La Commission européenne prévoit un budget de 4 milliards d’euros pour renforcer le marché unique après 2020 – ou l’eurocratie

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2021, 2021… Les Britanniques auront acté leur Brexit, depuis deux ans. Celle qui sera alors l’Europe des 27 commencera à appliquer la feuille de route de son nouveau budget ou « cadre financier pluriannuel » 2021-2027. Le 2 mai, la Commission européenne en a déjà donné un premier ensemble de textes – le processus devrait se poursuivre jusqu’au 14 juin. Une des nouveautés : un mignon petit programme prévoit quatre milliards pour, officiellement, protéger les Européens et leur donner les moyens d’agir.
 
Comprenez surtout : renforcer le marché unique en faisant en sorte de les garder bien persuadés qu’il est bon de vivre en Eurocratie…
 

La Commission européenne offre la garantie d’un marché unique sur le terrain

 
Il est certain que sur les 1 135 milliards d’euros en engagements que propose le budget européen à long terme 2021-2027, ces quatre milliards font figure de piécettes. Néanmoins la symbolique est là. « Pour que le marché unique reste opérationnel, nous devons veiller à son bon fonctionnement. Nous proposons un nouveau programme visant à accroître l’impact positif sur les Européens », a déclaré Elzbiea Bienkowska, commissaire européenne chargée du marché intérieur, de l’industrie, de l’entrepreneuriat et des PME.
 
Ce nouveau programme sera, officiellement, spécifiquement prévu pour protéger les consommateurs, leur donner les moyens d’agir et pour permettre aux nombreuses petites et moyennes entreprises (PME) européennes de tirer pleinement parti d’un marché unique performant.
 
Dans les faits, le nouveau programme renforcera surtout la gouvernance du marché intérieur de l’Union.
 

Des réglementations supplémentaires en échange de quelque argent ?

 
Vis-à-vis des consommateurs en premier lieu. Vĕra Jourová, commissaire pour la justice, les consommateurs et l’égalité des genres veut « veiller à ce que les consommateurs puissent profiter de leurs droits », à savoir pouvoir consommer et bien consommer – c’est-à-dire éliminer les produits dangereux du marché et protéger (en finançant) l’accès des consommateurs aux voies de recours collectifs.
 
Le pilier « sécurité alimentaire » sera ainsi l’un des principaux bénéficiaires de ce nouveau programme en faveur du marché unique. Un concours financier sera octroyé à des actions de sécurisation de la production de denrées alimentaires, de prévention et d’éradication de maladies animales et d’organismes nuisibles aux végétaux et d’amélioration du bien-être des animaux dans l’Union. Et l’accès des producteurs de denrées alimentaires de l’Union aux marchés et l’exportation vers les pays tiers seront soutenus.
 
Mais aussi vis-à-vis des petites et moyennes entreprises. Il y avait déjà le programme COSME qui soutient la compétitivité des entreprises et des PME-PMI. La Commission propose de renforcer le soutien accordé aux petites entreprises pour favoriser leur développement et leur expansion au-delà des frontières.
 
Le programme permettra enfin de renforcer la coopération (et les outils la facilitant) entre les États membres et la Commission pour assurer la bonne application des réglementations de l’Union et le contrôle du respect de celles-ci, en particulier à l’ère de l’économie numérique. Et apportera en prime un concours financier aux instituts nationaux de statistique en vue de la production et de la diffusion des « saines » statistiques européennes…
 

Le côté si « fleur bleue » de l’eurocratie…

 
Comme l’a dit la déclaration « fleur bleue » des grands pontes européens (dont Jean-Claude Juncker), à l’occasion du 25e anniversaire du marché unique, en mars dernier, « le marché unique offre aux Européens, la possibilité de voyager librement, d’étudier, de travailler, de vivre et de tomber amoureux par-delà les frontières. Ils peuvent acheter ce qu’ils veulent où ils le veulent et bénéficier d’un choix plus important et de prix plus intéressants. Les entreprises européennes – grandes et petites – peuvent élargir leur clientèle et échanger des produits et services plus facilement dans toute l’Union. En d’autres termes, le marché unique est le meilleur atout de l’Europe pour générer de la croissance et favoriser la compétitivité des entreprises européennes dans des marchés mondialisés ».
 
Il faut garder à l’esprit que c’est au prix d’une eurocratie de plus en plus étendue, de plus en plus prégnante. On normalise l’économie, on systématise les réglementations, on donne de la voix aux individus… sous couverts de bienfaits « évidents », on réduit toujours plus la capacité des États à s’autogouverner, on restreint encore leur souveraineté nationale.
 
Les autres choix dans le nouveau budget donnent aussi le ton. Sur les 1 135 milliards d’euros en engagements de ce dernier, les dépenses relatives à la gestion des frontières extérieures, des migrations et de l’asile sont multipliées par trois et les investissements liés à la sécurité augmentent, quant à eux, de 40 % ; un Fonds de défense doté de 13 milliards d’euros est aussi proposé pour la première fois. Le budget européen est largement politique.
 

Clémentine Jallais