Donald Trump récupère l’électorat « MARS », ni de gauche ni conservateur mais nationaliste

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Une bonne part de l’électorat issu de la classe moyenne américaine, qui ne se reconnaît ni de gauche – qu’on appelle « libérale » aux Etats-Unis – ni conservateur, est aujourd’hui séduit par le candidat à l’investiture républicaine Donald Trump. Selon les sondages, c’est lui qui récupère en priorité le vote de ces « MARS », ou Middle American Radicals. Comment ? Par ses prises de position nationalistes.
 
C’est en 1976 que sociologue de l’Université d’Oakland, Donald Warren, dans son livre The Radical Center: Middle Americans and the Politics of Alienation, identifiait ce groupe d’électeurs américains qui défiait la classification idéologique habituelle.
 
Il était composé de personnes peu éduquées, aux revenus moyens ou faibles, souvent ouvriers… A l’époque, Warren considérait qu’ils représentaient environ un quart de l’électorat américain. Ce qui les distinguait ? Leur manière de penser : ils n’étaient ni libéraux ni conservateurs, selon les définitions admises de ces termes. Ils avaient en commun la conviction que la classe moyenne subissait des attaques à la fois d’en haut et d’en bas. Warren leur avait donné le sobriquet de MARS : Middle American Radicals.
 

L’électorat « MARS » n’a jamais été de gauche ou conservateur mais les deux en même temps

 
Pour les MARS, le gouvernement ne se soucie que des riches et des pauvres, jamais des travailleurs de la classe moyenne.
 
Mais les MARS sont tout de même proches de la gauche américaine par certains côtés, puisqu’ils attendent du gouvernement qu’il fournisse un travail à chacun et qu’ils sont favorables au contrôle des prix, à la sécurité sociale, à l’aide sociale à l’éducation… A l’inverse, les MARS ont des positions très conservatrices sur les questions de pauvreté et de race, ce qui en fait le groupe électoral le plus méfiant envers le gouvernement alors même qu’ils appellent de leurs vœux la présence d’une seule personne forte à la tête de l’Etat fédéral.
 
Pour le National Journal, la description de ces MARS correspond en tous points à celle des soutiens de Donald Trump aujourd’hui, même si leur situation a changé ces dernières années, et que nombre d’entre eux ont troqué leur col bleu pour un col blanc.
 

Donald Trump récupère l’électorat MARS en répondant aux attentes nationalistes

 
Pour de nombreux commentateurs, l’ascension fulgurante de Trump dans les sondages est liée à sa personnalité. Une analyse incomplète pour le National Journal : si sa personnalité joue – les MARS sont précisément en attente d’une forte personnalité qui se soucie peu du politiquement correct et rejette les apparatchiks du système politique – elle n’est pas la seule raison de son succès. Donald Trump n’est ni « libéral » ni conservateur, mais il défend des positions cohérentes et claires et se présente en défenseur de la classe moyenne. Il parle souvent de la « majorité silencieuse », rend l’immigration illégale responsable de l’augmentation de la délinquance, et critique les attaques fiscales que subit la classe moyenne pendant que certaines entreprises profitent du système en place.
 
Plutôt que des populistes, les MARS sont plus exactement des nationalistes. Comme les précédents champions de cet électorat, Trump dénonce notamment les traités de libre-échange : il promet de revenir sur NAFTA et de faire revenir tous les emplois aux Etats-Unis.
 

Donald Trump critique le gouvernement de Washington, mais ne s’oppose pas à l’étatisme

 
Comme beaucoup d’autres, les représentants de cette mouvance n’ont cessé de critiquer Washington : Trump le fait également. Mais comme ceux qu’il séduit, il ne s’oppose pas frontalement à l’idée d’un gouvernement très étatiste. Trump ne compte pas privatiser ou éliminer la sécurité sociale aux Etats-Unis. Il a annoncé qu’il préférait faire revenir l’argent dans le pays plutôt que de s’attaquer aux organismes d’aides étatiques.
 
Si les MARS se sentaient abandonnés ces dernières années, c’est en raison du comportement des autorités républicaines, considérées bien souvent comme des « traîtres ». Donald Trump n’a pas hésité à s’opposer fermement à la classe dirigeante de son propre parti, ce qui l’a propulsé bien devant les autres candidats républicains dans les sondages. Les MARS sont de retour parce qu’ils ont retrouvé un chef. L’avenir dira s’il aura plus de succès électoral que ses prédécesseurs, souvent sortis de la course par des campagnes médiatico-politiques agressives.
 

Béatrice Romée