communauté religieuse pour des activités dont la finalité n’est pas strictement religieuse peut constituer une aide publique interdite par le droit européen.
En l’occurrence, les juges européens ont répondu par l’affirmative, mais en laissant le soin aux tribunaux espagnols de déterminer dans quelle mesure l’exonération porterait sur une activité économique. Pour cette école, les locaux étant utilisés à la fois pour des cours obligatoires subventionnés par l’Etat espagnol et des cours supplémentaires payés par les parents des enfants, il faudra donc encore que le tribunal de Madrid décide dans quelle proportion l’exonération fiscale concernerait ces cours supplémentaires et conférerait aux piaristes un avantage sur leur concurrence.
Au final, ce sont les tribunaux nationaux qui devront déterminer dans quelle mesure les exonérations fiscales des Églises sont des aides publiques
La portée de ce jugement de la CJUE est donc somme toute limitée, d’autant plus que la Cour a aussi rappelé que tombaient sous le coup de la législation européenne interdisant les aides publiques pouvant conduire à une distorsion de la concurrence les seules exonérations ou autres formes de subventions dépassant 200.000 € sur une période de trois ans. Cette décision risque-t-elle d’ouvrir la voie à une remise en cause plus large des exonérations dont bénéficient les Eglises dans différents pays européens ? Va-t-on par exemple en France poser la question de la part du denier de l’Eglise utilisée pour certaines activités ? Sans doute pas, car la déduction fiscale des contributions aux deniers de l’Eglise s’applique aussi en faveur de toutes les associations reconnues d’intérêt général.
Reste qu’en Espagne la pression va croissant, notamment de la part des gauchistes de Podemos, pour supprimer carrément les avantages fiscaux consentis à l’Eglise. L’avis de la CJUE apporte de l’eau à ce moulin laïciste et maçonnique.