Les vues divergent au sein de l’UE quant à l’impact de la crise migratoire sur le marché du travail. Deux rapports émanant de deux banques centrales d’importance en Europe, la Banque d’Angleterre et la Bundesbank, mettent en avant une interprétation différente des effets de l’arrivée massive d’immigrés sur le continent européen. Si l’Angleterre reconnaît enfin ce que Nigel Farage de l’UKIP dénonçait déjà depuis des mois, l’accueillante Allemagne y voit un nouveau défi à relever à l’instar de celui de la réunification après la chute du mur de Berlin en 1989.
Immigration rime avec baisse des salaires pour la Banque d’Angleterre
Selon la Banque d’Angleterre, la forte poussée migratoire dont le pays fait l’expérience est responsable de la baisse des salaires des ouvriers peu ou pas qualifiés, qui représentent un quart de la population active. Dans son rapport intitulé « L’impact de l’immigration sur les salaires : ce que l’on constate en Grande-Bretagne », l’analyse de la banque centrale montre qu’une augmentation de 10 % de l’immigration se traduit par une baisse proportionnelle de 2 % des salaires des populations ouvrières peu ou pas qualifiées. En revanche, l’origine migratoire ne semble pas avoir d’impact sur les résultats économiques au sens large.
Ainsi, la conclusion du rapport de la Banque d’Angleterre sonne-t-elle comme un camouflet à la face de tous ceux qui refusent de faire le lien entre immigration et « compression salariale ».
D’après le gouvernement, ce sont officiellement plus de 300.000 immigrés qui entrent sur le territoire britannique chaque année et qui empêchent la réévaluation des salaires en fonction de l’inflation pour les employés britanniques, rognant ainsi leur pouvoir d’achat. Les gouvernements successifs, qu’ils soient travaillistes ou conservateurs, n’ont pas pris en compte les conséquences de leur politique favorable à l’immigration sur les plus pauvres et les plus vulnérables de leurs concitoyens.
La crise migratoire en Europe est un défi positif selon la Bundesbank
Pour sa part, la Bundesbank estime que les réfugiés accueillis en nombre —un million en cette année 2015— auront des difficultés à trouver un emploi en raison de la barrière de la langue, de leur âge et de leur manque de qualification. Elle estime par ailleurs qu’ils seront 1,5 millions entre 2015 et 2017 dans cette situation, alors que l’Allemagne est déjà le pays de l’UE qui accueille le plus de migrants. La population craint les conséquences économiques d’une telle politique. Les travailleurs allemands voient avec inquiétude l’arrivée de quelque 520.000 travailleurs supplémentaires sur le marché du travail par le biais de l’immigration, selon des chiffres cumulés avancés par la Bundesbank jusqu’à fin 2017.
Voulant cependant envisager l’afflux migratoire comme un atout pour l’économie du pays, la Bundesbank met surtout en avant la nécessité d’intégrer rapidement et avec succès ces travailleurs supplémentaires dont le taux de chômage avoisine les 70 % dans les 12 mois qui suivent l’octroi du statut de réfugié (40 % au bout de la 3ème année).
« A court terme, les effets [de l’afflux migratoire] seront sans doute comparativement modestes, en raison de leur faible inclusion et de leur taux de chômage élevé », affirme son rapport.
Alors que David Cameron souhaite faire avancer la question du Brexit, pressé entre autres par un flot migratoire d’ampleur, l’Allemagne d’Angela Merkel envisage la prise en charge de l’invasion migratoire comme le plus gros défi qui soit depuis la réunification, mais un défi positif eu égard à la contraction actuelle de sa population active.
Et tant pis pour l’augmentation faramineuse du nombre de chômeurs à entretenir.