La controverse suscitée au sein de la gauche, et même du Parti socialiste, par le projet d’extension de déchéance de nationalité aux binationaux nés en France ne faiblit pas. A gauche, les critiques se font chaque jour plus virulentes. Et Manuel Valls n’y répond qu’en reprochant aux opposants de « s’égarer au nom des grandes valeurs ».
Mais c’est surtout au sein du Parti socialiste que les critiques se multiplient : Martine Aubry, Benoît Hamon, Julien Dray, Anne Hidalgo, Jean-Marc Ayrault, etc. Ils sont de plus en plus nombreux à critiquer non seulement le projet remis au goût du jour par François Hollande, mais aussi, et peut-être surtout, la désinvolture et même le mépris avec lesquels Manuel Valls leur répond.
La bataille de la déchéance de nationalité
Qu’on en juge ! Dans le JDD, le premier ministre déclame : « Une partie de la gauche s’égare au nom de grandes valeurs en oubliant le contexte, notre état de guerre, et le discours du président devant le Congrès. (…) La détermination est totale, nous irons jusqu’au bout et que chacun à gauche en soit bien convaincu. (…) La France, conclut-il en citant l’historien Pierre Nora, est en péril de paix. »
Face au ton employé par l’actuel locataire de Matignon, les réactions ont été bon train. « Si la France est en “péril de paix”, alors ne la divisons pas davantage ! », a lancé son prédécesseur Jean-Marc Ayrault. « On ne s’égare jamais en défendant ses valeurs. C’est même l’inverse », renchérit Martine Aubry.
Manuel Valls contre la gauche
Beaucoup dénoncent aussi, comme Benoît Hamon, les « mots toujours extrêmement agressifs de Manuel Valls », estimant qu’ainsi « il ne facilite pas la concorde et il “égare la gauche” ». « Qui s’égare, poursuit l’ancien ministre, quand on reprend les propositions du Front national pour les inscrire dans la Constitution ? »
Et Benoît Hamon de continuer en affirmant craindre une « distinction entre deux citoyens français de naissance », qui « va provoquer un schisme dans le peuple de gauche mais aussi dans la communauté nationale », alors qu’il s’agit d’une « proposition de l’extrême droite, une proposition qualifiée dans un passé récent de “dangereuse” par François Hollande et de “nauséabonde” par Manuel Valls », conclut-il en renvoyant l’exécutif à ses contradictions.
Les socialistes contre Manuel Valls
Marie-Noëlle Lienemann accuse elle aussi le président et son premier ministre de diviser le pays, accusant notamment ce dernier de prendre « un air martial pour combattre la gauche alors que soi-disant ils veulent œuvrer à une forme d’union nationale ». « On ferait mieux de s’unir sur des choses plus opérationnelles, plus conformes à nos principes et plus efficaces », ajoute l’ancien ministre de François Mitterrand.
Au final, ce sont peut-être bien les socialistes qui bouteront Valls hors de Matignon. Ou le contraindront à s’y retrancher…