Le président du Conseil général de Guyane, Alain Tien-Liong, vient de prendre un arrêté décidant de la mise à la « retraite » d’office, au 1er janvier, de l’évêque de Cayenne, Mgr Emmanuel Lafont. Celui-ci a jugé la décision « plutôt cocasse », mais « pas réglementaire ».
L’affaire dure depuis de longs mois, puisque, le 30 avril dernier, le président du Conseil général avait déjà mis fin, par vingt-six arrêtés, à la rétribution de vingt-six prêtres à compter du 1er mai suivant. Mais, saisi par les intéressés, le tribunal administratif de Cayenne avait donné tort à Alain Tien-Liong en référé le 16 juin et, sur le fond, le 29 décembre, soit lundi dernier, en annulant les vingt-six arrêtés.
La Guyane ne peut ainsi décider d’une mise à la « retraite »
Le tribunal a ainsi considéré dans sa décision que « la rétribution des membres du clergé catholique continue à relever des dépenses obligatoires du département de la Guyane », et que le président du Conseil général n’avait pas « compétence » pour les « supprimer unilatéralement ». Et que, en conséquence, il devait donc « rétablir sans délai » les traitements supprimés.
Il faut savoir que la rétribution des membres du clergé catholique de Guyane est toujours régie par une ordonnance royale de Charles X, en date du 27 août 1828, qui indique en son article 90 que « les attributions de l’ordonnateur comprennent “le paiement des ministres du culte” ».
La Guyane reste sous l’Ancien Régime…
Ces dispositions ont perduré au fil des ans, et même au vingtième siècle, puisque le décret de 1911 étendant l’application de la loi de 1905 à la Réunion, la Martinique et la Guadeloupe, ne faisait pas cas de la Guyane qui, de ce fait, demeure, si l’on peut dire, sous l’Ancien Régime… même après l’érection de ces colonies en départements français, puisqu’il n’existe toujours aucun décret d’application pour la Guyane.
La retraite à 65 ans !
Qu’importe la loi ! Qu’importe la justice ! Qu’importe l’histoire ! Tel Ubu, le personnage récidive ! Sans doute s’est-il aperçu, comme le remarque l’évêque, que celui-ci avait plus de 65 ans. Mais, ajoute-t-il : « Cet arrêté est manifestement irrégulier car les membres du clergé ne sont pas considérés comme des fonctionnaires. »
L’évêque de Cayenne joue l’apaisement
Sur le fond, l’évêque n’est pas contre une sortie progressive de ce système de rémunération. « J’espère, affirme-t-il, une négociation, tranquillement, en prenant le temps, pour mettre fin à ce système. Après tout, on peut laisser tomber une loi en désuétude si l’on s’entend. Mais pas comme ça, par un oukase… »
En attendant, c’est plutôt la portion congrue puisque, comme l’explique encore Mgr Lafont : « Aujourd’hui, il y a 38 prêtres en Guyane bientôt 39, les 26 prêtres rétribués, enfin 25 puisque l’un d’eux est parti, donnent 20% de leur salaire pour les autres »…